« S’intéresser au patient de manière globale figure dans notre ADN, explique le Dr Jean-Baptiste Méric, oncologue et directeur médical du centre hospitalier de Bligny (privé non lucratif), dans l’Essonne. Nous avons intégré très tôt les aidants dans l’information et le parcours de soins de leur proche malade et nous leur proposons désormais des actions dédiées pour répondre à leur besoin de soutien. Le suivi d’une maladie chronique peut malheureusement conduire à une forme d’invisibilité de l’aidant. Mais comment imaginer accompagner un patient pendant des années et assister, sans réagir, à la dégradation de la santé de la personne assise sur le siège d’à côté ? En tant que médecin, ce n’est pas concevable. Par ailleurs, le bien-être de l’aidant est souvent un critère de maintien à domicile et de qualité de vie de la personne malade ».
Groupes de parole
Depuis le début de l’année, le CH organise chaque mois des groupes de parole, en partenariat avec le centre local d'information et de coordination gérontologique NOA (Nord-Ouest Autonomie) et la Mutualité sociale agricole. Encadrés par une psychologue, ces échanges s’adressent à toutes les personnes accompagnant au quotidien un proche, souffrant d’une maladie et/ou d’une perte d’autonomie.
Sept séances de deux heures ont déjà été planifiées dans l’enceinte de l’établissement. « Le soutien psychologique aux aidants a été mis en place à Bligny dès le début des années 2000 en conformité avec le panier de soins de supports de l’Institut national du cancer. Au fil des ans, le travail avec nos partenaires – comme l’association Jade ou les professionnels des dispositifs d’aide à la coordination – a abouti à la création début 2024 d’un groupe de parole pour les proches de patients relevant d’autres services que l’oncologie et, depuis septembre dernier, à une offre de massages assis », poursuit le directeur médical.
Nombreux sont les aidants qui renoncent à leur propre suivi médical
Dr Jean-Baptiste Méric
Les séances de massage assis – assurées trois jours par semaine par une professionnelle diplômée – permettent aux aidants d’exprimer leurs questions, leurs angoisses parfois, durant les temps de traitements prodigués aux patients en hôpital de jour. « Les prises en charge ambulatoires réduisent le temps passé à l’hôpital et donc les opportunités de contact entre les équipes hospitalières et les proches de personnes malades », note le Dr Jean-Baptiste Méric.
Le massage assis, peu intrusif et qui peut être d’une durée courte, a pour objectif de créer des liens privilégiés facilitant l’expression des aidants. « Les inquiétudes qui reviennent le plus souvent concernent leur capacité à continuer à se soigner eux-mêmes – car nombreux sont ceux qui renoncent à leur propre suivi médical – et l’abandon progressif de leur vie sociale. Au-delà du moment de relaxation, les intervenants conseillent et orientent. Ils peuvent par exemple présenter l’hôpital de jour en soins palliatifs qui accueille les patients pour des problématiques somatiques mais aussi pour offrir du répit à leurs proches », témoigne le médecin qui insiste sur l’importance « de décorréler les soins de support et de bien-être de la prise en charge médicale elle-même ».
Stress « difficile à gérer »
Inscrite pour une séance de massage assis le 3 octobre, Françoise Ducote, 67 ans, salue « la bienveillance et la gentillesse » des équipes du CH de Bligny. Sa mère est soignée en hôpital de jour dans le service oncologie. « Elle habite chez nous depuis 2019, une décision que nous avons prise conjointement suite à un accident domestique. Son cancer a été diagnostiqué en mars dernier et sans surprise, je vis des périodes de stress parfois difficiles à gérer. Les aidants ont plus que besoin de souffler. La relation avec le conjoint n’est plus la même. J’ai aussi des petits soucis de santé et surtout une plus grande fatigabilité. Or, je ne peux pas flancher car ma mission première est de m’occuper d’elle. J’ai souhaité bénéficier de ce massage pour me détendre mais aussi pour recevoir une écoute attentive. La manière dont les soignants se comportent avec nous permet d’adoucir considérablement la maladie », exprime-t-elle.
Cette aidante apprécie d’autant plus l’initiative que s’accorder des temps de répit est quasiment impossible. « Prendre quelques jours de vacances est très compliqué car certains Ehpad n’acceptent pas d’accueillir ma mère pendant une ou deux semaines, d’autres refusent que son petit chien l’accompagne, explique-t-elle. Et beaucoup manquent malheureusement de personnel… ».
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