Au moment où le gouvernement lançait le volet santé du Conseil national de la refondation (CNR), France Assos Santé a dévoilé hier les résultats de son « enquête flash » sur la crise de l’hôpital. Cette étude par voie questionnaire et d'appel à témoignages réalisée en juin dernier confirme « l’extrême mise en tension des personnels soignants », « ses conséquences délétères sur la prise en charge des patients ». Il est à noter que sur les 655 réponses reçues par la fédération d'associations de patients agréées, une très grande majorité (415) émane de représentants des usagers, par définition davantage au fait des réalités hospitalières que la population générale.
Il demeure que 64 % des personnes interrogées déploraient, en juin, des fermetures de lits ou de services, notamment aux urgences. Ainsi, en Auvergne Rhône-Alpes, un représentant de France Rein rapporte la fermeture de 25 % des blocs « manque de paramédicaux ». Quant au service de radiologie de l’établissement, « il ne peut prendre tous les examens par manque de radiologues spécialisés », poursuit-il.
Les conséquences des déprogrammations
Ces difficultés d'accès aux soins se traduisent concrètement par des déprogrammations en particulier en chirurgie, un impact négatif sur les soins, des reports de consultations et rendez-vous et des délais d'attente, citent en premiers lieux les répondants du questionnaire. « Des patients programmés sont renvoyés chez eux sans nouvelle date d'intervention » regrette un représentant de l'Association des paralysés de France (APF). « Les patients ne peuvent obtenir une admission à l'hôpital psychiatrique qu'une fois qu'ils sont en pleine crise et ingérables » dénonce un représentant de l'Unafam.
Ces situations ont évidemment un impact psychologique sur les patients qui sont aussi confrontés à la problématique de difficultés d’accès aux soins ou l’éloignement des lieux de soins. À l’image de ces usagers du Centre-Val de Loire, transférés dans des établissements situés à 90 kilomètres, en raison de la fermeture de services de dialyse.
Mais des fermetures de services sont aussi parfois à l’origine de pertes de chances. En Occitanie, la fermeture d’un service d’urgences a allongé la distance à parcourir pour le patient. Résultat : « Le délai étant trop long cette personne est décédée », affirme un représentant de l’Union Départementale des Associations familiales (Udaf).
L’enquête dévoile aussi que les conditions d’accueil des personnes souffrant de problèmes psychiques et des personnes en situation de handicap, continueraient à se dégrader, tout comme l’accompagnement des personnes âgées. En Auvergne-Rhône-Alpes, un membre de la fédération Efappe épilepsies témoigne de la « fermeture de créneaux de bloc opératoire pour des soins dentaires pour les personnes en situation de handicap ».
Dégradation des relations soignants/soignés
Dans la même région, un membre de l' Association familiale catholique (AFC) évoque le parcours du combattant de sa fille de 11 ans. Après 18 jours « de vaines tentatives » de rendez-vous avec le pédopsychiatre de ville, la jeune patiente est prise en charge par le service de pédopsychiatrie d’un établissement qui… a fini par fermer en juillet. Les parents ont été « obligés de l’emmener consulter des thérapeutes à l’extérieur (psychologue et psychomotricien) ».
Enfin, la tension pesant sur les services a aussi des conséquences directes sur la relation soignant/soigné. Dans le Grand Est, un adhérent de « Vivre mieux le lymphœdème » observe que le temps de la première consultation est « raccourci » (cinq minutes accordées au patient). Quant au personnel, il est jugé « fatigué », « moins à l’écoute » et « n’a plus le temps d’informer les patients ».
À l'aune de cette enquête, France Assos Santé propose de garantir un suivi actif des patients subissant reports de diagnostic et déprogrammations. Parallèlement, « Actions patients » un collectif d'une trentaine d'associations de patients (Renaloo, Vaincre la mucoviscidose, Rose up, …) réunis depuis juin dernier, a lancé sa propre enquête sur « l'évolution de la qualité de la prise en charge, dans un contexte de fortes tensions du système de santé, à l'hôpital et en ville » sur les douze derniers mois. Celle-ci comprend deux volets : l'un destiné aux patients, l'autre aux soignants qui sont ouverts jusqu'à ce vendredi inclus.
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