Plusieurs syndicats de médecins libéraux protestent contre l’entrée des sages-femmes dans la classification commune des actes médicaux (CCAM), qui devrait être actée avec la signature d’un avenant à leur convention. La parution au Journal officiel de ce texte est attendue à l’automne 2015, pour une entrée en application début 2016.
Après les chirurgiens-dentistes en juin 2014, les sages-femmes sont la dernière profession médicale à ne pouvoir facturer qu’au moyen de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). Le 2 avril, lors d’une réunion de la commission de hiérarchisation des actes et des prestations (CHAP) des sages-femmes, les parties prenantes ont validé les libellés proposés par la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM).
Tollé des médecins
Le 16 avril, l’assurance-maladie a informé les médecins de cette ouverture de la CCAM aux sages-femmes. Tollé. La section professionnelle de la CHAP médecins demande que le projet soit réécrit, avec une hiérarchisation de la CCAM qui serait spécifique aux sages-femmes, et réévaluation de la CCAM médecin. Dans les rangs des opposants figurent le SML, l’UMESPE/CSMF, la FMF, les pédiatres (SNPF), les gynécologues et obstétriciens libéraux (SGOL), ou encore le Conseil national professionnel en gynécologie et obstétrique (CNPGO).
Les syndicats mettent d’abord en avant la méthodologie de la CCAM, conçue en 2005 pour les médecins, en prenant en compte le travail médical et le coût de la pratique.
Nivellement par le bas, selon la FMF
« La CCAM a été calculée pour les médecins en prenant en compte la pénibilité, la technicité, le temps de travail, la formation. Utiliser cette CCAM pour les sages-femmes ne va pas : elles n’ont pas la même compétence technique ni la même responsabilité », résume le Dr Patrick Gasser, président de l’UMESPE.
« Un accouchement fait par une sage-femme ne vaut pas le même prix qu’un accouchement réalisé par un chirurgien-obstétricien. S’il y a un problème en cours de parcours, le chirurgien est tout de suite apte à intervenir pour faire sortir le bébé, tandis que la sage-femme doit appeler le médecin », explique le Dr Éric Henry, président du SML. « C’est une dénaturation de la CCAM médecin et un nivellement par le bas », dit encore le Dr Benoît Feger, président de la branche spécialiste de la FMF.
Le SGOL insiste, lui, sur la dimension assurantielle. « Cette reconnaissance par l’UNCAM de la capacité des sages-femmes à facturer ces actes de gynécologie-obstétrique ne préjuge pas de leurs compétences, ni de leur qualification et encore moins de la couverture assurantielle de leurs actes », fait valoir le syndicat.
Le CNPGO s’inquiète lui du « droit d’auto-prescription d’actes pour situation pathologique » tandis que les pédiatres contestent un nouveau libellé : la surveillance en unité d’obstétrique d’un enfant dont l’état nécessite un placement en incubateur ou des soins de courte durée, en raison de l’aspect pathologique de la situation, qui sort du champ de compétence de la sage-femme, selon le SNPF.
De nouveaux libellés, pas de nouvelles compétences
Les syndicats de sages-femmes assurent que leur entrée dans la CCAM anticipées de très longue date – des négociations sont en cours depuis décembre 2013 – ne leur ouvre pas de nouvelles compétences, malgré l’apparition de nouveaux libellés. La très grande majorité des actes à compétence partagée avec les médecins était déjà présente dans la NGAP, assurent les maïeuticiennes.
« On pourra coter comme les médecins des actes que nous pratiquons déjà, qui sont dans nos compétences, et auxquels nous sommes formées », assure Caroline Raquin, présidente de l’Organisation nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF). « Par exemple, une échographie de dépistage, notamment la deuxième, était moins cotée dans la NGAP que la même, faite par un médecin. Il y aura un alignement, qui va régulariser la situation des libérales, et ne changera rien à l’hôpital », illustre-t-elle.
Pas de pathologie hors prescription
Aucune situation pathologique ne sera suivie hors prescription des médecins, affirme Catherine Lewicki, membre de la CHAP pour l’Union nationale et syndicale des sages-femmes (UNSFF). « Si on détecte une situation pathologique dans nos actes de prévention, nous passons la main aux médecins », confirme la présidente Marie-Anne Poumaer.
Au niveau assurantiel, « tous les actes pratiqués par les sages-femmes sont sous leur responsabilité », poursuit Catherine Lewicki.
Quant à la surveillance en unité d’obstétrique d’un enfant en incubateur, « nous n’exerçons pas la néonatologie : on surveille des tensions, des pouls. Et cela ne changera rien, ce ne sont pas les libérales qui font cela », relativise Catherine Lewicki.
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