PV pour stationnement : ce que les médecins doivent savoir

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Publié le 18/07/2015

Crédit photo : S. Toubon

Trouver une place de stationnement à proximité du domicile de leur patient, en échappant aux contraventions. C’est le casse-tête des médecins de ville.

Aucune réglementation ne leur garantit l’impunité en la matière, pas plus que le caducée, même bien visible sur le pare-brise. Au contraire, il semble parfois que les autorités s’acharnent sur les médecins en visite… Peut-on éviter les mauvaises surprises ? Que faire en cas de PV ? « Le Quotidien » fait le point.

Les médecins ont-ils un passe-droit en matière de stationnement ?

Non. Aucune loi ne garantit aux médecins une impunité en matière de stationnement illicite, même en cas d’urgence médicale. En revanche, une circulaire datant du 26 janvier 1995 (et publiée dans le Bulletin officiel du ministère de l’intérieur n° 95/1 pages 728-729) précise les « facilités de stationnement accordées aux véhicules des médecins » dans le cadre de leur activité. Ces dispositions concernent également les sages-femmes.

Il ne s’agit pas d’un droit, mais d’une tolérance accordée aux professionnels. Le texte précise :

Les véhicules des médecins arborant le caducée, ou ceux des sages-femmes arborant leur insigne professionnel, pourront bénéficier de mesures de tolérance en matière de stationnement irrégulier dès lors que leurs propriétaires sont appelés à exercer leurs activités professionnelles au domicile de leurs patients, ou à proximité de leur domicile en cas d’astreinte et essentiellement pour satisfaire à leurs obligations, en cas d’urgence.

Les limites de la tolérance ?

Cette tolérance accordée aux médecins ne vaut pas pour tous les cas de figure. La circulaire de 1995 indique :

Ces stationnements irréguliers ne doivent pour autant pas être de nature à gêner exagéremment la circulation générale ou constituer un danger pour les autres usagers, notamment des piétons.

Peut-on occuper une place de livraison le temps d’une visite ? Est-il possible d’empiéter légèrement sur un passage piéton ? Un médecin peut-il s’affranchir de payer son stationnement dans les zones réglementées ?

Le texte ne le précise pas. C’est donc aux agents verbalisateurs d’apprécier les différents cas de figure et le caractère urgent d’une intervention médicale. Ce flou juridique est source de confusion pour les professionnels de santé, d’autant plus que la politique varie considérablement d’une ville à l’autre. Certaines communes appliquent la tolérance zéro à l’égard des médecins et considèrent que les règles de stationnement valent pour tout un chacun. Mieux vaut le savoir avant…

Les précautions à prendre ?

Pour mettre un maximum de chances de son côté, il faut bien entendu apposer le caducée sur le pare-brise de son véhicule et être en mesure de présenter sa carte professionnelle à la demande des agents verbalisateurs. Rappelons également que le caducée est strictement réservé à un usage professionnel. Il doit être retiré du véhicule dès que ce dernier est utilisé dans un cadre privé.

Est-ce que ça marche ?

Les témoignages publiés sur Internet par les médecins sont très variables. L’intérêt du caducée contre les PV est loin de faire l’unanimité. « Dans ma ville, la consigne à la police est de ne pas mettre de PV aux caducées médicaux » raconte un généraliste. Au contraire, « le caducée est moins efficace qu’une patte de lapin contre les prunes » s’amuse cet autre internaute.

« Nous avons parfois la désagréable sensation que la présence du caducée ne fait qu’énerver les policiers municipaux. Certains confrères préfèrent d’ailleurs ne plus s’en servir ! », s’alarmait le Dr Michel Bachelet (CSMF), interrogé en 2011 par Ouest France.

Que faire en cas de PV ?

Les médecins peuvent contester l’infraction par la voie légale classique en rappelant les termes de la circulaire de 1995 et en exposant les motifs de leur intervention. En 2010, le ministère de l’Intérieur rappelait lui-même cette possibilité de recours aux médecins, suite à une question d’un député au gouvernement :

Malgré l’apposition d’un caducée sur le pare-brise du véhicule, l’agent verbalisateur, en l’absence du praticien, ne peut pas toujours, au moment de la constatation de l’infraction, obtenir la preuve que le véhicule est utilisé à des fins exclusivement professionnelles. Il appartient alors au requérant, conformément aux instructions figurant au verso de la carte de paiement de la contravention remise, d’adresser à l’unité verbalisatrice une lettre dûment motivée, accompagnée de la carte de paiement complétée et de l’avis de contravention.

Les médecins peuvent également en appeler à leur conseil de l’Ordre départemental, dont les services sont bien souvent rodés à cet exercice. Mais, là encore, tous les conseils n’appliquent pas la même consigne et dans certains cas, le médecin sera livré à lui-même.

À quand une loi pour clarifier la situation ?

Le sujet du stationnement des professionnels de santé revient régulièrement au Parlement sous forme de questions posées au gouvernement. À ce jour, le législateur s’est toujours refusé à accorder un passe-droit aux médecins, en invoquant des questions de droit constitutionnel, et malgré la volonté de ne pas freiner la pratique des soins à domicile (voir cette question posée au Sénat en 1997).

Y a-t-il des dispositions propres à certaines villes ?

Pour mettre fin au flou juridique, certaines municipalités ont pris des dispositions, en proposant notamment des cartes de stationnement prépayées. À Paris, la préfecture et le conseil départemental de l’Ordre ont signé un partenariat visant à clarifier la situation. Les médecins peuvent stationner dans les zones payantes à condition de s’acquitter de la première tranche horaire de stationnement de la journée en cours (avec le caducée bien visible). Sous conditions (voir le CDOM), ils peuvent également bénéficier d’une « vignette urgence » (délivrée en début d’année) qui leur permet de garer leur véhicule sur les zones de livraison, le temps d’une visite, et à condition d’afficher le ticket horodateur de la première tranche horaire. La liste des professionnels concernés est transmise à la préfecture de police. D’autres villes ont mis en place des dispositifs similaires. Il est donc conseillé de se renseigner en mairie.

Que risque un médecin en cas d’abus ?

Une utilisation anormale du caducée peut entraîner des sanctions ordinales (retrait du caducée), en plus de l’établissement du procès-verbal de contravention pour stationnement irrégulier.


Source : lequotidiendumedecin.fr