Dans un contexte de raréfaction des ressources humaines, attirer des généralistes et des spécialistes en zone rurale ou des professionnels de santé à l’hôpital est un problème épineux qui a suscité de nombreuses discussions lors des Assises régionales de la santé, organisées par la région Auvergne-Rhône-Alpes à la mi-octobre, à Lyon.
Pour la nouvelle directrice générale de l’ARS, Cécile Courrèges, « il y a trois actions possibles pour attirer et garder des professionnels de santé ». D’abord, il faut former « davantage et mieux ». Ensuite, « les augmentations de salaire sont nécessaires mais ne suffisent pas. Il y a aussi beaucoup à faire sur les conditions d’exercice et les conditions de travail ». Elle estime à ce titre qu’il faut rendre les métiers du soin « plus lisibles auprès des jeunes » afin que ces derniers soient plus nombreux à les choisir en toute connaissance de cause. « Il faut offrir des stages de qualité et, pour cela, multiplier le nombre de maîtres de stage. Pour faciliter l’installation dans des territoires ruraux isolés, nous devons faire découvrir ces lieux aux jeunes », insiste-t-elle. Enfin, il est souhaitable de « travailler l’après, en créant des environnements favorables et conformes aux attentes des professionnels ». Cécile Courrèges vante notamment les mérites des maisons de santé, qui permettent de rompre l’isolement des soignants. En Auvergne-Rhône-Alpes, il en existe 428 et une quarantaine de projets sont accompagnés chaque année par l’ARS.
Le stage, pierre angulaire de l’attractivité
Le Pr Pierre Clavelou, neurologue au CHU de Clermont-Ferrand et doyen de la faculté de médecine de la ville, estime que « le stage est un élément majeur pour convaincre les étudiants que la médecine générale correspond à ce qu’ils ont imaginé. Il faut des stages attractifs si on veut réenchanter les territoires », lance-t-il. Un avis partagé par le Dr Yoann Martin, généraliste, président de l’association Médecins correspondants Samu et secrétaire général adjoint de l’Ordre des médecins du Puy-de-Dôme. « La qualité d’accueil et de compagnonnage est essentielle. Les terrains de stage doivent être en accord avec les attentes des jeunes, en particulier sur l’exercice coordonné. Non seulement le stage doit leur plaire mais, surtout, il doit les faire rêver ! », s’exclame-t-il.
Le travail en maison de santé attire les jeunes médecins, cela permet de nous sentir moins seuls quand on débute
Dr Alix Ballu, médecin remplaçante
Médecin remplaçante, la Dr Alix Ballu relève que « le travail en maison de santé attire les jeunes médecins car cela permet de nous sentir moins seuls quand on débute, mais aussi de gagner du temps médical ». Selon elle, être salarié d’une structure comme un centre de santé permet également « de ne pas s’engager sur vingt ans et de se délester d’une charge administrative ». Et d’insister : « Tous les médecins n’ont pas envie d’être aussi chef d’entreprise. En centre, les jeunes ont leur patientèle, pratiquent la médecine avec d’autres professionnels et peuvent passer la main à quelqu’un au besoin ».
Tester la semi-ruralité
Sa consœur Pauline Vialle, interne à la faculté de Clermont-Ferrand, apprécie elle aussi le pratique pluridisciplinaire, qu’elle juge très attractive. « Dans la maison de santé dans laquelle je travaille, nous avons une infirmière Asalée qui a des compétences dans la prévention, le sevrage tabagique et le diabète, témoigne-t-elle. Elle peut faire des examens complémentaires et prendre en charge des patients chroniques. Cela permet une meilleure coordination des soins. Avoir pu découvrir l’exercice en milieu semi-rural m’a permis de me rendre compte que j’avais une appétence pour ce milieu. »
Mais dans certains territoires, rien n’est possible si les élus ne mettent pas encore plus qu’ailleurs la main à la pâte. Jérôme Laurent, maire de Saint-Marcel-d’Ardèche, raconte que dès 2020, sa petite commune de 2 500 habitants a créé une commission santé regroupant tous les soignants du bassin de vie pour tenter de trouver une solution au manque criant de médecins. En vain. En 2022, le village perd le dernier de ses généralistes. Engagée dans une « lutte contre les locaux vides », la mairie se lance alors dans le déploiement d’un dispositif hybride, fondé sur la présence d’un médecin salarié en centre de santé un jour par semaine et sur une offre de téléconsultation. Depuis, la région, le département et l’ARS se sont associés aux efforts de la commune pour ouvrir un nouveau centre de santé en février 2024, salariant deux généralistes à temps plein. Soixante pour cent de leurs patients étaient sans médecin traitant.
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre
Mélanie Heard (Terra Nova) : « Une adhésion massive des femmes à Kamala Harris pour le droit à l’avortement »
Et les praticiens nucléaires inventèrent la médecine théranostique