Deux études, publiées respectivement dans les revues « Nature » et « Cell », mettent en évidence, chez la souris, la capacité du virus Zika à franchir le placenta, et même à l'endommager. Les chercheurs ont en outre montré que l'infection par le Zika au cours de la grossesse pouvait être associée à un retard croissance intra-utérin en l'absence d'une défense immunitaire correctement stimulée par les interférons. Ces travaux ouvrent de nouvelles pistes de traitements et de vaccins contre cet arbovirus.
Le Dr Fernanda Cugola et ses collègues de l'université de São Paulo relatent plus précisément, dans l'édition du 11 mai de « Nature », les effets de la souche de Zika MR-766. Prélevée en Ouganda, cette dernière partage près de 90 % de son matériel génétique avec celles qui ont circulé en Polynésie française en 2013, et qui circulent actuellement au Brésil.
Les chercheurs ont infecté des souris gestantes issues de deux lignées, SJL et C57BL/6. Une analyse des souriceaux immédiatement après leur naissance a révélé que les petits issus de femelles SJL infectées au cours de la grossesse présentaient un retard de croissance intra-utérin, des signes de microcéphalie, et des malformations du cortex.
Les interférons essentiels pour prévenir la réplication virale
Il n'y avait, en revanche, pas de différence morphologique significative chez les souriceaux nés de femelles C57BL/6 infectées par le virus Zika. « La raison pour laquelle le virus n'a pas traversé le placenta des souris C57BL/6 n'est pas très claire, expliquent les auteurs, mais cela pourrait être dû à une forte réponse antivirale propre à cette lignée qui secrète des doses importantes d'interférons de type I et II. Ces données suggèrent que ce sont les particularités génétiques des patientes qui expliquent pourquoi certaines donnent naissance à des enfants sans malformation congénitale. Notre modèle murin pourrait se révéler utile pour de futures études précliniques », concluent-ils.
Les auteurs ont par ailleurs réalisé une expérimentation in vitro au cours de laquelle ils ont observé les dommages occasionnés par la souche MR-766 sur des cultures de tissus nerveux : apoptose et désorganisation des couches de neurones. Ces résultats renforcent les preuves que le virus Zika est capable de traverser le placenta pour provoquer des microcéphalies en ciblant les cellules progénitrices du cortex.
Une dégradation du placenta
Les chercheurs de l'école de médecine de l'université de Washington, dirigés par les Pr Indira Mysorekar et Michael Diamond, ont pour leur part étudié plus particulièrement l'effet d'une souche de Zika provenant de Polynésie française sur l'intégrité fonctionnelle du placenta de souris. Leurs travaux, publiés dans « Cell » le 11 mai, ont consisté à exacerber l'impact de l'infection en privant des souris femelles de la voie de signalisation impliquée dans la réponse à l'interféron, cette dernière étant largement impliquée dans la prévention de la réplication du virus Zika dans les organes périphériques. Ils ont pour cela croisé des femelles mutées dépourvues de cette voie de signalisation avec des mâles « sauvages », sans mutation. Une infection des femelles entre le 6e et le 7e jour de la vie embryonnaire provoquait systématiquement la mort du fœtus, associée à une dégradation du placenta et dans le cerveau fœtal. La présence du virus a été attestée dans les différents types de trophoblaste. Les auteurs supposent que ces cellules pourraient constituer la porte d'entrée du virus dans le placenta.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature