Les « Journées Dermatologiques de Paris » ont débuté mardi 5 décembre au Palais des Congrès (Paris) et devraient accueillir quelque 6 000 participants d'ici à samedi. C'est dans ce contexte d'actualité professionnelle que la Société française de dermatologie (SFD) alerte sur la « pénurie » de dermatologues, risquant d'entraîner une « crise de santé publique ».
Les chiffres sont éloquents. « En 2007, il y avait sur tout le territoire français 3 542 praticiens exerçant la dermatologie. Quinze ans plus tard, ce chiffre est passé à 2 798, soit une diminution drastique de 20 % ! Dans certaines régions, il n’y a plus un seul dermatologue libéral en activité », alerte la Dr Nicole Jouan (SFD), dermatologue qui partage son exercice entre activité libérale et son poste d’attachée à l’hôpital de Brest.
La Pr Gaëlle Quéreux, présidente de la SFD, appelle de ses vœux des mesures urgentes pour garantir l'accaès aux soins dermatologiques. Classique, le premier levier concerne le nombre de places ouvertes aux internes. « Les pouvoirs publics ont, cette année, accordé 10 places supplémentaires… L’an dernier, le total n'était que de 100 et nous estimons à 125 le nombre de postes d'internes nécessaires à ouvrir pour commencer à enrayer le déclin démographique », analyse la chef du service de dermatologie du CHU de Nantes. Une décision d'autant plus nécessaire que « 30 % des dermatologues français ont plus de 60 ans », renchérit la Dr Jouan.
Médecins de second recours
Mais afin de faire face immédiatement à une situation critique – le délai moyen d’attente pour obtenir un rendez-vous chez un dermatologue est estimé à 95 jours – les spécialistes souhaitent mieux s'organiser avec leurs confrères généralistes, qui seraient eux-mêmes mieux formés. « Nous sommes des médecins de second recours », recadre la Dr Nicole Jouan. L'objectif assumé est de réorienter les patients vers les généralistes en renforçant le parcours de soins insuffisamment respecté, dès le stade initial de la consultation. « Le médecin généraliste doit constituer le premier filtre pour les patients consultants pour des problèmes de peau. Certains s’intéressent déjà à la dermatologie et suivent des formations complémentaires », relève la dermatologue brestoise. Beaucoup pourraient bénéficier de ces modules complémentaires pour mieux diagnostiquer et traiter un nombre accru de pathologies cutanées courantes. La SFD est impliquée dans la formation des généralistes à la dermatologie et propose des webinaires en ce sens.
La télé-expertise en renfort
Autre axe privilégié pour gérer la pénurie : le développement de réseaux de télé-expertise en dermatologie. Cette pratique à distance permet au généraliste d’adresser la photo d’une lésion cutanée de manière sécurisée pour obtenir des conseils ou des avis spécialisés, réduisant les délais d'attente. Plusieurs réseaux ont été formalisés à l’initiative de médecins élus des URPS en Bretagne, Île-de-France, dans les Hauts-de-France et en Corse.
En Bretagne, 34 dermatologues et 900 généralistes sont impliqués dans ce réseau et connectés via une messagerie sécurisée. Chaque dermatologue volontaire est de garde pendant une semaine d’affilée et gère les demandes d'avis des omnipraticiens qui obtiennent, en règle générale, une réponse dans la journée. « L'analyse des données a montré qu’une demande sur deux conduit le patient à être vu par le dermatologue et une demande sur deux est prise en charge par le généraliste avec les conseils du spécialiste », précise la Dr Jouan, à l’origine du dispositif OncoBreizh que Le Quotidien avait présenté en 2022.
La SFD souligne enfin l’importance des associations de patients dans l’élaboration de parcours « plus fluides », ainsi que la sensibilisation du public à l'autosurveillance cutanée.
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