« Il a fallu au GRIO*, à la Société française de rhumatologie et à de nombreuses autres sociétés savantes, à l’initiative de ces nouvelles recommandations, cheminer entre deux écueils, de l’exhaustivité, impossible à transmettre, et de la simplification à outrance, où l’on prend le risque d’être réducteur, voire faux », observe en préambule le Pr Bernard Cortet.
Face à une fragilité osseuse, la première étape diagnostique est différentielle : s’agit-il réellement d’une ostéoporose, et y a-t-il donc une indication à débuter un traitement, ou d’un cancer, d’un myélome, plus rarement d’une ostéomalacie ou d’une hyperparathyroïdie primitive ?
En cas de fracture sévère
Une fois la maladie ostéoporotique confirmée, il existe un certain nombre de situations simples pour lesquelles il est légitime de mettre en œuvre un traitement en cas de fracture sévère, dont on sait qu’elle est à l’origine d’une surmortalité. Par fracture sévère, on entend fracture de hanche, de vertèbre, de l’extrémité supérieure de l’humérus ou du bassin (branches ischio-pubiennes et sacrum), et désormais, dans ces nouvelles recommandations, fracture du fémur distal, du tibia proximal ou de trois côtes simultanément. Une fracture qui est a ou peu traumatique, chute de sa hauteur ou faux mouvement par exemple (pour les fractures vertébrales) ?Deuxième cas de figure où le traitement est justifié, un T-score à moins de – 3. Sujettes à discussion en revanche (et à recours éventuel au rhumatologue), les ostéoporoses où le T-score est supérieur à – 3 et/ou la fracture non sévère. La décision de traiter s’appuie alors sur l’indice FRAX en particulier (Fracture Risk Assessment Tool) en 11 questions (antécédent personnel ou familial de fracture, corticothérapie, etc.) et la densitométrie osseuse au col fémoral. Il permet de calculer le risque de fracture sévère à 10 ans, le seuil d’intervention thérapeutique dépendant de l’âge (plus élevé pour une personne plus âgée, la part porotique d’une fracture diminuant au « profit » de la part « chute »).
Bon usage
« La Haute Autorité de Santé, à la faveur d’une fiche de bon usage du médicament, a en quelque sorte validé nos recommandations pour le traitement d’une ostéoporose dans les cas de fracture sévère et/ou de T-score inférieur à - 3 », se réjouit le Pr Cortet.
En première intention, les biphosphonates sont indiqués, ou le tériparatide si l’ostéoporose est dans les « clous réglementaires » (au moins deux fractures vertébrales). Le raloxifène est réservé aux suites des fractures vertébrales ou lorsque l’abaissement de la densité osseuse prédomine au rachis. « Les critères scientifiques manquent pour privilégier telle ou telle voie d’administration des biphosphonates, intraveineuse ou per os », constate le rhumatologue. Le zolédronate (Aclasta) peut être préféré en cas d’antécédent de fracture de hanche, une étude spécifique ayant été démonstrative. « À titre personnel, précise le Pr Cortet, je trouve ce mode d’administration plus simple (et d’observance plus sûre), une perfusion au domicile de 20 minutes une fois par an, versus une prise une fois par semaine (pour l’alendronate et le risédronate) ou deux fois par mois (pour le risédronate). » En relais des biphosphonates, « possiblement un anticorps antiRANK-ligand, le dénosumab (Prolia), en une injection sous-cutanée tous les 6 mois, bien toléré, dont le mécanisme d’action correspond bien à la physiopathologie de l’ostéoporose », note-t-il. Le risque d’ostéonécrose de mâchoire doit être nuancé tant en ce qui concerne les biphosphonates que le désonumab (Prolia). Il est de 1/10 000 à 1/100 000 patients/années (les doses de biphosphonates ou de désonumab sont bien inférieures ici à celles utilisées pour les cancers). Comme ces complications surviennent deux fois sur trois après une extraction dentaire, un avis spécialisé est au préalable demandé pour que l’état bucco-dentaire soit compatible avec la prescription. Autre effet secondaire exceptionnel, les fractures fémorales atypiques (dont l’incidence est comparable à celle des ostéonécroses de mâchoire sous biphosphonates dans l’ostéoporose). Ces deux évènements indésirables étant liés à la durée du traitement, celle-ci, pour un premier cycle thérapeutique par biphosphonates, est de l’ordre de 3 à 5 ans.
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