Le gouvernement cherche à faire 10 milliards d’euros d’économies sur la santé ? Une étude sur « L’observance en France » publiée par IMS Health* vient de lui en trouver 9 ! Le groupe s’intéresse depuis longtemps à cette problématique. Déjà, en 2012, il avait signé une étude mondiale qui estimait que 269 milliards de dollars d’économies pouvaient être réalisés pour 186 pays au titre de l’observance.
Deux ans plus tard, l’objectif, ramené à l’échelon hexagonal, est plus modeste, mais plus concrète aussi. « Il est plus simple à l’échelle d’un pays d’isoler les moyens d’action et des solutions », explique le président d’IMS Health France, Vincent Bildstein. Mais c’est aussi « pour pouvoir porter sur la place publique le débat concernant l’observance et ses leviers d’amélioration » que le CRIP (Cercle de Réflexion de l’Industrie Pharmaceutique) et son président, Denis Delval, ont souhaité travailler avec IMS sur l’ampleur du phénomène en France. 40 % seulement de la population est observante.
L’étude, qui est une première, se concentre sur six pathologies chroniques, qui représentent le quart des dépenses de médicaments : HTA, asthme, diabète de type 2, ostéoporose, insuffisance cardiaque et hypercholestérolémie. Premier constat dérangeant après douze mois d’analyse : si l’on définit le seuil de l’observance par au moins 80 % de suivi des doses ou des durées prescrites, seule 40 % de la population cible est observante. Dans le détail, seulement 13 % des patients souffrant d’asthme seraient observants et 36 % des insuffisants cardiaques, 37 % des diabétiques de type 2, 40 % des hypertendus, 44 % des patients souffrant d’hypercholestérolémie, 52 % de ceux affectés par l’ostéoporose.
La non-observance entraîne des coûts sanitaires : l’enquête pointe la souffrance des patients, les vies handicapées par la maladie et les coûts indirects pour la société liés aux arrêts de travail ou au non-emploi de ces personnes. Et tout cela se chiffre aussi au plan économique du fait des complications engendrées par la non-observance. Par exemple, dans le cas de l’hypertension artérielle, le coût des accidents vasculaires cérébraux représente à lui seul 4,4 milliards d’euros dans une année. Et les auteurs de l’étude IMS arrivent, au total, à neuf milliards d’euros pour l’ensemble des six pathologies !
Méconnaissance de la pathologie, croyances, superstitions, mauvaise compréhension du traitement… Les causes de la non-observance sont multifactorielles. L’environnement du patient et la stigmatisation de ce dernier peuvent également entrer en jeu d’après l’étude. Autant de leviers d’action pour réduire le phénomène. Mais comment faire ?
La coercition est une piste tentante.
La France en a fait l’expérience avec l’appareil de Pression Positive Continue (PPC) dans le cadre d’apnée du sommeil qui devait être suffisamment utilisé pour être remboursé. Mais le Conseil d’Etat a suspendu l’arrêté quelques mois après sa promulgation. À en croire une autre étude menée par Observia, ce type d’incitations négatives serait de toute façon vouée à l’échec.
L’incitation financière auprès des patients pourrait en revanche être un élément de motivation « de nature à améliorer le niveau d’observance d’un traitement chronique », de l’ordre de 20 % en moyenne, selon Observia. Mais Kevin Dolgin, le président d’Observia convient aussitôt que ce sont là « des pratiques réalisées aux États-Unis et qui seraient difficilement transposables en France tant pour des raisons éthiques que juridiques ». D’autant que l’amélioration de l’observance suscitée par ces « récompenses » chute de façon spectaculaire lorsqu’elles ne sont plus distribuées…
Des modules spécifiques
Pour IMS Health, d’autres actions sont possibles encore. À commencer par une meilleure information des patients sur leurs pathologies. En direction des prescripteurs, l’étude propose également la création de modules spécifiques sur la communication aux patients dans le cadre du Développement Professionnel Continu (DPC). Et jusqu’à la ROSP (Rémunération sur Objectifs de Santé Publique) qui pourrait s’en mêler. Et les auteurs de suggérer une variation du bonus selon le taux d’observance par patient. Et pourquoi ne pas motiver à leur tour les pharmaciens ?
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