Un choc, alors que je m’interroge sur l’affaire Naomi Musenga très médiatisée et que je retrouve aisément l’enregistrement de la bande son du SAMU accessible à tous. Le changement de ton et d’attitude de l’opératrice dès les premiers mots de Naomi n’ont qu’une origine pour moi : le préjugé raciste !
Préjugés trop de fois rencontrés lors de mes stages hospitaliers, notamment aux urgences médicales et surtout pédiatriques. Préjugés tout azimuts , moqueries ouvertes de membres du personnel soignant autour de moi alors que j’accueille des familles africaines, musulmanes, des gens du voyage ou défavorisés mais aussi psychotiques. Moqueries ouvertes épouvantables, alors que, jeune externe des urgences de Hautepierre, je soigne un prostitué transgenre victime d’aggressions etc.
Ces attitudes sont rarement critiquées par les témoins et l’auteur(s) agit impunément. Dans le cas de Noami, la première opératrice plante le « décor » et la seconde s’y vautre avec brutalité.
Je m’étonne de l’omerta sur cette question dans cette affaire pourtant très médiatisée; ou plutôt, non, je ne m’étonne pas car je n’ai que trop rarement entendu quelqu’un s’offusquer devant de telles attitudes. Souvent, comme dans le cas du SAMU de Strasbourg, les chefs de service abandonnent trop de pouvoir aux acteurs du soin (Ici, les opératrices décident à la place du médecin).
Il est urgent de sensibiliser les soignants, tous les soignants à la dangerosité des préjugés et à la nécessaire empathie comme condition indispensable à un soin de qualité. Tout cela me choque profondément et a fait de moi un médecin très engagé sur ces questions là, au quotidien, dans ma consultation de médecin généraliste, avec les internes que j’accueille dans mon cabinet, durant les enseignements avec les internes de médecine générale, mais aussi dans mes consultations au CASO de Médecins du Monde à Strasbourg et mes interventions auprès des jeunes scolaires avec la Licra.
Les préjugés sont une véritable barrière entre le soignant et le patient et nous en véhiculons tous un certain nombre. C’est si répandu qu’il est difficile d’y résister. « Un préjugé ? C’est la réalité», m’a répondu une jeune interne il y a quelques semaines..
Pour Naomi, cela conduit à la mort ! C’est de ça qu’il convient de parler dans cette affaire ce d’autant que l’accompagnement de la famille en deuil semble ne pas s’étre fait décemment et c’est très inquiétant. Tant de mépris que personne ne mérite ! C’est aux préjugés qu’il convient de faire un procès !
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