Le rythme des consultations est à déterminer pour chaque patient selon les besoins éducatifs et l’atteinte ou non des objectifs fixés. Il est consensuel de voir ces patients au moins tous les trois mois. Le tableau 1 (voir p. 29) synthétise les points à suivre à chaque consultation (2).
L’interrogatoire et l’examen clinique
Tout d’abord, connaître le patient avec ses dimensions bioclinique, cognitive et psycho- sociale reste un élément incontournable. Lors de la consultation, l’interrogatoire précise la tolérance des traitements, l’observance et le mode de vie du patient.
→ En cas de tabagisme, des conseils adaptés d’arrêt doivent être prodigués. La prescription d’une activité physique adaptée avec l’évaluation par la suite de la faisabilité devrait aussi être réalisée. De la même manière, lors du bilan éducatif initial, en fonction des habitudes alimentaires du patient, des messages doivent être transmis sans le culpabiliser.
Il convient de vérifier régulièrement la réalisation du changement des habitudes alimentaires et sa durabilité. Si le patient le souhaite, il peut être utile de faire appel à une diététicienne. En cas de surpoids ou d’obésité, il faut convenir avec le patient d’une perte de poids souhaitable. Une perte de 5-10 % du poids seulement peut déjà améliorer l’équilibre glycémique et d’autres désordres métaboliques ainsi que le contrôle tensionnel.
→ Concernant l’adhésion au traitement, une revue récente de la littérature met en évidence que l’observance du traitement est associée à une amélioration du contrôle glycémique, à une réduction des recours aux urgences et des hospitalisations et à une réduction des coûts directs de prise en charge des patients (3).
→ La survenue d’effets secondaires et d’hypoglycémies est à évaluer systématiquement afin d’envisager des changements thérapeutiques ou des posologies des médicaments responsables. Les hypoglycémies survenant sous anti-diabétiques oraux sont souvent mal identifiées d’où l’importance d’un interrogatoire ciblé. De la même manière, toute prescription d’un médicament anti-diabétique susceptible d’induire des hypoglycémies implique la prescription d’un appareil d’auto-surveillance glycémique accompagnée d’une éducation concernant son utilisation (la fréquence de réalisation et les modalités). Il convient de rappeler que l’auto-surveillance glycémique ne doit pas être passive ni systématique et que son utilité doit être discutée à chaque consultation, en regard de l’angoisse qu’elle peut engendrer chez le patient et de son coût pour la société (4).
→ La première étape de l’examen clinique chez un patient diabétique est le calcul de l’indice de masse corporelle (IMC).
Sa surveillance à chaque consultation permet :
- de suspecter une autre étiologie que le diabète de type 2 si l’IMC est < 25 kg/m2 au moment du diagnostic ;
- de suivre les effets des traitements sur le poids ;
- d’envisager un traitement par un agoniste des récepteurs du GLP-1 si l’IMC est > 30 kg/m2 (dans le cadre d’une indication remboursée) ;
- d’envisager un traitement par chirurgie bariatrique si l’IMC est ≥ 35 kg/m2 ;
- d’envisager une insulinothérapie si le déséquilibre du diabète s’aggrave malgré un poids stable ou en diminution.
→ Le dépistage des complications neurologiques et macro-angiopathiques est avant tout clinique. La prescription d’examens complémentaires doit être faite seulement si l’examen clinique est anormal (présence d’un souffle vasculaire, absence de pouls, douleurs rétrosternales typiques ou un électrocardiogramme anormal). Un examen neurologique doit être réalisé une fois/an avec la recherche des réflexes ostéotendineux et le test du monofilament de Semmes-Weinstein (10 g). L’électroneuromyogramme (ENMG) peut être envisagé en cas de neuropathie atypique.
La recherche d’une hypotension orthostatique, en faveur d’une neuropathie autonome cardiaque évoluée, est réalisée lors de la consultation. La recherche des pouls périphériques et l’IPS (index de pression systolique cheville/bras) dépistent l’atteinte arté-rielle au niveau des membres inférieurs. L’IPS est mesuré en position couchée avec un tensiomètre et un appareil Doppler de poche. L’IPS est défini comme normal entre 1 et 1,40 ; comme limite entre 0,9 et 0,99 ; comme anormal si inférieur à 0,9. Un IPS > 1,40 est en faveur d’une incompressibilité des artères (médiacalcose).
Les examens complémentaires
→ Comme précisé dans le tableau 1 ci-contre, l’HbA1c doit être dosée tous les 6 mois si l’objectif est atteint et si le traitement n’est pas modifié et tous les 3 mois dans les autres situations. L’intérêt de l’HbA1c et la cible à atteindre doivent être com-pris par le patient.
