Chargé d'avertir chaque année les parlementaires et le gouvernement en cas d'écart entre les dépenses réelles et l'objectif voté dans la loi de financement de la Sécurité sociale, le comité d’alerte estime que le déficit des hôpitaux publics explose. Dans son avis publié le lundi 15 avril, il craint aussi un dérapage des dépenses de santé en 2024, au regard d'économies prévues mais difficiles à réaliser.
Dans le budget prévisionnel pour 2024, les pouvoirs publics ont alloué 254,7 milliards d'euros aux dépenses d’Assurance-maladie (Ondam), soit une progression de 3,2 % (hors Covid-19). Mais ce montant inférieur à ce qu'il serait si l'on prenait en compte la hausse « naturelle » des dépenses, estimée à 4,6 % – implique que soient réalisés 3,5 milliards d'euros d'économies. Parmi les mesures prévues figurent le doublement des franchises médicales (reste à charge des assurés) sur les médicaments ou actes paramédicaux, entrés en vigueur en avril, et celui des participations forfaitaires chez le médecin, prévu pour juin. Le calendrier tardif limite la portée des économies, qui ne seront que « partiellement réalisées », prévient le comité.
Les experts soulignent aussi les « incertitudes » qui planent sur « le calendrier ou le montant » d'autres mesures prévues, notamment « les économies d'efficience attendues » à l'hôpital public (600 millions d'euros). « La dynamique spontanée des dépenses de soins de ville et des charges des établissements » crée aussi « un risque » de dérapage, jugent-ils.
Un milliard d’euros de déficit
Le déficit des hôpitaux publics « s’élargit » et constitue une « préoccupation majeure », alertent-ils. Pas encore définitivement arrêté, il pourrait « quasiment doubler » par rapport à 2022, où il atteignait 1 milliard d'euros, « malgré la hausse des dotations ». « Le déficit total ne sera définitivement connu qu’à l’été, ce qui constitue un délai manifestement excessif », critique le comité, pointant du doigt notamment des versements de dotations tardives, la dernière rallonge ayant été accordée « bien après » la fin d'année civile.
Les membres du comité relèvent la « surestimation récurrente du niveau d'activité » des établissements publics : sur les neuf premiers mois de 2023, le volume économique de l'activité reste « inférieur de 2,6 % » à 2019, avant la pandémie, tandis qu'il le « dépasse de 3,1 % » dans le secteur privé, notent-ils.
Les experts appellent les pouvoirs publics à agir sur les causes par « une analyse précise des raisons » de cette « sous-activité récurrente ». Ils appellent enfin à mettre en œuvre des mesures correctrices, « qui ne sauraient être principalement de soutien financier ».
« Soigner moins pour gagner plus » : nouveau coup de griffe de la FHP
L’avis du comité d’alerte fait les affaires de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), passablement agacée par la différence de traitement entre les cliniques et les hôpitaux publics dans la campagne tarifaire pour 2024. « Plus de deux milliards d’euros ont été accordés aux hôpitaux publics en 2023 pour ne pas travailler », dénonce Lamine Gharbi le mercredi 17 avril. Dit autrement, cela revient à « soigner moins pour gagner plus ». Le président de la FHP juge cet avis « limpide, car il souligne en creux tous les dysfonctionnements » que les cliniques ne cessent de dénoncer : « Des colmatages à coups de dotations, sans aucune vision ni mesures fermes pour enrayer les dérapages budgétaires à l’hôpital public. » Les cliniques s’agacent que dans le même temps, des « tarifs catastrophiques » leur soient alloués « en récompense de [leurs] efforts et de l’engagement des professionnels de santé du privé ».
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