EN MATIÈRE de PDS, le cas du Dr Tarpin a défrayé la chronique ordinale et judiciaire. Ce généraliste du Rhône a été en effet condamné à l’automne dernier à trois mois d’interdiction d’exercice (dont un mois ferme) par la chambre disciplinaire du conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) pour refus de déférer à une réquisition. Cette réquisition avait pourtant été précédemment jugée illégale par le tribunal de grande instance (TGI) de Lyon. À l’époque, le CNOM avait justifié la sanction en rappelant qu’à sa date d’exécution, la réquisition n’avait pas été encore jugée illégale par le TGI, si bien que le médecin rhônalpin aurait dû y déférer.
Ce cas d’école illustre l’ambiguïté qui règne sur le dossier de la PDS. Les textes officiels rappellent qu’elle est basée sur le volontariat, mais elle est en même temps une mission de service public et l’article 77 du code de déontologie indique qu’« il est un devoir pour tout médecin » d’y participer. Ce même article, ainsi que le décret du 13 juillet 2010 relatif aux modalités d’organisation de la PDS, précise cependant que le conseil départemental peut accorder des exemptions « compte tenu de l’âge du médecin, de son état de santé, et éventuellement de ses conditions d’exercice ».
Selon plusieurs acteurs de terrain de la PDS, qui préfèrent garder l’anonymat, le Dr Tarpin aurait été mieux inspiré de demander une exemption à son conseil départemental (CDOM) plutôt que de jouer le bras de fer, d’autant qu’il avait déjà gagné un certain nombre d’actions en justice en matière de PDS. Comme le rappelle Me Vincent Potié, avocat au barreau de Lille et spécialiste des questions de PDS, « quand un médecin a refusé une réquisition et a gagné ensuite devant les tribunaux, les CDOM ne l’embêtent généralement plus ».
La boîte de Pandore.
Sur le terrain, la question des exemptions ne semble d’ailleurs pas poser de problème majeur, malgré le nombre parfois peu élevé de médecins présents sur le terrain rural. En attestent les chiffres de la dernière enquête de l’Ordre sur la PDS : dans 81 % des cas, les CDOM disent recevoir des tableaux de garde complets, ou quasi complets.
« Globalement, indique Me Potié, les CDOM font preuve de souplesse vis-à-vis des médecins qui ne veulent pas faire de gardes. Ils acceptent souvent des tableaux dont ils connaissent la non-complétude réelle. » De même, ajoute-t-il, « il y a des secteurs où la PDS n’est pas assurée complètement alors qu’ils ne sont pas sous-dotés. Les CDOM n’imposent rien de peur de la rébellion. » Manifestement, le souvenir des grèves de l’hiver 2001-2002 a laissé des traces dans les esprits. « En revanche, reprend l’avocat, quelques CDOM pensent que s’ils exemptent tel ou tel parce qu’il est fatigué ou malade, cela revient à ouvrir la boite de Pandore. »
Au CNOM, le Dr François Simon, en charge des questions de PDS, reconnaît un certain pragmatisme en la matière : « Les départements sont souverains en matière d’exemptions, indique-t-il. C’est souvent lié à la maladie ou à l’âge, mais il y a aussi le contexte local : la géographie, l’existence ou non de maisons médicales de garde [MMG], etc. Le bureau peut aussi exempter au pied levé pour un motif personnel grave ou un accident. » Dans la Mayenne, le Dr Luc Duquesnel est président de l’association départementale de PDS. Pour lui, « quand le CDOM s’est impliqué dans la réorganisation de la PDS, il n’y a pas de problème avec les médecins, même en matière d’exemptions. Là où ça coince, c’est quand le CDOM n’est pas réactif, et qu’il n’a rien tenté de réorganiser. Dans ce cas, il juge plus facile de prendre des sanctions contre les récalcitrants que de s’impliquer dans une réorganisation qui réglerait pourtant bien des problèmes. »
Au CDOM de Loire-Atlantique, le président Jean-Louis Clouet ne passe pas pour un chaud partisan de la PDS à marche forcée. « Parfois, confie-t-il, un médecin présente une demande d’exemption pas justifiée ou en ne donnant pas la vraie raison. Dans ce cas, on essaie de se renseigner, de le rencontrer, de voir ce qui ne va pas. » Mais si, de manière générale, son CDOM accorde des exemptions aux médecins de plus de 60 ans, il lui est arrivé exceptionnellement de refuser une demande d’exemption, car elle n’était pas du tout motivée. « Dans ce cas précis, continue-t-il, j’ai conseillé au médecin de se déclarer non volontaire. Mais en général, les problèmes se règlent en bonne confraternité, et on revoit l’affaire six mois après. » Les exemptions ne semblent donc pas constituer un problème majeur, d’autant que, comme le précise un autre président de CDOM, « un médecin qui veut se faire exempter n’a en général aucun mal à trouver un confrère pour lui faire un certificat médical », tout au moins dans les grands départements où tous les médecins ne se connaissent pas. Mais à entendre Me Potié, les médecins les plus exemptés seraient les spécialistes libéraux, « très peu sollicités pour la PDS, alors que les textes ne les en excluent nullement ».
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