La France fait face à une augmentation du nombre de demandeurs d’asile avec 122 743 personnes en demande en 2018. Les principales zones géographiques d’origine pour l’immigration régulière sont l’Europe et l’Afrique et, pour les demandeurs d’asile, l’Europe, l’Afrique, le Moyen Orient et l’Asie centrale. Le rattrapage vaccinal de ces personnes figure parmi les enjeux de santé publique liés aux migrations.
Plusieurs recommandations internationales se sont penchées sur ce sujet et proposent le plus souvent la reprise d’une primovaccination complète. En France, le groupe d’experts indépendants Infovac a préconisé l’utilisation des sérologies, anticorps antitétaniques et anticorps antiHBs en post-vaccinal. Cette position française repose notamment sur la crainte de réactions hyperimmunes principalement liées aux vaccins contenant l’anatoxine diphtérique et coquelucheuse fortement dosés.
Pour évaluer le niveau des pratiques, le BEH, par l’intermédiaire de plusieurs sociétés savantes, ont mené une enquête entre avril 2017 et mai 2018 par auto questionnaire en 2016-2018 auprès de médecins, exerçant en France, impliqués dans la prise en charge de migrants primo-arrivants, quelle que soit leur spécialité (*).
Au total, 372 médecins ont répondu à l’enquête. Les répondants étaient âgés en moyenne de 42 ans. 64,5 % étaient des femmes et 43,8 % exerçaient en Île-de-France.
Les trois situations suivantes leur ont été présentées :
« Vous devez effectuer le rattrapage vaccinal
• Chez un enfant de 4 ans érythréen en l’absence de carnet de vaccination. Sa mère dit avoir fait des vaccins après la naissance mais ne se rappelle plus lesquels. Il ne présente pas de cicatrice vaccinale.
• Chez une jeune Rom âgée de 14 ans en l’absence de carnet de vaccination. Sa mère dit qu’elle est à jour de ses vaccinations en Roumanie. Elle n’aurait pas eu de vaccin depuis l’âge de 2 ans. Elle ne présente pas de cicatrice vaccinale.
• Chez un homme syrien âgé de 35 ans en l’absence de carnet de vaccination. Il dit ne pas avoir fait de vaccination depuis l’enfance. Il ne présente pas de cicatrice vaccinale. »
L’analyse des réponses des médecins participants montre qu'en l’absence d’informations sur le statut vaccinal d’une personne migrante, les pratiques rattrapage apparaissent très diverses : renouvellement de la primo-vaccination complète (33,1 %), utilisation des sérologies pré (32,8 %) ou post-vaccinales (16,9 %), reprise du calendrier vaccinal en fonction de l’âge en faisant l’hypothèse que la personne a été correctement primo-vaccinée (26,6 %), ou collecte d’informations sur les pratiques vaccinales dans les pays d’origine des patients (23,4 %).
Les femmes et les hommes médecins développent des pratiques vaccinales différenciées, les premières s’aidant plus volontiers de sites spécialisés ou de sérologies post-vaccinales, les seconds refaisant plus souvent une primo-vaccination complète. La majorité (55,4 %) des répondants ne fait pas plus de 2 injections vaccinales le même jour.
Ces conclusions ont été intégrées à la recommandation provisoire sur le rattrapage vaccinal des personnes dont le statut mal connu que la HAS, en partenariat avec la Spilf, vient d’éditer et qu’elle soumet à une consultation publique jusqu’au 10 juillet prochain. L’objectif est d’évaluer la lisibilité, l’acceptabilité et l’applicabilité de ces recommandations afin de favoriser leur mise en œuvre ultérieure.
(*) Groupe de travail Migration et prévention, des membres de la Société de formation thérapeutique du généraliste (SFTG Recherche), du réseau Sentinelles, du collectif national des Permanences d’accès aux soins de santé (Pass), Médecins du monde et les mailing-lists de la Spilf, de la Société de médecine des voyages et de la Société française de lutte contre le sida.
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