LES MÉTHODES
60 médecins généralistes ont été sélectionnés sur les critères suivants : la moitié du groupe devait ne pas être adhérant à la SFMG, la répartition par classes d’âge, et par genre devaient être superposable à celle des données du Conseil National de l’Ordre des Médecins en 2002 (CNOM), l’activité des médecins, et leur territoire d’exercice devaient être superposable à celle des données du SNIR 3 (Données CNAMTS –DSES –DEOS). Cette sélection a été scindée en deux groupes de 30 médecins répartis en cinq ateliers, pendant une journée, avec quatre séances de travail. La séance initiale s’organisait autour d’un « remue-méninge » sur l’optimisation de la prescription : 1. Qu'est ce qu'une prescription non optimale pour vous ? 2. Pensez-vous que certaines de vos poly prescriptions ne sont pas optimales ? Si oui, pourquoi ? Avec des exemples de patients qui vous viennent à l'esprit. 3. Pourquoi pensez-vous que certaines ne peuvent pas être optimisées ? Comment les gérez-vous ? Avec des exemples de patients qui vous viennent à l'esprit. Les 3 séances suivantes, étaient organisées autour de cas cliniques avec une question à chaque fois : 1. Que pensez vous de cette ordonnance ? Avez-vous des ordonnances identiques et si oui, pour quels types de patients ? 2. Qu'est-ce que vous auriez fait pour l'optimiser ? 3. Pour quelles raisons ne serait-il pas possible d'optimiser cette ordonnance ?
LES RÉSULTATS
Parmi les 60 médecins, 58 se sont exprimés Les médecins non adhérents de la SFMG se sont exprimés autant sur ce sujet que les adhérents (48% vs 52%). Les médecins à exercice solitaire (représentation dans le groupe 48%) se sont un peu plus exprimés sur le sujet (53%). Il n’y a pas de différence entre les classes d’âge et les genres. Pour ce qui concerne l’ancienneté d’exercice, les médecins entre 20 et 29 ans d’installation (représentant 55% du groupe) et les médecins ruraux et périurbains se sont plus exprimés sur ce sujet.
-› Six thématiques émergent : les effets liés au médecin généraliste, à la communication entre médecins, aux référentiels de bonne pratique, au patient, à la société et à l’industrie pharmaceutique.
-› Les médecins généralistes mettent en exergue : - les difficultés d’organisation du cabinet médical orienté plutôt vers la pathologie aigue, et peu adaptée à la gestion de la pathologie chronique, - les facteurs humains individuels notamment la solitude, la fatigue, les pressions incessantes des patients ou des institutions, - l’incertitude diagnostique (notamment pour les plaintes à forte composante subjectives et non résolues par l’escalade thérapeutique), - enfin la routine aggravée par les facteurs cités plus haut. Exemple de difficulté rencontrée par les médecins est la gestion temporelle des ordonnances de patients chroniques bien équilibrés mais qui risque une complication iatrogène induite par le vieillissement. La réévaluation régulière est une nécessité qui demande une consultation spécifique en terme de temps (organisation du cabinet médical) et de financement.
-› La mauvaise communication médicale est le plus souvent traitée par les médecins généralistes en termes de « trouble des modes de communication » qu’en termes de mauvaises relations humaines entre confrères. Le problème le plus important est la prescription des médecins spécialistes (qu’ils soient ambulatoires ou hospitaliers) qui vient se surajouter aux prescriptions chroniques habituelles sans qu’il y ait eu concertation sur l’opportunité de tel ou tel traitement médical.
-› Les recommandations de bonne pratique sont écrites avec une vision mono-problématique, la situation du patient poly pathologique est donc gérée par un « empilement de recommandations », ce qui génère de fait une poly prescription non synthétisée.
-› Parmi les effets de polyprescription liés au patient, nous avons d’une part l’importance de la polypathologie, et d’autre part les difficultés relationnelles. Celles-ci se scindent entre le refus fréquent du patient au changement thérapeutique et à son corollaire, la prescription d’alternatives non médicamenteuses. Enfin la pression, la demande des patients rendent parfois les relations médecins patients difficiles.
-› Les effets sociétaux sont en arrière-plan de l’effet patient et de leur représentation de la maladie. Deux éléments paraissent importants pour les médecins comme facteurs explicatifs de poly(sur)prescription : le surinvestissement de la société dans le médicament, et les effets ambigües des médias qui produisent soit de la véritable information participant à l’éducation thérapeutique, soit de la publicité. Parmi les effets « patients » on trouve des éléments intriqués : l’automédication, la méconnaissance de leurs traitements chroniques et les changements répétés de génériques qui, intriqués, sont des facteurs de forte iatrogénie potentielle. Le mésusage du médicament est renforcé par le conditionnement des médicaments (nombre de comprimés trop importants pour les anxiolytiques par exemple), et par des informations sur la boite de médicaments peu claires ou portant à confusion.
-› Enfin, les effets liés à l’industrie pharmaceutiques sont en arrière plan des effets sociétaux et des effets liés aux médecins. Parmi l’ensemble des déterminants de la polyprescription, leur place n’a paradoxalement pas été si importante dans le discours des médecins.
EN CONCLUSION
Ce travail a mis en évidence la perception des médecins généralistes quand aux causes de leurs poly prescriptions chroniques. Ils rappellent aussi, non sans humour qu’il y a poly prescription…. parce qu’il existe des malades poly pathologiques et qu’il faut gérer ces patients de plus en plus complexes et âgés dans des conditions d’organisation des soins obsolètes. Enfin les professionnels rappellent que nous sommes tous impliqués (de la sociét aux professionnels) dans la meilleure gestion de la poly prescription.
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