DE NOTRE CORRESPONDANTE
C’EST À L’ÉPOQUE où l’aliénisme est une discipline naissante que Joseph Arthaud (1813-1883), issu d’une famille catholique lyonnaise, va consacrer sa thèse de médecine à l’anatomopathologie de l’aliénation mentale. Élève de l’abbé Noirot, compagnon du catholique social Frédéric Ozanam, il milite également à la société St-Vincent-de-Paul et à la Propagation de la foi.
Joseph Arthaud souhaite, en effet, concilier science et foi dans son approche de l’aliénation : dualiste comme Descartes, c’est un « cérébriste » qui allie la monomanie d’Esquirol et le libre-arbitre chrétien. Devenu médecin-chef du quartier des aliénés à l’hospice de l’Antiquaille à Lyon, il ouvre l’asile du Vinatier en 1877 et, cette même année, sera nommé professeur de psychiatrie à la faculté de médecine de Lyon. Comme le souligne le Dr Frédéric Scheider dans son ouvrage « Arthaud de Lyon, aliéniste missionnaire »*, la carrière de Joseph Arthaud va suivre le grand élan catholique consécutif, à Lyon, au siège de 1793, puis son déclin, alors qu’Arthaud deviendra lui-même le bouc émissaire des Républicains lors du mouvement anticlérical des années 1870 qui accompagne la laïcisation des hôpitaux.
À la marge
Au-delà de cette histoire singulière, l’exploration du parcours de Joseph Arthaud donne aussi à voir l’émergence des « marginaux sécants » de la médecine, qui, tout en étant au sein de la médecine restent à sa marge et développent des intérêts pour des disciplines extramédicales, comme la théologie, la sociologie, l’histoire… « Arthaud, aliéniste missionnaire » était d’ailleurs le sujet de la thèse de doctorat d’Histoire religieuse, politique et culturelle, soutenue le 12 janvier 2006 par le Dr Scheider à l’université Lyon-3. Depuis, ce médecin est parti en Guadeloupe, où il anime une équipe mobile de psychiatrie et il a, par ailleurs, rempli plusieurs missions en Haïti. Scheider, « aliéniste et missionnaire », reviendra donc à Lyon pour débattre d’un sujet d’histoire qui n’a rien perdu de son actualité, et ce au sein même d’un hôpital qui a inauguré il y a peu la première unité hospitalière spécialement aménagée (USHA) pour détenus en France, et n’a pas fini de se débattre avec ses propres antagonismes.
* Éditions Glyphe, 2009, 420 pages, 26 euros.
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