Pour ses 100 jours à Matignon, Gabriel Attal s’apprête à défendre son bilan ce soir, à la télévision. Mais si l’hôte de la rue de Varenne est plus populaire que ses prédécesseurs à la même période auprès des Français, selon une enquête Odoxa pour Le Figaro publiée le mercredi 17 avril, il est loin de convaincre la médecine libérale. En moins de trois mois, le chef du gouvernement a réussi à se mettre à dos toute la profession, le tout en pleines négociations conventionnelles, émaillées de réunions de plus en plus tendues depuis leur lancement, en novembre.
L’orage a commencé par l’arbitrage sur les tarifs hospitaliers, très différenciés entre le secteur public et le secteur privé lucratif, où exercent des médecins spécialistes libéraux. Jugeant cette décision comme une « attaque historique » contre la médecine spécialisée libérale, quatre syndicats représentatifs de médecins libéraux (Avenir Spé-Le Bloc, SML, UFML-S, FMF) ont quitté la table des négociations, le 4 avril, jour d’un round conventionnel décisif par l’Assurance-maladie.
Sidération
Trois jours plus tard, loin de mettre de l’huile dans les rouages, Gabriel Attal a voulu frapper les esprits en présentant dans la presse régionale une série de mesures contre les déserts médicaux qui ont mis le feu aux poudres. Remise en cause du parcours de soins avec des accès directs (spécialistes, kinés), taxe lapin, psychologue à 50 euros la séance… Bien loin du choc d’attractivité tant promis, la méthode du Premier ministre a fait monter la tension. MG France, le premier syndicat de médecins généralistes, « sidéré et consterné », a alors décidé le 7 avril de suspendre sa participation aux négociations conventionnelles.
« Le Premier ministre a mis à terre les fondations de la médecine libérale française.
Dr Franck Devulder, président de la CSMF
« En annonçant la destruction du parcours de soins et le transfert de compétences à d’autres professions de santé au mépris de la qualité et de la pertinence des soins des Français, le gouvernement fait le choix d’en finir avec le médecin traitant et avec toutes les autres spécialités médicales libérales », cogne à nouveau ce jeudi 18 avril le Dr Franck Devulder. Le président de la CSMF, contacté le même jour par le Quotidien, juge que les 100 jours du Premier ministre sont « une catastrophe » pour la médecine de ville. « En une poignée de jours, le Premier ministre a mis à terre les fondations de la médecine libérale française. Il a sabordé les négociations conventionnelles. Il doit corriger maintenant », martèle le gastroentérologue de Reims.
Après une rencontre mercredi 17 avril avec les conseillers de Gabriel Attal, le patron de la CSMF appelle à nouveau le gouvernement à donner des « engagements clairs et écrits » pour une reprise des négociations conventionnelles. Au-delà des propositions déjà mises sur la table, la CSMF demande une consultation longue en médecine générale adaptée à la situation clinique du patient et à la complexité de sa prise en charge, une valorisation de la consultation du médecin spécialiste dont l’APC, une progression significative de l’enveloppe dédiée à la nomenclature des actes techniques et une revalorisation des contrats de modération des dépassements d’honoraires (Optam et Optam-Co). En revanche, « si Gabriel Attal accélère sur ses annonces, alors il n’y aura pas de reprise des négociations », menace le Dr Devulder.
Ambiance « frisquet »
Reçu également à Matignon le 17 avril, le Dr Patrick Gasser, président d’Avenir Spé se dit profondément « dépité ». « Il n’y a rien de concret. La priorité du gouvernement n’est pas la médecine libérale. On a l’impression qu’il veut déconstruire le système de santé en France », déplore le gastroentérologue de Nantes.
MG France confirme aussi « l’ambiance frisquet », ressentie lors de sa rencontre avec le cabinet de Gabriel Attal, le même jour. « C’est sûr, ils ne sont pas de notre côté », confie le Dr Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint. Dans ce contexte, comment Gabriel Attal compte restaurer la confiance auprès des médecins libéraux ? Et surtout, le veut-il vraiment ?
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