LE QUOTIDIEN – L’AP-HP aurait 44 % de médecins de plus que les autres hôpitaux. Êtes-vous trop nombreux ?
Pr PIERRE CORIAT – Je ne suis pas certain que le sureffectif médical soit de cet ordre. Pour établir des comparaisons, il faut parler en équivalents temps plein. L’AP-HP se caractérise par son nombre élevé de vacataires et de médecins à temps partiel. Ajoutons que l’AP-HP réalise plus de 50 % des publications scientifiques nationales, ce qui prend du temps.
Faible productivité, absence de pilotage : partagez-vous le diagnostic concernant les blocs opératoires, étant vous-même anesthésiste-réanimateur ?
L’actuelle CME a mis en place un système de gestion informatique des blocs qui en permet le pilotage et une gestion de qualité. L’AP-HP est dans les clous concernant le taux d’occupation des blocs fixé par la DHOS [au minsitère de la Santé, NDLR]. Reste à faire un effort important pour regrouper les blocs, trop cloisonnés. Je ne sais pas combien il faut fermer de blocs. Mais je suis certain que cette restructuration est une absolue nécessité.
Les surprescriptions en biologie sont également dans le collimateur du rapport. Les médecins ont-ils la main trop lourde ?
L’AP-HP a une activité de recours et de proximité : c’est difficile de codifier la prescription quand coexistent dans le même service des maladies rares et des maladies communes. Mais il est vrai que l’AP-HP souffre d’une sous-informatisation de la biologie. Le futur plan stratégique va réorganiser la biologie en regroupant les plateaux techniques, et en supprimant plus de 20 % des lignes de gardes.
D’une façon générale, diriez-vous que l’AP-HP se porte bien ? L’ambiance ne s’est-elle pas dégradée depuis le début de l’année ?
Il y a un manque d’efficience, c’est certain, qui contribue à un certain gâchis à l’AP-HP, et il faut y remédier. Les médecins travaillent à un nouveau projet depuis trois ans afin de regrouper dans des bâtiments rénovés les équipes dispersées : ce doit être le cas pour la biologie, les blocs, les plateaux d’imagerie. Ce projet stratégique a pour but d’adapter l’AP-HP à la médecine moderne. Plusieurs freins se dressent, comme la division de l’AP-HP en 37 hôpitaux, le poids de l’histoire.
La Chambre régionale des comptes reproche vertement aux médecins de l’AP-HP de défendre leur pré carré.
C’est là un frein anecdotique. Le frein principal, à mes yeux, c’est la mauvaise méthode qui a consisté à annoncer des suppressions d’emplois alors même que la communauté médicale commençait à s’impliquer dans une démarche d’efficience et de restructurations. Les pouvoirs publics, en imposant ces suppressions de postes, ont cassé une dynamique vertueuse. Et un lien de confiance.
La semaine dernière, vous avez lancé un appel à la communauté hospitalière pour soutenir les restructurations. L’année dernière, après l’annonce de possibles suppressions de postes, vous avez menacé de démissionner de votre poste de président de CME. N’est-ce pas contradictoire ?
Non. Je mets toujours mon poste de président de la CME dans la balance, si on supprime des emplois soignants.
La communauté médicale de l’AP-HP apparaît divisée, et la direction générale chahutée.
Les médecins sont unis. Unis derrière la CME, unis derrière le plan stratégique. L’ensemble des projets validés par le conseil exécutif est médicalement pertinent, il n’y a pas lieu de s’y opposer. La CME votera le plan stratégique en juin. Je n’ai aucun problème avec la direction générale, j’ai toujours confiance en elle. Je fais ce plan stratégique car il est indispensable pour l’avenir de l’institution. Sinon, nous ne pourrons pas être au rendez-vous du premier CHU d’Europe.
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