L’accès au plein exercice professionnel réclamé en France par des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes dont le diplôme n’est pas français reste, depuis des années, un casse-tête non résolu et un parcours du combattant pour les praticiens concernés.
Dans un contexte de multiples « retards et couacs » liés à la nouvelle procédure d’autorisation d’exercice des praticiens à diplôme hors UE (Padhue), un rapport inter-académique (académies nationales de médecine, de chirurgie dentaire et de pharmacie) livre une série de recommandations – dont la fermeture définitive de la liste de régularisation transitoire actuelle et des mesures plus lisibles d'accès au plein exercice.
À l'heure où les dossiers de demandes d'autorisation affluent, le rapport salue du moins le report de la date limite (du 31 décembre 2022 au 30 avril 2023) de passage des Padhue en commission nationale d’autorisation d’exercice (CNAE). Les sages soulignent que l'objectif louable était de « traiter rapidement les dossiers en souffrance en augmentant le nombre de jurys d'examen, en préparant leur travail pour le faciliter et en limitant le nombre d'examinateurs, ne retenant que des praticiens de la spécialité revendiquée ».
Supprimer l'étape régionale
Pour aller plus loin dans la clarification, le rapport propose d'abord de « supprimer l'étape régionale » de la procédure d'évaluation, source de complexité, pour « ne conserver que l'étape de la commission nationale », ce qui est déjà le cas pour les chirurgiens-dentistes et les pharmaciens. Pour rappel, la procédure de régularisation comprend successivement un avis d'une commission régionale, suivi d'une décision nationale. Mais les auteurs du rapport constatent une « hétérogénéité » entre l'avis et la décision qui provoque une « complexité inutile ».
Au-delà, les sages militent pour la « fermeture définitive » de la liste de régularisation transitoire actuelle (ex-liste « C », dite dérogatoire) pour obtenir le plein exercice. Cette voie ouverte par la loi de 2019 est destinée à régulariser les professionnels venus en France sans autorisation, mais ayant exercé pendant plusieurs années dans le pays. En revanche, pour le concours (liste A, pour les professionnels ayant obtenu un diplôme dans leur pays) et l’examen (liste B, pour les candidats réfugiés ou apatrides, bénéficiaires de l’asile territorial), les modalités actuelles sont jugées « satisfaisantes ».
Concours demandé
Pourquoi fermer la liste de régularisation ? Ouverte, donc, par la loi de 2019, cette voie permet de se présenter à une procédure « ultime et spécifique » de régularisation qui supprime les épreuves écrites, rappelle le rapport. Une procédure complexe et aléatoire : les dossiers sont adressés à l’agence régionale de santé (ARS) qui les présente à la commission régionale d’autorisation d’exercice (CRAE) par spécialité. Puis, l’ARS envoie les dossiers au Centre national de gestion (CNG) avec un avis qui peut nécessiter un parcours et/ou une formation complémentaire. Le nombre de dossiers déposés a conduit à une saturation : environ 4 400 dossiers au 31 octobre 2021, pour 3 500 retenus in fine. Un grand nombre de cas n’ont pu être traités dans les délais impartis.
Surtout, l'analyse des 900 premiers dossiers a montré « une hétérogénéité importante des appréciations entre le régional et le national » (seul le national est décisif). Un grand nombre de dossiers ont été écartés, certains rejets étant jugés illégitimes. Le rapport propose une reconversion aux « échoués », soit en établissement de santé (DIM, hygiène hospitalière, ingénierie hospitalière, etc.) ou en dehors du secteur santé.
Pour consolider la procédure, les « sages » défendent l’obligation pour tous les praticiens ayant obtenu un diplôme hors UE de passer le concours de la liste « A », « avec un exercice ultérieur pratique obligatoire tenant compte de la spécialité revendiquée », y compris certaines disciplines de la biologie médicale. Selon eux, la sélectivité de ce concours est « intéressante » car elle fournit de « bons candidats ». Le rapport suggère donc d’y augmenter le nombre de postes ouverts.
Langue française et authenticité des diplômes !
Enfin, toujours pour homogénéiser la procédure tout en gardant un haut niveau de sélection, les trois Académies plaident pour la maîtrise obligatoire d'un « haut niveau de pratique de la langue française », en particulier quand « l'exercice inclut un contact avec les patients ». Quant à l’authenticité des diplômes, « parfois douteuse », elle devra être « étroitement vérifiée lors de la réception des dossiers par l'autorité compétente ».
Et pour mieux identifier les besoins nationaux dans chaque métier, le rapport propose de cibler « par région, les spécialités manquantes ou peu couvertes et leurs localisations par territoire en rassemblant les exercices publics et privé ».
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