Après avoir longtemps rejeté le tiers payant généralisé, sept syndicats de professionnels de santé libéraux* — parmi lesquels le SML et la CSMF chez les médecins — prennent le taureau par les cornes et lancent leur propre solution, intitulée « Paymed ». Celle-ci est calquée sur Résopharma, modèle développé par les pharmaciens pour vérifier les droits des assurés et garantir les paiements par la Sécu et les mutuelles. « C'est un système simple, indépendant et sécurisé », vante le Dr Philippe Vermesch, président du SML.
Toutefois, ne leur parlez surtout pas de tiers payant… mais plutôt de « dispense d’avance de frais » ! Paymed se veut en effet être leur « alternative libérale de dispense d’avance de frais ». « Leur », car les sept organisations sont actionnaires de la solution, aux côtés de Résopharma et du Crédit Agricole. Cette dernière est majoritaire en parts mais ne l’est pas en voix et ne peut donc rien imposer aux organisations de professionnels de santé, assurent les syndicats.
Un flux unique pour l'AMO et l'AMC
Un pragmatisme qui s'explique par une « tendance lourde dans la société pour évoluer vers un tiers payant généralisable », selon Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. De plus en plus d'actes sont l'objet du tiers payant, ajoute le leader syndical. Dernier exemple en date, cité par le néphrologue : la prise en charge à 100 % par l'Assurance-maladie des nouvelles consultations obligatoires de l'enfant.
En lançant Paymed, un outil à la main des professionnels, le SML, la CSMF et consorts entendent « garantir la liberté d’exercice du professionnel de santé libéral ». Ce qui n'était pas le cas du TPG de la loi de santé de Marisol Touraine, qui portait selon eux « atteinte à l'un des piliers de l’exercice libéral » en « remettant en cause le paiement direct du professionnel par le patient ».
De 36 à 60 euros par mois
Avec Paymed, médecins, pharmaciens, infirmiers ou encore kinésithérapeutes s’assureraient d’avoir un paiement garanti à J+6 de la totalité de leur facture, et ce via un flux unique pour les parts AMO et AMC. Les droits des patients seraient également contrôlés en amont, afin de s'assurer que ceux-ci sont bien couverts par un organisme complémentaire. « C’est un outil pour éviter les impayés et ainsi sécuriser leur trésorerie », explique Daniel Guillerm, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI). Le coût de ce service serait compris entre 36 et 60 euros par mois, selon le nombre de feuilles de soins électroniques (FSE) transmises.
Actuellement, le fait qu'un professionnel doive contractualiser individuellement avec les organismes complémentaires pour pratiquer le tiers payant constitue un obstacle de taille à sa généralisation, expliquent les syndicats à l'initiative du lancement de Paymed.
Selon le comité de pilotage sur le tiers payant, cité par le Dr Ortiz, seulement 6,5 % des médecins généralistes avaient contractualisé en juin 2019 avec l’Inter-AMC, concentrateur gérant le tiers payant d'environ 80 % des complémentaires.
Négociations en cours
Si Paymed est désormais « opérationnel techniquement », les actionnaires veulent désormais mettre la pression sur le gouvernement, l’Unocam (Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire) et les éditeurs de logiciels afin que Paymed soit accessible au plus grand nombre et d'obtenir un « conventionnement collectif » avec le plus d'organismes complémentaires possibles (c'est-à-dire qu'un professionnel n'aurait plus à contractualiser directement avec ceux-ci).
Pour l’heure, Paymed qui est expérimentée depuis mai, n'est accessible que depuis la moitié des logiciels métiers (et en relation avec quelques complémentaires, dont les noms n'ont pas été divulgués). Sollicitée pour un partenariat, l’Inter-AMC a quant à elle « opposé une fin de non-recevoir », indique Paul Henri Cheminal, directeur général de Paymed.
* CSMF, SML, FSPF, FNI, SDB, FFMKR et UNSAF.
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