Sous le soleil d’Auxerre, la Fédération des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) attendait la venue de 800 adhérents pour ses journées nationales, les 11 et 12 octobre, avec l'ambition d'illustrer le dynamisme et la vitalité de ces pools de libéraux issus de la loi Touraine de 2016 et qui vont mailler progressivement la totalité du territoire français.
Prendre le maximum d'infos, partager les expériences
Parmi ces adhérents, une généraliste et une kiné de Levallois, venues pour la première fois à ce rendez-vous incontournable des CPTS. « Tout est nouveau pour nous, répondent-elles en chœur. Nous avons un projet de création et nous souhaitons prendre le maximum d’informations pour le monter ».
Un peu plus loin dans les allées bondées, un visage connu, le Dr Jacques Battistoni, ancien président de MG France et secrétaire général de la CPTS de Caen-Couronne. « J’attends ici le partage des informations et la mutualisation de nos expériences pour gagner du temps », confie le généraliste normand, détendu. Pour le syndicaliste, « le temps est venu pour les CPTS de s’approprier des missions et d’évoluer » à condition que la « dynamique qui est là » soit soutenue par les pouvoirs publics.
Souplesse
C’est bien ce message politique de « soutien » qu’attendait David Guillet, président de la Fédération des CPTS, en s’adressant ce mercredi à Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé. « Le chemin est forcément difficile car on demande aux professionnels d’en faire toujours plus en pleine crise démographique, explique l'infirmier libéral. Pour les généralistes, le retour à l’offre normale ne sera pas disponible avant 2040 et le récent échec des négociations conventionnelles a laissé des traces. Mais si les tutelles apportent le maximum de souplesse dans les critères de création et de suivi des CPTS, il est possible de réussir ».
Devant la ministre attentive, le patron de la Fédération a affiché sa fermeté sur le caractère non contraignant. « La CPTS est un système organisé dans lequel "aucune obligation de participer" est la règle. Ce qui fait de ce concept du volontariat le totem de la Fédération ».
La loi Valletoux, fausse inquiétude ?
La proposition de loi Valletoux sur l'accès aux soins était dans toutes les têtes. Pour encourager la coordination à l'échelle territoriale, le texte du député Horizons prévoit le rattachement automatique des libéraux aux CPTS « sauf opposition ». Or, « on ne fait pas fonctionner un pays avec des obligations, a cadré le Dr Claude Leicher, ex-président de la Fédération des CPTS et ancien patron de MG France, lui aussi présent. La notion de volontariat est centrale dans la constitution des CPTS. Contraindre à adhérer constituerait un dévoiement profond à la philosophie des CPTS, cela n’aura pas lieu ».
Agnès Firmin Le Bodo a tenté d’éteindre la polémique. « Je suis moi aussi contre l’obligation. Et dans la PPL Vallletoux, ce n’est pas une obligation d'adhésion qui est inscrite. On adhère à un projet que si on est volontaire. Cette mesure inquiète faussement », a-t-elle assuré, sous les applaudissements. Mais, « à un moment, nuance-t-elle, il faut faire prendre conscience de l’intérêt de cet outil qui permet de sortir de l’isolement, de mieux connaître les autres professionnels de santé et développer les projets dans les territoires ». Le développement de ces pools de libéraux participe pleinement à cette « mutation » organisationnelle des soins de proximité, ajoute la ministre.
Essoufflement, coquilles vides : les risques
Pour atteindre l’objectif ambitieux de 100 % de la population couverte par les CPTS d’ici à la fin 2023, fixé par le chef de l’État, Agnès Firmin Le Bodo promet le soutien « nécessaire » aux CPTS naissantes comme existantes. Selon le dernier bilan de la Fédération, il existe 732 communautés sur le territoire (soit une couverture de 75 % de la population) dont 103 en phase de pré-projet, 147 en construction de leur projet de santé et 64 en négociation de leur accord conventionnel interprofessionnel (ACI) avec la Cnam.
Pour accélérer la dynamique, la ministre compte « réunir et sensibiliser à nouveau les acteurs » puis « convenir d’un plan selon le tempo des professionnels impliqués ». Agnès Firmin Le Bodo s'est surtout engagée à ne pas multiplier les missions des CPTS, conformément à une recommandation du Tour de France piloté par la Dr Marie-Hélène Certain. « Les risques, c’est l’essoufflement ou les coquilles vides », admet-elle.
Deux principes clés doivent guider le déploiement des CPTS : fédérer tous les professionnels de santé du territoire dans les projets (libéraux au premier chef mais aussi salariés, hospitaliers, du secteur social et médico-social) et les soutenir à long terme. Pour la ministre, « le pari de l’organisation des libéraux est osé mais réussi. Mais il le sera totalement si on arrive à le faire vivre dans la durée ».
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