C’EST DEVENU un rituel de saison pour les fédérations de l’hospitalisation publique ou privée. Comme chaque année, la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) proteste contre la nouvelle campagne tarifaire qui s’annonce, au motif que la survie de certaines cliniques est menacée par un « effet ciseaux » persistant. Cette fois encore, « les charges sont supérieures à l’évolution des tarifs », a expliqué son président Jean-Loup Durousset lors d’une conférence de presse, d’où des « tensions fortes sur les établissements » contraints, dans un tel contexte, de « rechercher la productivité depuis quatre ou cinq ans ». La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS 2009) prévoyait une hausse de 3,3 % des moyens accordés cette année à l’hospitalisation privée en MCO (médecine, chirurgie, obstétrique), soit une évolution de +3,5 % si l’on y ajoute l’enveloppe MIGAC (elle-même en augmentation de +4,6 % pour financer les Missions d’intérêt général et l’aide à la contractualisation). Or ce « bel effort de solidarité », selon Lamine Guarbi, président du syndicat FHP-MCO, se traduit finalement par une augmentation limitée à + 0,47 % en moyenne pour les cliniques privées à compter du 1er mars (« le Quotidien » du 19 février), avec une progression du volume d’activité estimée à +1,7 % par la DHOS. De son côté, la FHP prévoit a priori une hausse de « +4,05 % » des charges des établissements en 2009 : un chiffre prévisionnel qui semble toutefois surestimé, admet le délégué général de la FHP Philippe Burnel, du fait du probable « ralentissement de l’inflation en fin d’année ».
Inquiets et en colère
« Nous sommes non seulement inquiets, mais aussi en colère », a déclaré Lamine Gharbi. Si le refrain annuel de la FHP sur les tarifs des cliniques est connu, la situation au 1er mars 2009 sera inédite puisque le gouvernement va changer les règles de la tarification à l’activité (T2A) pour mieux les adapter à la situation des patients. La nouvelle règle du jeu détermine en effet les tarifs en fonction de l’Étude nationale des coûts (ENC) et de la nouvelle classification des groupes homogènes de malades (V11). Résultat : une appendicite pourra avoir 3 ou 4 tarifs différents en fonction du profil et de l’état du malade opéré, et le nombre total de tarifs passera de 800 à 2 200 au 1er mars. En outre, cette démultiplication tarifaire s’accompagnera d’autres changements et mécanismes redistributifs dans la T2A (intégration de dispositifs médicaux implantables ou DMI, rémunération de la surveillance continue, de la haute technicité, de la précarité…).
Au final, la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS au ministère de la Santé) a annoncé aux responsables de la FHP des variations de plus ou moins 5 % en moyenne du chiffre d’affaires des cliniques privées. « Combien d’établissements sont concernés ? Où ? On ne sait pas qui sera impacté ou bien on ne veut pas nous le dire ! », a fulminé le président du syndicat FHP-MCO. Et encore, a ajouté Lamine Gharbi, le bas de la fourchette devrait se situer plutôt à « - 10 % » en tenant compte des coefficients correcteurs applicables pendant trois ans. Par ailleurs, en attendant la diffusion de la circulaire ministérielle et la parution des tarifs au Journal Officiel, la FHP-MCO se demande comment les cliniques pourront facturer les séjours des patients pris en charge dès le 1er mars. De surcroît, « la campagne tarifaire n’est présentée que sur 2009 », regrette Jean-Loup Durousset, alors que la FHP aurait souhaité avoir de la « visibilité » sur la réforme en cours en prenant connaissance des tarifs cibles de 2013. Enfin, Lamine Gharbi déplore que les 100 millions d’euros promis par la DHOS aux établissements publics et privés, pour gommer les effets négatifs de la réforme tarifaire, dépendent des « arbitrages au niveau des ARH ».
Face à cette situation « intolérable », le président du syndicat FHP-MCO envisage d’ « engager des recours juridiques parce qu’on ne peut pas indéfiniment accepter que l’État nous traite de la sorte ». La FHP, qui a déjà obtenu du Conseil d’État l’annulation d’une baisse tarifaire appliquée aux cliniques MCO en 2006, prendra sa décision sur ces recours après avoir soigneusement examiné l’ensemble des nouveaux tarifs.
Au-delà des modalités de la campagne tarifaire 2009, la FHP ne cache pas son désenchantement face à l’évolution de la T2A, considérée au départ comme très prometteuse pour la convergence tarifaire entre établissements des secteurs public et privé. Compte tenu de la double échelle publique/privée des nouveaux tarifs, cette convergence « n’est qu’un artifice », selon le président de la fédération. Et le grossissement progressif de l’enveloppe MIGAC l’incite à penser que l’on est « en train de recréer les dotations globales » au détriment de la T2A. Jean-Loup Durousset s’attend en tout cas à des « restructurations massives » dans les cliniques dans les « quatre ou cinq prochaines années ».
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