Au regard des besoins de santé de la population francilienne, les protocoles sont déployés dans plusieurs spécialités médicales et établissements du CHU à des fins diverses. À ce jour, 107 équipes (incluant 506 médecins délégants et 417 paramédicaux délégués) sont engagées dans des projets novateurs. La mise en place de ces protocoles ouvre droit à une prime de 100 euros brut par mois pour les paramédicaux impliqués.
Mis en place à l’hôpital Bicêtre depuis juillet 2023, l’un d’entre eux permet ainsi aux infirmières de réaliser des consultations de suivi des personnes séronégatives à haut risque d’acquisition du VIH et sous traitement de prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIH.
Autre exemple à l’hôpital Paul Brousse : une consultation infirmière de suivi des receveurs de foie, de foie-rein et des donneurs vivants avant et après la transplantation, par un infirmier coordinateur de transplantation en alternance avec le médecin.
Gain de temps
A Saint-Antoine cette fois, l’AP-HP a autorisé la réalisation d’électrocardiogramme (ECG) par l’aide-soignante, sur prescription médicale, en lieu et place de l’infirmière et sous sa responsabilité, pour des patients majeurs et conscients pris en charge aux urgences. Ce protocole permet « d’accélérer la pose de diagnostic car les soignants peuvent faire l’ECG très en amont de la prise en charge médicale, sous le contrôle de l’infirmière », explique au Quotidien Nsuni Met, cheffe de projet « protocoles de coopération et pratiques avancées » à l’AP-HP. Autre conséquence non négligeable : un gain de temps salvateur pour les infirmières « surchargées », poursuit l’infirmière.
Les médecins peuvent se centrer sur les activités où leur plus-value est la plus grande
Les aides-soignantes endossent pour leur part de nouvelles responsabilités, « ce qui permet de valoriser des compétences et de fidéliser le personnel », élément capital pour l’AP-HP, poursuit Nsuni Met.
Un avis confirmé par le CHU, qui fait de ces protocoles un levier fort d’attractivité, non seulement du côté des paramédicaux, mais aussi du côté des médecins, qui peuvent alors « se centrer sur les activités où leur plus-value est la plus grande », se réjouit l’établissement.
S’adapter aux mutations du système de santé
Directrice du département « ville-hôpital et nouvelles organisations » de l’AP-HP et endocrinologue à Lariboisière-Fernand-Widal, la Dr Sophie de Chambine estime que les protocoles permettent dans certains cas aux médecins de « se concentrer sur les patients les plus graves et les situations les plus complexes ».
Les soins aux patients peuvent aussi gagner en efficacité. C’est le cas du suivi de certains malades traités par anticancéreux oraux à domicile (Saint-Antoine est à nouveau promoteur), qui a changé la donne. Jusqu’à présent, les patients recevaient une chimiothérapie intraveineuse en hôpital de jour. Aujourd’hui, le suivi est organisé à leur domicile avec l’appui d’un infirmier délégué. « Cela permet de mieux stabiliser les patients lorsqu’ils sont à l’extérieur et d’identifier précocement les éventuels effets indésirables », se réjouit la Dr Sophie de Chambine.
Plus qu’un simple outil de collaboration entre soignants, les protocoles de coopération locaux sont aussi précieux car pensés pour s’adapter aux mutations du système de santé, juge-t-elle. « L’hôpital est confronté à une évolution épidémiologique (maladies chroniques, vieillissement de la population, polypathologies, etc.) et à une évolution des modes de prise en charge (virage ambulatoire, télémédecine, etc.). Ces protocoles nous permettent de nous adapter, de réorganiser notre offre de soins, de modifier les parcours patients ».
Cadre sécurisé
Au sein d’un univers hospitalier parfois présenté comme très rigide, les protocoles permettent de donner davantage de souplesse aux organisations internes mais « pas non plus n’importe comment », souligne encore la Dr de Chambine qui préfère parler « d’innovations organisationnelles cadrées et sécurisées ». Ces protocoles nécessitent un temps d’instruction long, de six à sept mois en moyenne avant autorisation. Rien n’est possible sans un double avis de la commission médicale d’établissement et de la commission des soins infirmiers avant que le directeur général de l’AP-HP, Nicolas Revel, appose son sceau.
Pour espérer voir le jour, un protocole doit également répondre à deux conditions : « les activités doivent être de nature dérogatoire et répondre à un besoin de santé », résume Nsuni Met. Jusqu’ici, tout va bien, se réjouit l’infirmière. Remontés annuellement au ministère ou à l’ARS Île-de-France, les indicateurs de satisfaction des patients « sont bons à 99 % ».
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