Seul candidat à la succession du Dr William Joubert à la tête de l'Union nationale des professionnels de santé (UNPS*, libéraux), Sébastien Guérard, 43 ans, kiné à Saint-Nazaire-en-Roussillon (Pyrénées-Orientales) a été élu à l'unanimité. Il appelle la Cnam à sortir de la « balkanisation » du système conventionnel et pousse l'idée d'états généraux de l'interpro pour réfléchir aux contours des métiers et des compétences. « Nous souhaitons mettre fin à l'inaction de nos prédécesseurs », lance-t-il.
LE QUOTIDIEN : Qu'est ce qui a motivé votre candidature ?
SÉBASTIEN GUERARD : Je suis l'un des fondateurs des Libéraux de santé, une intersyndicale qui rassemble à la fois le corps médical et paramédical. C'était ma première ambition. Dans un deuxième temps, je souhaite m'investir pleinement dans l'UNPS. Cette organisation qui regroupe toutes les organisations syndicales représentatives doit redevenir l'interlocuteur direct des tutelles sur un certain nombre de sujets concernant les soins de ville.
Pourquoi ? Je constate que cette institution est peu sollicitée, sous-utilisée. Dernièrement, sur les contours de métiers, les partages des tâches, les travaux ont été confiés au comité des liaisons des institutions interordinales (Clio). Je ne dis pas que les Ordres n'étaient pas légitimes sur ce sujet ! Mais il était totalement anormal que l'UNPS soit mise à l'écart. Si nous avions été consultés, il n'y aurait pas eu ce schisme de l'Ordre des médecins après avoir signé la déclaration commune sur l'accès direct.
Avec la nouvelle équipe, vous souhaitez un changement de cap. Qu'est ce qui ne va pas ?
La création de l'UNPS en 2004 a été, au départ, très mal vécue par les organisations monoprofessionnelles. Craignant de se faire évincer par ce « super syndicat », elles n'avaient pas su se saisir de cet outil dans les premières années pour l'utiliser correctement. Et les contributions n'étaient pas suffisantes ces dernières années poussant alors la tutelle à se tourner vers d'autres organisations.
Nous souhaitons mettre fin à l'inaction de nos prédécesseurs pour nous réinvestir pleinement dans l'UNPS et nous emparer de l'intégralité des missions en réformant la méthode de travail. Nous devons être une force de collaboration et de proposition incontournable avec l'Assurance-maladie et le ministère.
Quels sont vos chantiers prioritaires pour ce mandat de deux ans ?
Je souhaite une simplification du système conventionnel interprofessionnel. Cela nécessite de revoir le chantier des négociations interprofessionnelles. On a aujourd'hui une espèce de balkanisation avec un accord-cadre interprofessionnel [ACIP] décliné en accords monoprofessionnels d'un côté et avec des accords conventionnels interprofessionnels (ACI) pour les maisons de santé et CPTS de l'autre.
Entre ces conventions, il y a des cloisons étanches. Ce qui fait qu'aujourd’hui, personne ne sait par quel bout prendre la rémunération de la coordination. Celle-ci existe dans certaines conventions monocatégorielles mais aussi un peu dans l'ACI des maisons de santé et celui des communautés professionnelles territoriales de santé. Au final, il y a des professionnels qui touchent quatre fois cette rémunération !
Ma deuxième priorité est la clarification du rôle de l'UNPS. La seule organisation intersyndicale représentative pour négocier les accords interpro doit être l'UNPS. Or, on a vu, dans les derniers projets de loi de financement de la Sécurité sociale, la volonté d'introduire autour de la table des négos la fédération des MSP ou celle des CPTS. Ces organisations ne doivent pas être des négociateurs car elles sont non représentatives des professions.
Prônez-vous la fin des conventions monoprofessionnelles ?
Non. Il y a un champ propre à chaque métier, il faut le préserver. Mais on doit réfléchir à un chemin qui nous permette de raisonner parcours de soins et actes partagés. C'est toute la difficulté des rémunérations au forfait qui arrivent ici et là.
Tant qu'on n'a pas une certaine homogénéisation entre nos conventions et une rémunération au même tarif pour des mêmes actes pratiqués par différents corps de métiers, cela ne pourra pas fonctionner. C'est absurde par exemple qu'une séance de rééducation urogynécologique ne soit pas payée le même prix en fonction que vous êtes sage-femme ou kiné.
Il y a une multiplication des transferts de compétences. Quelles solutions préconisez vous éviter les conflits ?
J'appelle à des états généraux de l'interpro pour réfléchir aux contours des métiers et aux partages des compétences. Cela permettra aux organisations syndicales représentatives, Ordres, Assurance-maladie et ministère de se mettre autour de la table. Si on n'est pas en capacité de prendre notre destin en main, c'est le législateur qui s'en emparera. C'est déjà le cas avec une série de lois et de budgets de la Sécu qui sont en train de déstructurer nos professions. J'ai été le premier à dénoncer la loi Rist avec l'accès direct aux kinés dans les MSP. Ce texte dit qu'un kiné qui exerce dans une MSP n'est plus doté des mêmes compétences que son confrère qui exerce en dehors. Cela n'est pas acceptable.
*Créée en 2004, l'UNPS regroupe des représentants de 23 syndicats représentatifs de libéraux de santé et représente 12 professions de santé, soit près de 500 000 professionnels libéraux : audioprothésistes, biologistes responsables, chirurgiens-dentistes, masseurs kinés, infirmiers, médecins, orthophonistes, orthoptistes, pédicures-podologues, pharmaciens titulaires d'officine, sages-femmes et transporteurs sanitaires
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