Trystan Bacon (ISNAR-IMG) : « Sortons de l'hôpital, il faut que l'internat ressemble à notre exercice futur »

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Publié le 04/02/2016
BACON

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LE QUOTIDIEN : Les autorités hospitalo-universitaires se sont récemment alarmées de l'incompétence de certains internes qui ont démarré leur formation à l'étranger. Ce sujet vous préoccupe-t-il ?

TRYSTAN BACON : L'ISNAR-IMG ne s'est pas penchée particulièrement sur ce sujet. Nous n'avons pas tranché s'il faut ou non instaurer une note éliminatoire aux ECN. Il faut, selon nous, avant tout donner aux internes les moyens de bien se former, dans tous les pays de l'Union européenne, plutôt que leur jeter la pierre ! Nous sommes heureux de pouvoir envisager la mobilité des internes à l'étranger. Nous accueillons d'ailleurs à notre congrès deux internes espagnol et portugais qui sont actuellement dans des cabinets de médecine générale en Alsace.

Dans le cadre de la réforme du troisième cycle, il est proposé de généraliser un portfolio pour contrôler les compétences des internes. Y êtes-vous favorable ?

Oui, le portfolio est déjà très développé dans les facultés de médecine en France et notamment dans les départements de médecine générale. Il s'agit souvent d'un dossier numérique qui retrace l'ensemble des situations cliniques et des compétences acquises pendant l'internat. Le portfolio doit être généralisé et harmonisé pour valider le DES. L'un des projets est d'utiliser ce portfolio pendant toute la vie professionnelle.

Soutenez-vous la proposition de l'Ordre d'introduire une recertification des médecins tous les six ans ?

Nous avons été entendus par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) mais nous n'avons pas de position officielle sur ce sujet. La recertification est habituelle dans les pays anglo-saxons. Toutefois, il nous semble indispensable qu'au cours de sa carrière, le médecin puisse se requalifier dans une autre discipline s'il le souhaite. Une souplesse doit être accordée aux généralistes pour passer d'un DES à un autre, sous couvert d'une certification des compétences en s'appuyant sur un stage de mise à niveau.

Vous êtes opposés au passage du DES de médecine générale à quatre ans mais vous réclamez davantage de stages en libéral pendant l'internat. Une année de formation supplémentaire n'est pas indispensable ?

Nous plaidons pour que notre internat reste à trois ans, contrairement aux généralistes enseignants qui souhaitent un passage à quatre ans. Nous estimons que notre formation est trop « hospitalocentrée ». Sortons de l'hôpital, nous serons médecins en ambulatoire, il faut que l'internat ressemble à notre exercice futur. La réforme du troisième cycle est l'occasion de proposer deux stages obligatoires en libéral dont un en SASPAS (stage autonome en soins primaires ambulatoires supervisé). Il faut nous en donner les moyens. Aujourd'hui, seul un interne sur deux fait un SASPAS.

Souhaitée par l'ISNAR-IMG, la participation des internes aux gardes libérales a-t-elle débuté ?

Des expérimentations sont en cours mais la situation est très hétérogène car la réglementation demeure floue. Nous souhaitons l'ouverture des gardes en ville pendant l'internat. L'interne qui souhaite faire des gardes en tant qu'observateur ou effecteur doit pouvoir le faire. La découverte de la permanence des soins ne doit pas avoir lieu au moment où l'on s'installe.

Quelles seront vos priorités lors de la grande conférence de la santé du 11 février ?

La question de la formation sera évidemment fondamentale. Nous souhaitons rendre plus lisibles les aides à l'installation des jeunes professionnels. Il faut en assurer la promotion car selon une de nos enquêtes, 95 % des internes ne les connaissent pas ! Enfin, la réforme du temps de travail des internes doit être prise à bras-le-corps par les hôpitaux. Un an après la sortie du décret (qui limite à 48 heures la durée de travail hebdomadaire, NDLR), on se rend compte que les avancés sont trop timides ! Nous le savons, ce combat va être long.

Propos recueillis par Sophie Martos

Source : Le Quotidien du médecin: 9468