Psychose émergente 

Un traitement au bon moment

Publié le 13/12/2018
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Crédit photo : VICTOR HABBICK VISIONS/SPL/PHANIE

psychose

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Le concept de psychose regroupe des maladies mentales caractérisées par une altération de la connaissance et de la gestion du monde extérieur (de prévalence élevée, 1 %, la schizophrénie y est souvent assimilée). La prise en charge de la psychose reste au cœur de nombreux débats, nourris par la stigmatisation et la médiatisation que la maladie suscite, mais également par sa complexité physiopathologique et sa part d’inconnues. Les traitements antipsychotiques souffrent de cette même stigmatisation dans la population générale, chez les patients et leur famille, voire parmi le corps médical. Ils renvoient à la fois à la maladie et à des effets indésirables eux-mêmes stigmatisant.

Dans l’optique d’un diagnostic plus précoce, des stades cliniques de la maladie ont été décrits (1) : stades asymptomatique (stade 0, risque génétique), prodromique (stade 1, symptômes psychotiques d’intensité faibles ou furtifs), premier épisode psychotique (stade 2), rechute (stade 3) et enfin chronicisation (stade 4). Plusieurs difficultés rendent parfois fastidieuse la caractérisation de chaque stade : l’hétérogénéité de la maladie (symptômes dominants soit positifs soit négatifs) ; le manque de spécificité des échelles de prodromes (notamment sur la valence négative, liée au fonctionnement) ; l’absence de définition consensuelle du premier épisode psychotique.

Le concept de psychose émergente comprend les stades 1 et 2, dont la prise en charge spécifique cherche à ralentir la trajectoire de la maladie vers les stades 3 et 4, voire de la modifier. La durée de psychose non traitée (entre le début du premier épisode psychotique et le début du traitement antipsychotique) est un enjeu pronostique majeur. Elle est associée à un risque de moins bonne réponse symptomatique, de plus mauvais fonctionnement social et de rechutes plus fréquentes.

Les antipsychotiques limités par leurs effets secondaires

Si les antipsychotiques de seconde génération ont considérablement amélioré la tolérance au traitement, ils présentent des effets secondaires spécifiques limitant leur utilisation un stade prodromique. À ce jour, chez le sujet à haut risque de psychose, c’est-à-dire présentant des signes prodromiques sans critères avérés de premier épisode psychotique (stade 1), leur emploi n’est pas recommandé.

Les thérapies cognitivo-comportementales et la psychoéducation peuvent aider à la prise en charge d’une altération du fonctionnement dans cette population. En cas de comorbidité psychiatrique, fréquente, un traitement pharmacologique adapté (antidépresseur, anxiolytique…) doit néanmoins être employé.

Réduire le délai diagnostique

La prise en charge du premier épisode psychotique est mieux codifiée. Le principal enjeu est le délai diagnostique, qui doit être précoce, toujours pour diminuer la durée de psychose non traitée. Elle comprend l’emploi d’un traitement antipsychotique, dont le choix repose sur la symptomatologie (participation thymique ou non, notamment) et le profil de tolérance de chaque molécule.

Les recommandations proposent de maintenir le traitement pendant deux ans après une réponse symptomatique complète. Cette nécessité d’observance doit faire s’assurer de la bonne tolérance (sexuelle notamment) et proposer systématiquement l’emploi de traitement retard par voie injectable, dès le premier épisode (2).

Infléchir l’évolution de la maladie ?

À ce jour, sur le plan pharmacologique, seuls les traitements antipsychotiques ont fait preuve d’une véritable efficacité symptomatique. Utilisés au bon moment, ils permettent la rémission et retardent l’évolution de la maladie. Au contraire, l’allongement de la durée de psychose non traitée est directement lié à des rechutes plus fréquentes et au moins bon fonctionnement général du patient.

L’enjeu de l’obtention d’une rémission fonctionnelle au-delà des symptômes seuls et les limites rencontrées par les antipsychotiques sur les symptômes négatifs font porter l’effort de recherche sur des traitements susceptibles d’altérer l’évolution de la maladie à plus long terme. En ciblant différents profils, cliniques, biologiques ou radiologiques, à différents stades de la psychose, des thérapies de précision (anti-inflammatoires, supplémentation de carences…) pourraient être proposées à l’avenir (3).

 

La durée de psychose non traitée est un enjeu pronostique majeur

SHU du CH Sainte-Anne (Paris)

Dr Fabrice Rivollier
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Source : Bilan Spécialiste