La première réponse aux blouses blanches n'a pas tardé, signe de l'inquiétude extrême qui règne aujourd'hui à l'Élysée.
Alors même que les soignants en colère – médecins et paramédicaux – défilaient par milliers à Paris (10 000 selon les organisateurs) mais aussi par centaines à Lille, Lyon, Toulouse, Bordeaux, Marseille, réussissant leur démonstration de force, Emmanuel Macron s'est exprimé en direct à 16H15, pendant 20 minutes, à la faveur d'un déplacement à Épernay sur le suivi des réformes territoriales.
Il a promis un « plan conséquent, des décisions fortes », un « investissement plus massif » (que ce qui était envisagé) pour l'hôpital public qui sera détaillé mercredi prochain par Édouard Philippe, après le conseil des ministres (montant, ampleur, modalités, calendrier). « L'hôpital est l'armature, le socle du système de santé, a lancé le chef de l'État. Si l'hôpital public ne fonctionne plus, le système de santé ne peut plus fonctionner. Nous nous devons de réagir ».
Le coup de l'héritage
Quittant souvent ses notes, Emmanuel Macron a construit son intervention en trois temps.
Il a d'abord invoqué à plusieurs reprises « l'héritage » d'une situation qui a conduit à la « raréfaction » des professionnels dans de nombreux secteurs, à un hôpital « qui ne parvient plus à recruter », « devenu le lieu de toutes les difficultés », victime de « sous-investissement année après année », et à des soignants « épuisés », « qui se sont éloignés de leur métier ». L'hôpital a « perdu en attractivité », a-t-il concédé à plusieurs reprises, en écho aux nombreux messages d'alerte du secteur en ce sens. « Nous ne découvrons pas tout ça », a-t-il plaidé alors que sa ministre de la Santé Agnès Buzyn a déjà annoncé deux « plans » en quatre mois (70 millions d'euros mi-juin pour les paramédicaux, et 750 millions d'euros en septembre sur trois ans dans le cadre du pacte de refondation des urgences), sans calmer la grogne des soignants hospitaliers. Au passage, il a épinglé la T2A « qui a fait beaucoup de mal »...
Dans un deuxième temps, le président de la République s'est employé à défendre les réformes santé engagées, sans jamais renier son cap. Il a égrené la hausse des tarifs hospitaliers, « pour la première fois depuis 10 ans », la fin du numerus clausus, la montée en charge de nouveaux métiers ou les délégations de tâches (aux infirmières, aux pharmaciens) qui libèrent du temps médical. « Toutes ces mesures vont dans le bon sens », a-t-il argué en reconnaissant pour la première fois que la réforme Ma Santé 2022 « ne va pas assez vite », une petite pierre dans le jardin d'Agnès Buzyn.
Attractivité et gouvernance
C'est pourquoi – troisième temps du discours – le premier ministre annoncera mercredi ce nouveau « plan d'urgence », « une action renforcée » qui s'apparente à une réforme systémique pour l'hôpital public.
De fait, Emmanuel Macron a promis à la fois davantage de moyens pour « investir » dans l'outil de travail et les équipements et une amélioration de « certaines rémunérations », deux leviers censés permettre de « restaurer l'attractivité des carrières » et donc de recruter. Ce n'est pas tout. Au menu du plan à venir, Emmanuel Macron promet de donner « une visibilité pluriannuelle » aux établissements jusqu'à la fin du quinquennat et de « revoir la gouvernance » à l'heure où les médecins réclament une re-médicalisation du pilotage de l'hôpital. « Il faut mieux associer ceux qui soignent aux décisions », a-t-il suggéré, évoquant aussi la meilleure « articulation entre médical et paramédical ».
« J'ai entendu la colère, j'écoute les collectifs, les syndicats », assuré le chef de l'État. C'est maintenant à Matignon de décliner la nouvelle feuille de route.
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