En l’absence de complications, l’objectif glycémique est à fixer sur un mode individuel en tenant compte de l’âge du patient, de son état de santé, son statut socio-économique et son espérance de vie. Si la cible fixée ne peut être atteinte, il est nécessaire d’en déterminer la cause et d’adapter éventuellement le traitement. Pour un diabétique de découverte récente ayant une espérance de vie estimée à plus de 15 ans, sans antécédent cardio-vasculaire, l’objectif glycémique peut être ambitieux (HbA1c < 6,5%) lors de la mise en place des règles hygiéno-diététiques et/ou d’une monothérapie par la metformine ou des inhibiteurs des alpha-glucosidases (5).
Dans l’étude UKPDS, il a bien été montré que la « mémoire » d’un bon contrôle glycémique initial dès la découverte du diabète diminue la mortalité après 10 ans de suivi (6). Donc, il est essentiel de trouver avec le patient des moyens efficaces afin d’obtenir l’objectif souhaité et de réagir rapidement en cas d’échec (éviter « l’inertie thérapeutique »).
→ L’évaluation de la fonction rénale, l’électro-cardiogramme et le contrôle ophtalmologique sont réalisés une fois par an, avec la possibilité de différer l’évaluation oculaire tous les deux ans si l’objectif glycémique et tensionnel est atteint.
→ Le dosage de la créatininémie avec estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) par l’équation CKD-EPI pour dépister l’insuffisance rénale est réalisé une fois/an. Le calcul de la clairance de la créatinine suivant la formule de Cockcroft et Gault peut être utilisé pour adapter la posologie des médicaments, conformément à leur AMM. Parallèlement, le dosage de l’albuminurie est réalisé aussi au même rythme sur un échantillon urinaire et le résultat est exprimé sous la forme du rapport albuminurie/créatininurie (A/C) (valeur élevée si > 3 mg/mmol).
→ Le dépistage de la rétinopathie par la rétinographie permet un examen de la rétine sans dilatation systématique de la pupille (7). Cet examen est plus accessible que le fond d’œil pratiqué par un médecin ophtalmologue. La prise de la photographie et la lecture peuvent différer dans le temps et l’espace, impliquant éventuellement différents professionnels et un contrôle de qualité avec stockage possible des images permettant une traçabilité, une double lecture et un suivi de l’évolution. L’appareil est disponible facilement dans des structures hospitalières (ophtalmologie, diabétologie), au sein de centres de santé et en libéral.
Le dépistage de la rétinopathie diabétique est pratiqué :
- une fois/an lorsque les objectifs de contrôle glycé-mique et/ou de contrôle de pression artérielle ne sont pas atteints et chez les patients traités par insuline ;
- tous les 2 ans chez les patients non insulinotraités et dont les objectifs de contrôle de la glycémie et de la pression artérielle sont atteints.
Rappelons que les principaux facteurs de risque de rétinopathie diabétique sont :
- le niveau d’HbA1c ≥ 8 % ;
- la pression artérielle systolique ≥ 150 mm Hg, avec des variations selon les caractéristiques individuelles du patient;
- l’ancienneté du diabète ≥ 10 ans.
→ La fréquence de suivi des examens recommandés a progressé depuis le premier recueil effectué dans l’étude Entred en 2001. Toutefois, si la fréquence de réalisation des dosages annuels de créatininémie et des lipides atteignaient, en 2013, respectivement 84 % et 74 %, la réalisation de trois dosages annuels d’HbA1c et du dosage de la microalbuminurie continuait de progresser mais n’atteignait respecti-vement que 51 % et 30 % la même année.
De même, le suivi dentaire progressait mais n’atteignait que 36 %. Le suivi cardiologique et ophtalmologique ne concernait que 35 et 62 % des patients respectivement (8). En 2013, le dosage de la créatininémie était en progression de 5 % par rapport à 2007. En revanche, le suivi cardiologique et ophtalmologique n’a pas augmenté (1). Il n’existe pas de différence significative entre le suivi biologique des populations favorisées et celles défavorisées.
Malgré cela, des disparités existent dans la fréquence des complications, plus élevée dans les DOM. Ces informations soulignent l’importance d’une prise en charge individualisée de ces patients, qui ne passe pas seulement par la réalisation des examens, mais aussi par une très bonne connaissance du patient, de son contexte socio-économique et de la nécessité d’une prise en charge globale.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)