LA SÉANCE INAUGURALE du MEDEC 2010 a donné lieu à un réquisitoire en règle contre le contrat d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI). Mis en place en avril 2009, le dispositif a conquis près de 14 000 omnipraticiens. Il rencontre toujours, toutefois, une farouche résistance des médecins, de l’Ordre et des laboratoires pharmaceutiques.
« La création d’un intéressement aliène l’indépendance professionnelle des médecins, attaque le Dr Michel Legmann, président du CNOM, qui a déposé un recours devant le Conseil d’État contre le contrat. Le CAPI introduit une rupture d’égalité entre les médecins et favorise le risque d’une altération de la relation de confiance entre le praticien et ses patients. » Le Dr Michel Chassang, président de la CSMF (Confédération des syndicats médicaux françaos), utilise une image forte pour décrire le dispositif promu par l’assurance-maladie. « Le CAPI est un poison qui détruit le système conventionnel et pourrait conduire à la privatisation du système de santé ». Pour le leader syndical, ce contrat n’est rien moins qu’un encadrement des prescriptions des médecins. Selon lui, les premiers indicateurs choisis par l’assurance-maladie vont immanquablement se durcir. Malgré cela, le Dr Chassang veut intégrer le paiement à la performance dans le cadre conventionnel.
L’industrie n’est pas en reste dans ses critiques. « Le CAPI peut inciter le médecin à faire perdre des chances à son patient pour atteindre des objectifs qui lui sont donnés, commente Christian Lajoux, président du LEEM. Le CAPI est plus révélateur du malaise du système de santé qu’une solution. »
Les patients défenseurs du CAPI.
Dans ce concert de reproches, le Dr Claude Leicher se démarque. « Les critiques que j’entends sur le CAPI ne sont pas les bonnes, indique le président de MG-France. Nous sommes favorables au paiement à la performance des médecins qui font des efforts pour la santé publique mais le mélange entre la performance sanitaire et la performance économique est une erreur de fond. Par ailleurs, où est l’équilibre économique du système si l’on propose ce contrat aux médecins qui sont déjà dans les clous des indicateurs ? »
Le CAPI a trouvé des défenseurs chez les partenaires sociaux et les usagers du système de santé. « Quelle volée de bois vert sur le CAPI, ironise Michel Régereau, président de l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM). S’il faut éviter d’aliéner la rémunération du médecin à sa pratique, alors supprimons d’urgence le paiement à l’acte ! » Le représentant de la CFDT rappelle la proposition de son syndicat pour diversifier les modes de rémunération des médecins en trois volets : « le paiement à l’acte, les forfaits pour l’amélioration de la santé publique et un complément lié à la performance ». « Il n’y a pas de raison pour qu’il n’y ait pas un supplément pour les médecins qui prescrivent mieux », affirme Michel Régereau. Le CAPI n’est pas perçu comme un danger par les patients. Bien au contraire. « Il comporte des points positifs, commente Christian Saout, président du Collectif interassociatif sur la santé (CISS) : un volet de santé publique accepté par tous et l’amélioration de la qualité de la prescription. Dès lors que l’on veut encourager les médecins à mieux prendre en charge leurs patients, pourquoi s’y opposer ? Le CAPI est une première marche vers une autre forme de rémunération et cela vaut peut-être le coup de faire bouger les lignes ». Si ce contrat a déjà séduit 14 000 praticiens, ce n’est pas par erreur souligne le représentant des usagers.
Conscient que « le CAPI interpelle », Frédéric van Roekeghem se dit prêt à intégrer le contrat dans la convention quand la loi le permettra : « Il est souhaitable que tous les médecins puissent intégrer les objectifs de santé publique. » Le directeur de l’UNCAM doit attendre avec impatience l’avis que rendra dans les prochains mois la Cour européenne de justice après le recours de l’association britannique de l’industrie pharmaceutique contre une initiative du NHS (National Health Service). Celle-ci prévoit l’octroi d’une prime en contrepartie de la prescription d’un médicament désigné, ce qu’interdit une directive européenne. Le directeur de l’UNCAM est serein. « Le jugement n’a pas été rendu », conclut-il, persuadé que le CAPI n’est pas concerné par la directive européenne.
À l’hôpital psychiatrique du Havre, vague d’arrêts de travail de soignants confrontés à une patiente violente
« L’ARS nous déshabille ! » : à Saint-Affrique, des soignants posent nus pour dénoncer le manque de moyens
Ouverture du procès d'un homme jugé pour le viol d'une patiente à l'hôpital Cochin en 2022
Et les praticiens nucléaires inventèrent la médecine théranostique