La veille de la déclaration de politique générale de Gabriel Attal, prévue mardi 30 janvier, les fédérations hospitalières se sont rappelées au bon souvenir du Premier ministre.
Dans un contexte politique incertain pour cause de remaniement incomplet et la campagne tarifaire des établissements de santé approchant, la Fédération hospitalière de France (FHF) a adressé une liste de doléances à l’exécutif pas piqué des hannetons.
Une nouvelle fois, le président de la FHF Arnaud Robinet a souligné « l’urgence à agir et à soutenir dans la durée le service public hospitalier sur le plan budgétaire ».
Le déficit des hôpitaux est passé de 500 millions d’euros en 2022 à un milliard d’euros en 2023. Il pourrait encore « exploser » d’un à deux milliards d’euros supplémentaires si rien n’est fait, alerte la fédération.
Spirale de l’endettement
Pour contrer la spirale de l’endettement, l’organisation attend du gouvernement trois mesures budgétaires fortes. Tout d’abord, la FHF réclame la restitution intégrale des 700 millions d’euros de sous-exécution des dépenses créditées dans le budget de la Sécu (dans l’Ondam hospitalier). Ensuite, elle souhaite obtenir un moyen de couvrir les coûts de l’inflation à hauteur d’1,5 milliard d’euros (dont un milliard d’euros pour l’hôpital public) supplémentaires. Arnaud Robinet insiste : il s’agit bien d’une enveloppe complémentaire. Pas question de financer l’inflation par l’Ondam. Une chose est sûre : deux milliards d’euros ne seront pas de trop pour sortir les hôpitaux de la nasse.
Mais ce n’est pas tout. Pour pallier la baisse d’activité en hospitalisation complète (-8 % par rapport à 2019), la fédération espère une hausse des tarifs adéquats. Certes, l’activité hospitalière au global a augmenté de 2 % en 2023 (par rapport à 2022), le nombre de séjours en médecine chirurgie et obstétrique (MCO) de 4 % sur la même période et l’activité en ambulatoire a connu un bon de 18 %. Mais, insiste la fédération, tout cela ne compense pas l’intégralité des prises en charge, toute l’activité MCO n’étant pas transférable en ambulatoire.
La FHF analyse également sa situation financière à l’aune d’une baisse du taux de recours en raison de la baisse du capacitaire, des tensions sur les effectifs, d’une évolution des comportements et des modes de prise en charge.
Alors que l’augmentation tarifaire attendue pour 2024 risque d’être mécaniquement moins élevée que l’Ondam (+3,2 % sur la même année), la Fédération espère que les pouvoirs publics se montreront malgré tout cléments et qu’ils s’inscriront dans une logique de « régulation prix-volume la plus réaliste possible » pour éviter les phénomènes de sous-exécution des dépenses, a insisté Cécile Chevance, responsable du pôle « offres » de la FHF.
Quatre cliniques sur dix en déficit
Le secteur privé rejoint le public dans ses revendications. La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) attend « un signe fort du Premier ministre Gabriel Attal à la veille de son discours de politique générale ». Les cliniques privées à but lucratif sont en déficit en 2023 pour 40 % d’entre elles, pour les mêmes raisons, à savoir le non-rattrapage des surcoûts dus à l’inflation, sous évaluée par l’Ondam. Conséquence : la FHP craint qu’une clinique sur deux ne sombre dans le rouge cette année « en l’absence de compensation financière à la hauteur des enjeux ».
Comme la FHF, la FHP réclame une reprise de 669 millions d’euros non « dépensés » de l’Ondam. « Ce financement devra trouver son corollaire dans le financement 2024, au risque de fragiliser sur le long terme l’offre hospitalière », insiste l’organisation présidée par Lamine Gharbi.
Autre demande récurrente : « le rétablissement de l’équité entre les secteurs publics et privés ». La fédération privée souhaiterait la transposition des revalorisations salariales et des sujétions de nuit et de week-end accordées au public aux paramédicaux du privé.
Dernier point, à l’unisson de l’hôpital public : obtenir « une campagne tarifaire protectrice […] qui donne aux acteurs les moyens de répondre aux besoins des patients sur les territoires ».
Avec un déficit triplé en un an, les CHU dans le rouge (vif)
Les conférences hospitalo-universitaires (directeurs généraux, doyens et présidents de commission médicale d’établissement) alertent le gouvernement sur la situation financière « catastrophique » des 32 CHU du pays, qui affichent un déficit cumulé de 1,2 milliard d’euros fin 2023. C’est trois fois plus qu’en 2022 (402 millions d’euros). « La capacité d’autofinancement et par conséquent d’investissement a chuté de 86 % », déplorent les conférences. DG, doyens et médecins estiment que la dégradation des comptes des CHU résulte de facteurs externes sur lesquels les hôpitaux n’ont pas de prise : « explosion » des dépenses liée à l’inflation ; financement incomplet du Ségur de la santé ; baisse des recettes due aux fermetures de lits post-Covid. Le secteur réclame aux pouvoirs publics d’agir en conséquence par une compensation de l’inflation et par la restitution de 800 millions d’euros de dépenses (Ondam hospitalier) non réalisées en 2023 mais votées dans le budget de la Sécu.
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