La réalité des refus de soins est désormais bien connue mais il est toujours compliqué de pouvoir la quantifier. Une étude publiée ce mardi par le Défenseur des droits permet de mettre des chiffres récents sur ces situations. Pour mesurer « les différences de traitement dans l'accès aux soins » selon l'origine et la « vulnérabilité économique » du patient, l'étude s'appuie sur un testing téléphonique « représentatif au niveau national », conduit entre février et mai 2019 auprès de 1 500 cabinets médicaux dans trois spécialités médicales : la gynécologie, la psychiatrie et la chirurgie-dentaire.
Pour chacune des spécialités, « une prise de rendez-vous a été sollicitée par trois patientes fictives : une patiente de référence, une patiente révélant par son patronyme une origine africaine » et « une patiente indiquant bénéficier, une fois sur deux », de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) ou de l'aide à la complémentaire santé (ACS).
Un tiers des refus explicite
Résultat, les patients bénéficiaires de la CMU-C ou l’ACS sont victimes d’une « forte discrimination ». En effet, « la patiente de référence obtient un rendez-vous avec succès dans 70 % des cas » contre seulement 58 % pour la personne bénéficiaire d'une aide. Ainsi, 12 % des cabinets contactés refusent de recevoir cette dernière alors qu'ils accordent un rendez-vous à l'autre patiente, malgré une demande similaire, formulée à la même période, sans caractère d'urgence. « Dans plus d'un tiers des cas, les professionnels » concernés déclarent explicitement refuser les bénéficiaires de la CMU-C et de l'ACS, les autres invoquant un manque de place, une méconnaissance de la prestation ou un autre argument « insidieux », selon l'étude. Ces « refus de soins discriminatoires » sont « le fait de 9 % des chirurgiens-dentistes, 11 % des gynécologues et 15 % des psychiatres » contactés.
Pas de lien avec la démographie médicale
Sans surprise, ils sont plus répandus chez les professionnels aux tarifs libres, notamment parce qu'aucun dépassement d'honoraire ne peut être facturé aux bénéficiaires de la CMU-C ou de l'ACS. Géographiquement, ces refus sont très variables selon les régions. Paris en particulier et toute l’Ile-de-France en général, étant les territoires où ces discriminations sont les plus fréquentes. En revanche elles ne sont pas liées à la désertification médicale et « ne semblent pas sensibles à la tension sur l’offre, appréciée par la densité médicale locale », souligne le rapport. Elles sont en revanche « jusqu'à deux fois plus marquées pour les bénéficiaires de l'ACS que pour ceux » de la CMU-C, en raison d'une méconnaissance des dispositifs ou des délais de remboursements redoutés par les professionnels. À l’inverse, globalement « peu de différences sont constatées selon l'origine supposée de la patiente ».
(avec AFP)
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