C'est devenu un des feuilletons de l'été : le tour de vis décidé cet été par Bercy sur les arrêts maladie – et mis en œuvre par les caisses primaires – n'en finit pas de provoquer des remous au sein de la profession, qui dénonce depuis plusieurs semaines une forme de « flicage » statistique et une procédure « infantilisante », faisant fi des conditions d'exercice déjà très difficiles et des délais d'accès aux soins.
Atypies
La Cnam a expliqué qu'elle cible en priorité les « prescripteurs très atypiques » (par rapport à leurs confrères exerçant dans des conditions similaires), soit environ 1 000 généralistes libéraux France entière (1,5 à 2 % des effectifs) pour une potentielle mise sous objectifs (MSO). Pour cette campagne, ont été sélectionnés les médecins prescrivant au moins deux fois plus d’arrêts de travail par patient actif en tenant compte de la structure de leur patientèle (comparaison avec leurs confrères de la même région à patientèle et zone d’exercice comparable avec standardisation des patientèles selon l’ALD, le sexe et l’âge et prise en compte de l’indice de "défavorisation" du territoire).
Il n'empêche que 5 000 généralistes environ sont sous surveillance et se voient proposer des entretiens individuels sur le territoire. Et des échanges confraternels ont démarré depuis cet été auprès de 10 000 praticiens qui délivrent fréquemment des arrêts liés à la santé mentale. La Cnam met en avant une phase « contradictoire » et de dialogue afin de permettre à chaque praticien concerné de présenter des éléments pouvant justifier son niveau de prescription.
Plusieurs facteurs explicatifs mais…
Dans les Hauts-de-France, relate France 3, « la traque a commencé », visant les arrêts abusifs ou de complaisance. Même si la région est en manque de généralistes, l'Assurance-maladie y fait état d'une augmentation de 5 % des arrêts maladie entre 2021 et 2022. Et depuis septembre 2022, la région aurait enregistré une nouvelle hausse de 7 %. « Des taux qui ne sont pas aussi conséquents qu'au niveau national mais qui restent tout de même assez élevés », confie à France 3 Hauts-de-France Jean-Marc Vandendriessche, directeur régional du service médical.
Ce responsable de l'Assurance-maladie cite plusieurs facteurs pouvant contribuer à expliquer cette hausse des IJ : contexte démographique (davantage de patients), baisse du taux de chômage (davantage de salariés), hausse du Smic qui provoque une hausse du montant des indemnités ou encore allongement de la durée moyenne d'indemnisation. Mais pas de quoi justifier la dynamique actuelle. « Dans les Hauts-de-France, 700 médecins avec des taux plus élevés que la moyenne ont été contactés pour nous présenter leur pratique dans le cadre d'un entretien confraternel, visant à les informer et à les accompagner », assume Jean-Marc Vandendriessche.
Six mois pour corriger
Concernant les fameux prescripteurs très atypiques – dont les taux dépassent de loin les moyennes habituelles – seuls 52 généralistes (sur 4 600 au total) auraient été repérés dans les Hauts-de-France. « Ces praticiens sont alors soumis à une MSO (...) qui vise à les faire revenir à des taux de prescriptions qui se rapprochent plus de la moyenne, sous six mois », souligne encore le patron régional du service médical.
Mais plutôt que de parler de « réduction » des taux de prescriptions d'IJ, Jean-Marc Vandendriessche préfère employer le terme « régulation ». « Fournir des arrêts représente l'une des missions principales de l'Assurance-maladie, recadre-t-il à France 3 Hauts-de-France. On ne peut donc pas parler de réduire les pertes liées aux arrêts maladie, puisqu'une partie du budget est justement prévue pour répondre à ces besoins. Il s'agit plutôt de les arbitrer. »
L’indemnisation de l’ensemble des arrêts de travail a représenté pour l’Assurance-Maladie un coût de 14 milliards d'euros en 2022, en dehors des arrêts liés au Covid. Cette dépense apparaît très dynamique et en accélération, avec un taux d’évolution de 7,4 % en 2022.
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