Reconnue comme une thérapeutique non médicamenteuse par la Haute Autorité de santé (HAS), l’activité physique adaptée (APA) permet de prévenir les risques liés à la sédentarité mais aussi de lutter contre certaines pathologies chroniques (obésité, hypertension) et affections de longue durée comme le diabète. La pertinence de mettre ainsi les patients « en mouvement » fut au cœur du projet de la maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) des Bleuets de Savigny-sur-Orge (Essonne). Il y a quatre ans, le collectif composé de 17 professionnels libéraux – dont quatre médecins généralistes – a eu l’idée de créer une maison sport-santé dédiée à l'accueil, l'information et l'orientation des patients en vue d’une activité physique adaptée à leur état de santé.
L’entretien motivationnel permet de déconstruire une certaine représentation
Dr Céline Besnier
Le principe est simple. Les patients éligibles sont identifiés puis adressés à la maison sport-santé par les soignants de la MSP ou appartenant plus largement à la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) Hygie Nord-Essonne. Dans ce bassin de vie de 140 000 habitants, 207 personnes ont déjà été incluses dans les programmes APA dont 143 sous l’impulsion directe des médecins généralistes.
Dans tous les cas de figure, une prescription médicale est requise pour encadrer l’activité physique adaptée. Au sein de la MSP des Bleuets, un protocole sport-santé guide à cet effet généralistes et infirmières en pratique avancée (IPA). « À l’issue d’un premier entretien avec le patient, je fais une proposition de prescription au médecin traitant, détaille Virginie Trumeau, IPA de la maison de santé, qui joue un rôle essentiel en tant que coordinatrice au sein de la MSS. Et si le patient n’est pas de la MSP, je le renvoie vers son médecin traitant pour faire valider l’ordonnance ».
La Dr Céline Besnier est l’un des piliers de ce dispositif d’activité physique adaptée. Formée à l’éducation thérapeutique et à l’entretien motivationnel, la généraliste de 41 ans repère les patients – de l’adolescence à la personne âgée – souffrant de maladies chroniques, de problèmes de santé mentale ou d’isolement, et leur propose d’intégrer précisément un programme adapté. Cela concerne environ 10 % de sa patientèle de 2 000 patients. « Beaucoup le refusent au départ car ils ne savent pas que l’activité physique est adaptée à leur douleur, à leur santé. L’entretien motivationnel permet de déconstruire une certaine représentation », raconte la médecin.
Bilan tous les trois mois
Une fois la prescription médicale établie, le patient revoit l’infirmière coordinatrice pour une consultation d’orientation vers une activité adaptée à sa santé. Rugby, boxe, marche nordique… : le choix est varié grâce aux intervenants formés – enseignants en APA, kinés. « Je revois ensuite les patients pour réaliser un bilan à trois mois, six mois et un an », précise Virginie Trumeau.
Lors de ces rendez-vous, l’IPA soumet deux questionnaires aux patients concernés. Le premier (Onaps– Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité) aborde les questions sur les habitudes de vie, comme le temps d’écran ; et le deuxième (Garnier) évalue la perception de la santé chez la population adulte. « On leur demande de noter de 1 à 10 la qualité de leur sommeil, leur condition physique. Cela permet de voir les progrès et les améliorations », précise la coordinatrice. Ces bilans durent de 30 à 45 minutes. « Il est important de ne pas les lâcher. Il n’y a pas que l’APA. Un patient peut aussi avoir besoin de voir un psychologue, un diététicien », ajoute-t-elle.
Selon la Dr Céline Besnier, les médecins ont encore beaucoup de mal à prescrire le sport-santé. « Il y a un problème médico-légal. Il faut savoir comment prescrire et à qui on envoie les patients », justifie la généraliste. Pour aider ses confrères, la médecin a développé un outil gratuit d’aide à la prescription (SportSanteClic), qui propose un large choix de fiches pratiques adaptées à chaque pathologie, selon des critères scientifiques. Chaque fiche détaille des stratégies thérapeutiques possibles incluant l'activité physique, avec les éventuelles contre-indications, des recommandations ainsi qu'un modèle de prescription. « Tous les médecins de mon territoire le connaissent bien et l’utilisent », se réjouit la généraliste.
Côté médecins, ce levier facilite la sobriété médicamenteuse
Pour l’équipe de la MSP des Bleuets, les avantages d’une maison sport-santé (MSS) ne sont plus à démontrer. « Cela permet aux patients de sortir de l’isolement, de recréer du lien social mais aussi de limiter l’hypertension, le cholestérol, le diabète », indique la généraliste. « J’ai vu des patients diabétiques obèses qui se mettent à l’APA, font très attention à leur alimentation, leur sommeil, leur mode de vie. Beaucoup perdent du poids, s’alimentent mieux et j’arrête la metformine », illustre la Dr Besnier.
Parmi les freins identifiés, reste le coût du programme d’activité physique, avec des séances comprises entre 12 et 30 euros (pour l’instant non remboursées). La dernière loi Sécu a ouvert la voie à une expérimentation de prise en charge de programmes d’activité physique adaptée pour les patients atteints de cancer.
Labellisée puis habilitée depuis 2023, la maison sport-santé de Savigny-sur-Orge s’inscrit dans le cadre d’un vaste programme national lancé depuis 2019 par le gouvernement. Quelque 573 MSS ont reçu à ce jour la labellisation du ministère des Sports et de celui de la Santé, avec une variété de structures et de modèles : collectivités territoriales, centres hospitaliers, associations sportives, établissements publics, espaces digitalisés ou encore structures itinérantes. Un premier pas vers la généralisation du sport sur ordonnance ?
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