« Un procès de puissants » qui ont « écrasé un homme » : l'avocate de la famille du Pr Mégnien qui s'était suicidé à l'hôpital Georges Pompidou en 2015 a demandé au tribunal correctionnel de Paris de reconnaître coupables de harcèlement moral l'AP-HP et quatre de ses responsables. Pour démontrer le harcèlement moral, « l'analyse du contexte » est essentielle, a rappelé dans sa plaidoirie Me Christelle Mazza, avocate de la veuve et des cinq enfants du professeur de cardiologie, qui l'écoutaient ce mardi au premier rang de la salle d'audience.
« On ne peut pas examiner les faits isolément les uns des autres », a-t-elle poursuivi. « Chacun des faits qui, séparément, peuvent paraître insignifiants doivent être examinés à la lumière de tous les autres », pour voir « s'ils font système ». Elle a ensuite remonté l'histoire, des années avant cet après-midi du 17 décembre 2015, quand Jean-Louis Mégnien, brillant professeur en cardiologie de 54 ans, s'était jeté par la fenêtre de son bureau, au septième étage de l'hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP).
Descente aux enfers
Il avait repris le travail trois jours plus tôt, après neuf mois d'arrêt maladie. Des collègues du médecin avaient rapporté sa « descente aux enfers progressive », les « maltraitances » et « manœuvres » de ses supérieurs pour que le poste de chef de service de médecine préventive cardio-vasculaire qu'il convoitait lui échappe, et l'organisation de sa « placardisation », selon le tribunal. Sa plaidoirie est une réponse au « long cortège de mensonges offert inlassablement » depuis l'ouverture du procès le 31 mai par les prévenus, par les trois responsables hiérarchiques du Pr Mégnien, la directrice de l'hôpital de l'époque, et l'AP-HP en tant que personne morale, a accusé l'avocate.
Pendant le procès, ils se sont défendus de tout manquement, répétant avoir uniquement tenté de « trouver une solution » à ce qui avait été appelé le « problème Mégnien ». « Je n'ai aucun doute que vous entrerez en voie de condamnation pour tous. L'institution bien sûr, mais au cœur de cette tragédie ce sont les médecins les principaux coupables », a insisté Me Christelle Mazza. « Tous sans exception ont joué leur part », a-t-elle ajouté, précisant avoir « rarement vu autant de cruauté humaine » dans un dossier. Les prévenus encourent jusqu'à deux ans de prison. Les réquisitions sont prévues mercredi matin, la défense plaidera jeudi et vendredi.
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