Dans un rapport de 150 pages, les inspections générales de la santé (IGAS) et de l'enseignement supérieur (IGAENR) formulent plusieurs propositions d'évolution des carrières hospitalo-universitaires, à l’occasion du soixantième anniversaire des ordonnances de 1958 sur la création des CHU.
Les inspections pointent plusieurs problématiques : la méconnaissance de ces carrières hospitalo-universitaires, les ambiguïtés du post-internat, la difficulté de mener conjointement les trois activités (soin, enseignement, recherche) et la perte d'attractivité liée à « l'opacité des critères de recrutement, l'incertitude en début de carrière, la charge de travail ».
Doper les doubles cursus médecine/sciences
Pour redorer le blason des parcours hospitalo-universitaires, il convient d'agir dès le début des études. La mission propose à cet effet de sensibiliser les étudiants dès le premier cycle et de les informer sur les doubles cursus médecine/sciences aujourd'hui méconnus et peu valorisés. « Si l'on veut que les carrières hospitalo-universitaires continuent à attirer les jeunes les plus brillants, il faut très en amont détecter ceux d'entre eux qui sont attirés par la recherche et les aider dans leurs parcours », peut-on lire.
Plusieurs dispositifs existent pour faciliter la poursuite simultanée des études de médecine et d’un parcours scientifique : double cursus à l'INSERM, à l'ENS ou dans certaines facultés. Ces cursus riches proposent aux étudiants en médecine un accès au master 2 de sciences avant les épreuves classantes nationales (ECN). « Les doubles parcours santé/recherche doivent être encouragés, leurs modalités d'accès transparentes et ouvertes », lit-on. Selon l'association Médecine Pharmacie Sciences (AMPS), seuls 100 étudiants par an empruntent ce chemin, soit 1 % des effectifs.
Recentrer le post-internat sur les parcours HU
Le réaménagement du post-internat fait aussi partie des priorités. La double valence universitaire et hospitalière des chefs de clinique et des assistants « est trop souvent devenue une fiction », peut-on lire.
Sur la forme d'abord, beaucoup d'internes et de jeunes chefs de clinique déplorent « le manque de lisibilité sur les postes offerts, l'opacité du mode de recrutement, l'inégalité entre les services, les décisions de recrutement et de renouvellement trop tardivement connues et difficiles à gérer sur le plan individuel », commentent les experts.
Sur le fond ensuite, un recentrage du post-internat sur des fonctions véritablement hospitalo-universitaires est jugé indispensable. De fait, plusieurs profils de médecins s'orientent vers le post-internat : ceux qui souhaitent s'engager dans une carrière hospitalo-universitaire (ou à défaut en hôpital public), ceux qui veulent compléter leur formation mais aussi tous ceux qui se destinent au secteur libéral et veulent seulement bénéficier des titres requis pour accéder au secteur II à honoraires libres. Ces derniers candidats « contribuent à gonfler artificiellement la demande du post-internat, une partie des places étant occupée par des praticiens dont le secteur II constitue l'unique motivation », déplore le rapport.
La proposition serait donc de recentrer le post-internat sur les parcours hospitalo-universitaires (HU) avec une identification « plus précoce des candidats aux carrières HU » et surtout une préservation du temps consacré à la recherche, trop souvent absorbé par les tâches hospitalières de plus en plus prégnantes.
La mise en garde des Jeunes Médecins
La mission IGAS/IGAENR recommande en complément un « réexamen des conditions d’accès conventionnel au secteur II ». Le sujet est très sensible pour les futurs médecins spécialistes. Pour les jeunes en effet, pas question, sous couvert de réformer le post-internat et l'accès aux carrières hospitalo-universitaires, de sacrifier l'accès au secteur II. « 75 % des internes veulent compléter leur formation », rappelle le Dr Emanuel Loeb, président du syndicat des jeunes médecins (ex-ISNCCA).
Actuellement, le secteur II est accessible après deux ans de fonctions effectives en qualité de chef de clinique ou d'assistant. Mais avec la réforme du 3e cycle des études médicales, la phase dite de consolidation (c'est-à-dire l'ultime phase de l'internat avec le nouveau statut encore flou de docteur junior) compterait comme une année pour l’accès au secteur II. Il ne resterait aux étudiants de troisième cycle à accomplir qu’une seule année comme CCA, AHU ou assistant des hôpitaux pour remplir la condition d’accès aux honoraires libres. Les futurs spécialistes craignent une raréfaction du nombre de postes disponibles en « post-DES ». Et donc in fine un accès plus compliqué au secteur II...
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