C’est la goutte d'eau qui fait déborder le vase pour le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (Snphare). Celui-ci fait référence à « la dernière goutte d'isoprénaline », médicament utilisé pour « des urgences vitales très particulières », dont la commercialisation a été arrêtée le 4 novembre par le laboratoire Pfizer. À la suite de cette « énième » rupture de stock, le syndicat demande à François Braun l’ouverture d’une « mission d'enquête » sur l'accès aux produits de santé : médicaments d'urgence, traitements chroniques, dispositifs et matériels médicaux.
Les conséquences de ces ruptures sont néfastes pour les pharmaciens comme pour les médecins qui doivent « jongler au jour le jour avec les pénuries en adaptant les ordonnances en permanence », s'exaspère le Snphare. Conséquence : du stress et du « temps gâché et perdu, au détriment d'autres activités pharmaceutiques et cliniques d'intérêt pour les patients », souligne le syndicat.
Colère des urgentistes
Dernière affaire en date, donc : le Snphare reproche à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) d’avoir annoncé « très tardivement » (le 25 octobre) l'arrêt de la commercialisation de l'Isuprel (isoprénaline). À l’époque, aucune alternative n’était identifiée, ce qui a provoqué l'ire des urgentistes craignant « l'impasse thérapeutique en situation d'urgence cardiologique », expliquait « Le Quotidien du pharmacien ». Finalement, Pfizer a informé le 4 novembre les professionnels de la disponibilité d'une spécialité similaire. Mais cette solution de remplacement est soumise à des « consignes de contingentement digne de la première vague Covid, où l'afflux de victimes mettait en tension l'approvisionnement en médicaments d'urgence », déplore le Snphare.
Dans une lettre aux professionnels le 15 novembre, le Centre spécialités pharmaceutiques (CSP) évoque en effet des mesures de « contingentement quantitatif à la commande » pour l’isoprénaline chlorhydrate Tillomed. Objectif : « sécuriser les stocks » disponibles et « répondre aux besoins les plus urgents » dans le contexte d’arrêt de la commercialisation de l'Isuprel.
Perte de chance
Contacté par « Le Quotidien » à ce sujet, le Dr Éric Le Bihan, président du Snphare, estime qu’il n’y a « aucune garantie que les volumes et les délais de livraison soient adéquats ». L’anesthésiste-réanimateur à Beaujon (AP-HP) déplore que l’ASNM se soit contentée de « donner les coordonnées du distributeur (Movianto, NDLR) ». Cela signifie que les établissements doivent « se débrouiller pour changer de source d’approvisionnement, réussir à joindre Movianto pour obtenir des doses ». En cas de pénurie, il considère que cela pourrait aller « jusqu’à des pertes de chances, voire des décès pour certains patients ».
Ce risque de pénurie intervient au moment où l’amoxicilline fait l’objet de « très fortes tensions d’approvisionnement en France », a expliqué vendredi l’ANSM. L'agence précisait qu’un contingentement a été mis en place auprès des pharmacies de ville et dans les établissements de santé « pour gérer au mieux les stocks disponibles ».
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