Devant une plaie suspecte ou traînante, la tentation est grande de recourir à un prélèvement. Or celui-ci retrouve pratiquement toujours des bactéries, d’où de fréquentes antibiothérapies, généralement inutiles, a mis en garde le Dr Anne Dompmartin (dermatologue, CHU de Caen) lors du congrès. Les germes retrouvés sont en effet le plus souvent liés à une colonisation et non à une infection. La peau saine possède un microbiote au sein duquel les bactéries les plus fréquentes sont les S. aureus à coagulase négative (25 à 30 % de la flore commensale), des Corynebacterium, et des Cutibacterium acnes, non ou peu pathogènes à l’exception de certains S. aureus. La rupture de l’équilibre de cette flore fait passer cette colonisation « physiologique » à une phase de colonisation critique puis au développement d’une infection, responsable d’un retard de cicatrisation et de l’extension des lésions. L’infection est généralement favorisée par des comorbidités comme le diabète, une immunosuppression iatrogène ou non, de mauvaises conditions de vie, etc.
Distinguer colonisation et infection débutante n’est pas aisé mais repose sur un certain nombre de critères. La présence d’au moins deux des éléments suivants plaide en faveur de l’infection : chaleur locale, érythème de plus de 0,5 cm de diamètre autour de la plaie, douleur, tuméfaction ou induration, écoulement purulent. Il faut y penser aussi devant une modification de couleur de la plaie, une douleur qui apparaît ou se majore, un suintement nauséabond.
Dans ce contexte, les pratiques de soins ont évolué, que ce soit au sujet du prélèvement bactérien ou du recours aux antibiotiques ou antiseptiques.
Le prélèvement ne doit être réalisé que sur des plaies cliniquement infectées, et après avoir éliminé les germes commensaux par débridement/nettoyage. L’écouvillonnage cutané n’a pratiquement plus sa place car il est contaminé par les germes de colonisation ; on privilégiera un curetage/écouvillonnage ou l’aspiration d’une collection, voire une biopsie (avec au moins trois prélèvements bactériologiques et une histologie). Le prélèvement n’a de valeur que s’il a été réalisé et conservé de façon optimale, s’il isole un pathogène certain (S. aureus, streptocoque pyogène, pseudomonas) ou présent sur au moins deux prélèvements. « Le prélèvement ne paraît vraiment nécessaire que si on suspecte un agent infectieux inhabituel ou potentiellement résistant, par exemple après une exposition à l’eau (baignade), chez un patient hospitalisé ou ayant reçu une antibiothérapie récente, la plupart des germes habituels étant couverts par une antibiothérapie probabiliste », insiste le Dr Dompmartin.
Les antiseptiques n’ont pas fait la preuve de leur efficacité ni dans les plaies infectées ni dans la prévention de la surinfection des plaies, et peuvent provoquer des réactions d’intolérance et des retards de cicatrisation. Les antibiotiques topiques n’ont pas d’indication dans les infections de plaies. Dans les ulcères de jambe, les pansements à l’argent Urgo peuvent être remboursés s’ils sont inscrits sous le nom de marque.
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