C’est l’aboutissement de trois ans de travaux commencés dans le cadre de la loi de juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé (OTSS). Publiés le 31 décembre au « Journal officiel », deux décrets gravent dans le marbre la réforme des autorisations en chirurgie.
Le premier concerne les conditions d'implantation des activités de soins de chirurgie, de chirurgie cardiaque et de neurochirurgie. Le deuxième porte sur les conditions techniques de fonctionnement de ces activités. D’autre part, dans un contexte de renforcement de la qualité et de la pertinence des soins, des seuils d’activité minimale sont fixés pour certaines activités. À noter que les procédures de dépôt de dossiers (création et renouvellement) devraient être simplifiées grâce à un dossier homogénéisé au niveau national.
La réforme vise une « amélioration de la qualité et de la sécurité des prises en charge, une meilleure adaptation à l’innovation en santé et une plus grande territorialisation de l’offre de soins », explique le Dr Matthieu Derancourt, médecin-conseil de la FHP-MCO. Elle doit également assurer l’émergence d’une logique de gradation de l’offre de soins qui reposera sur des fondements techniques médicaux.
La réforme met également fin au double régime d'autorisation qui dissociait chirurgie en hospitalisation complète et chirurgie ambulatoire. Il sera désormais possible de proposer uniquement une activité de prise en charge en chirurgie ambulatoire, à condition de conclure une convention avec un établissement réalisant une prise en charge chirurgicale en hospitalisation à temps complet.
Dérogations en chirurgie pédiatrique
Côté médecins, des dérogations sont prévues pour la chirurgie pédiatrique. Les titulaires de la modalité « chirurgie adultes » pourront désormais prendre en charge des enfants de moins de 15 ans dans certains domaines : chirurgie ophtalmologique, chirurgie ORL et cervicofaciale, chirurgie maxillo-faciale, stomatologie et orale, chirurgie plastique reconstructrice. À condition que le chirurgien et le médecin anesthésiste réanimateur disposent respectivement d’une formation initiale et d’une expérience en chirurgie et anesthésie pédiatrique. En cas d’urgence, ces mêmes titulaires pourront également prendre en charge des enfants de plus de trois ans, dans certains domaines (chirurgie viscérale et digestive, chirurgie orthopédique et traumatologique, chirurgie gynécologique et obstétrique, chirurgie urologique). Ils devront pour cela adhérer au dispositif spécifique régional de chirurgie pédiatrique.
Reste que ces règles et dérogations pourraient devenir problématiques à terme, notamment pour les circoncisions, met en garde le Dr Philippe Cuq, coprésident d'Avenir Spé-Le Bloc. Considérées comme non urgentes, celles-ci nécessiteront « une autorisation de chirurgie pédiatrique pour pratiquer une circoncision, dans un contexte où l’offre de soins en chirurgie pédiatrique est très réduite », déplore le chirurgien. En clair, le risque est une « inadéquation entre le nombre de chirurgiens pédiatres et l’activité chirurgicale pédiatrique qui est assurée en France par des chirurgiens adultes ». Les ARS devront prévoir « un nombre plus important d’implantations en chirurgie pédiatrique », lors des projets régionaux de santé, complète le Dr Derancourt. Si tel n’est pas le cas, « l’offre de soins risque de diminuer », poursuit-il.
Seuil d'activité pour la chirurgie bariatrique
La réforme aura aussi des conséquences sur la chirurgie bariatrique. Les médecins spécialisés en chirurgie viscérale et digestive devront désormais justifier d’une expérience dans la pratique d’actes de chirurgie bariatrique. Cela signifie que l’équipe médicale devra être composée, a minima, d’un chirurgien disposant d’une formation universitaire en chirurgie bariatrique et d’un praticien justifiant d’une expérience de la pratique en chirurgie bariatrique.
Le seuil d’activité est aussi modifié par la réforme. Chaque établissement devra désormais avoir une activité minimale de 50 par an pour bénéficier d’une autorisation en chirurgie bariatrique. Un certain nombre de sites « n’atteindront pas les 50, que cela soit dans le secteur public ou privé, donc cela va rebattre en partie les cartes », analyse le Dr Cuq. Un chirurgien viscéral qui fait 45 chirurgies bariatriques par an dans un établissement « n’aura pas d’autorisation si c’est le seul à le faire ».
*Onze pratiques spécifiques sont concernées : chirurgie maxillo-faciale, stomatologie et chirurgie orale ; chirurgie orthopédique et traumatologique ; chirurgie plastique reconstructrice ; chirurgie thoracique et cardiovasculaire à l’exception de la chirurgie cardiaque ; chirurgie vasculaire et endovasculaire ; chirurgie viscérale et digestive ; chirurgie gynécologique et obstétrique ; neurochirurgie se limitant aux lésions des nerfs périphériques et aux lésions de la colonne vertébrodiscale et intradurale, à l’exclusion de la moelle épinière ; chirurgie en ophtalmologie ; chirurgie ORL et cervicofaciale ; chirurgie urologique.
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