Faut-il délivrer plus tardivement la licence de remplacement aux internes ? La polémique fait rage

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Publié le 03/10/2019

Crédit photo : S. Toubon

L'octroi de la licence de remplacement est source de vifs désaccords entre une partie des jeunes médecins, les enseignants et l'Ordre.

Si la majorité des acteurs universitaires souhaitent reculer la délivrance de cette licence, l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) mais aussi les jeunes chirurgiens (CNJC), jeunes anesthésistes-réanimateurs (SNJAR) et jeunes ophtalmologistes (ANJO) demandent le maintien du système actuel et alertent aujourd'hui sur la « fin du remplacement ». 

Les règles (nombre de semestres requis) permettant d'autoriser un interne à remplacer pendant son internat sont définies, spécialité par spécialité, dans le code de la santé publique. Un interne de médecine générale peut remplacer après seulement trois semestres de résidanat validés dont un stage chez le praticien de niveau 1. Les autres spécialités doivent attendre en moyenne la validation de cinq semestres (avec des spécificités) pour prétendre au remplacement. 

18 mois plus tard ? 

Mais la nouvelle architecture des maquettes de 3e cycle en trois phases (socle, approfondissement et consolidation), et l'introduction de 14 nouveaux diplômes d'études spécialisées (DES), changent la donne – l'idée de certains étant de délivrer les licences seulement en fin de phase d'approfondissement, soit 18 mois après le délai actuel pour certaines spécialités. 

Depuis des mois, les désaccords se matérialisent ainsi sur la durée de formation requise pour prétendre au remplacement. L'Ordre confirme au « Quotidien » qu'aucun terrain d'entente n'a pu être trouvé entre les partisans d'une autorisation plus tardive et les défenseurs du schéma actuel. « Lorsqu’un consensus réunira toutes les parties prenantes, cela pourra déboucher sur des propositions », temporise l'instance ordinale. 

Après la validation de 5, 6 ou même 8 semestres

Pour accompagner la réforme des maquettes, l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG), le Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR), le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) et la Conférence des doyens militent pour une délivrance de la licence plus tardivement dans le cursus.

Concrètement, un interne de médecine générale serait autorisé à remplacer seulement après la validation de son 5e semestre et du stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée (SASPAS). Les autres spécialités devraient attendre la fin de la phase d'approfondissement, soit après six ou huit semestres d'internat, selon les DES. 

La conférence des doyens assume : « Avant la fin de la phase d'approfondissement, les compétences ne seront pas acquises, on ne peut donc envisager de donner la licence avant pour des raisons pédagogiques », avance le Pr Jean Sibilia, président de la conférence. ReAGJIR et l'ISNAR-IMG se rangent derrière leurs aînés. « Le SASPAS permet d'être autonome, c'est un vrai plus pour la pédagogie et plus pertinent pour les patients », commente Lucie Garcin, présidente de l'ISNAR-IMG. 

Continuité des soins et apprentissage 

Mais d'autres syndicats juniors défendent au contraire la possibilité de remplacer tôt, à la fois pour des raisons de soutien aux praticiens installés et d'apprentissage de la pratique. Pour Antoine Reydellet, chef de file de l'ISNI, « la licence de remplacement est un gain d’expérience important pour les internes mais c’est également un acte confraternel qui permet de soulager les médecins déjà en exercice ». 

Le Conseil national des jeunes chirurgiens (CNJC) insiste sur les bénéfices du remplacement en milieu de cursus. « Ces périodes permettent d'augmenter le niveau d'expertise des jeunes. En revanche, ils y vont seulement s'ils en sont capables, analyse le Dr Gabriel Saiydoun, président du CNJC. On ne peut casser la dynamique de ceux qui souhaitent approfondir leurs connaissances et acquérir de l'expérience. » Autre argument : la rémunération à la clé. « Si les internes souhaitent se lancer dans un DU ou une année de recherche, ces remplacements permettent un soulagement financier », ajoute-t-il. 

Les jeunes viennent de recevoir le soutien appuyé de la CSMF. La centrale confédérale considère que le remplacement précoce est une étape clé dans la construction du projet professionnel, y compris pour « encourager la future installation en libéral ». La Conf' met également en avant l'accès aux soins. « Les médecins libéraux installés ont absolument besoin d’avoir recours à des remplaçants pour maintenir l’activité de leurs cabinets, en cas d’arrêt maladie ou de congés, alerte le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Et donc de permettre à leurs patients d’accéder à un médecin tout au long de l’année. » 


Source : lequotidiendumedecin.fr