Face à l'envolée des dépenses d'indemnités journalières, le gouvernement veut renforcer le pouvoir de l'employeur pour contrôler le bien-fondé de certains arrêts maladie via un médecin mandaté, et supprimer les IJ en cas d'abus supposé. Niché dans l'article 27 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2024), la mesure soulève un tollé du côté de MG France et des Généralistes-CSMF.
Jusqu'à présent, la loi donnait la possibilité à un employeur de rémunérer un praticien pour faire des contre-visites en cas d'arrêt de travail. Mais, selon Aurélien Rousseau, interrogé par LCI, « c’est extrêmement lourd pour un employeur de déclencher des contrôles », avec un résultat incertain. La nouveauté serait que, lorsque ce médecin mandaté par l'employeur jugera l'arrêt injustifié, le versement des indemnités journalières du salarié pourra être suspendu par la caisse locale d'assurance-maladie. Et lorsqu'il estime que « l’arrêt de travail est justifié pour une durée inférieure à celle fixée par le médecin prescripteur, la suspension prend effet à l’échéance de la durée retenue par le médecin diligenté par l’employeur ». L'article précise que le service du contrôle médical peut décider de procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré. Dans ce cas, le versement des IJ ne sera pas suspendu « jusqu’à ce que ce service ait statué ».
Employeur juge et partie
Plusieurs syndicats de généralistes voient dans cette évolution un « flicage » inacceptable, préjudiciable aux patients et difficile à accepter pour les médecins traitants. « C'est une mesure extrêmement dangereuse, surtout pour les salariés les plus fragiles », dénonce ce lundi le Dr Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint de MG France. Car même si le recours du patient auprès du service de contrôle médical de la Cpam est prévu, il ne serait pas « immédiat » en raison « des délais administratifs et des difficultés de certains patients à faire la démarche ». Cette solution lui paraît aussi bancale, voire illégale.
« L'employeur, par l'intermédiaire du médecin qu'il paie, est à la fois juge et partie. C'est absurde », ajoute le généraliste. C'est la raison pour laquelle MG France s'oppose à « cette mesure de casse sociale » et appelle tous les médecins traitants à tenir à disposition de leurs patients le courrier de contestation éventuellement nécessaire, au cas où la mesure devrait s'appliquer.
Le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, ne mâche pas ses mots non plus. « C'est de la communication. La priorité du gouvernement est le remboursement de la dette et tant pis pour les assurés, dénonce le généraliste mayennais. Les médecins qui vont faire cette mission pour des employeurs vont être très mal vus par leurs confrères du territoire ». À noter que le même article du PLFSS prévoit d’intensifier et de simplifier l’« accompagnement » des médecins présentant un taux important de prescription d’arrêts.
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