Votre conjoint (marié, pacsé ou en union libre) apporte à votre cabinet, entreprise libérale, sa contribution professionnelle de manière régulière sans percevoir de rémunération ? Pour l’accueil physique ou téléphonique, le secrétariat, la comptabilité, le ménage, etc. ? Si c’est le cas, la loi vous imposait depuis juillet 2007 de l’avoir déclaré auprès de l’Urssaf et de la Carmf sous le statut de « Conjoint collaborateur bénévole (CCB) » et de payer les cotisations afférentes afin de bénéficier des prestations et droits de ce statut.
Un statut limité dans le temps
Depuis le 1er janvier 2022, la loi limite désormais la durée de ce statut de CCB à cinq années, pour le basculer automatiquement sous le statut d’authentique salarié de votre cabinet au-delà, sauf pour les CCB qui prendront leur retraite avant le 1er janvier 2031. Notre conseil : c’est l’occasion de vous poser la seule bonne question en matière de gestion de ce poste professionnel : avez-vous vraiment intérêt à ce que la collaboration de votre conjoint reste bénévole ? Car comme nous l’avons déjà exposé dans ces colonnes, le statut de CCB, pour fort simple qu’il soit, est presque toujours très perdant d’un point de vue financier pour le couple concerné. C’est avant tout un statut de « facilité » minimal et de passivité, « choisi » dans l’écrasante majorité des cas sous la pression du très lourd arsenal répressif en cas de défaut de déclaration (voir infra).
Le statut de CCB est presque toujours très perdant d’un point de vue financier pour le couple concerné
Voici deux repères chiffrés édifiants du CCB : ces 12 dernières années, la cotisation du régime de retraite de base forfaitaire du conjoint a augmenté de 55 %, tandis que la cotisation minimale a subi une augmentation de 215 % sur la même période… Bref, l’option par défaut de ce régime à la Carmf coûte de plus en plus cher. Elle est même devenue bien plus chère (taux appliqué = 10,10 %) que la cotisation Carmf des médecins libéraux depuis le 1er janvier 2021 en secteur 1.
L’alternative gagnante au statut CCB
Pour les intérêts économiques et patrimoniaux bien compris du couple concerné, la collaboration de votre conjoint doit privilégier le cadre d’un authentique salariat, et le plus tôt possible. Ou, si vous exercez en société, s’inscrire dans le cadre d’associé de société de médecins. Avec deux orientations fortes dans tous les cas de figure.
1/ Il s’agit d’employer votre conjoint d’une part en bas salaire, et sous conditions précises, en vue d’entrer dans le cadre de l’appréciable réduction générale des charges sociales patronales. Et d’autre part, en captant les avantages fiscaux et sociaux attachés à l’épargne-entreprise menée en couple, qui doit être alors systématiquement mise en place par les conjoints, surtout en l’absence de salariés tiers. À ces conditions, vous disposerez d’une alternative infiniment plus efficace au statut CCB. Alternative que vous pourrez encore améliorer comme suit.
2/ L’emploi de votre conjoint devrait se faire, si possible, de façon financée par la CPAM, sous forme d’assistant médical subventionné (voir notre article QdM n° 9910). Et cerise sur le gâteau : cet emploi pourra bien sûr être optimisé par le déploiement d’une épargne salariale, si indication.
Il s’agira alors d’être bien conseillé dans le suivi de l’affaire par votre expert-comptable essentiellement, car la fonction de médecin-employeur soucieux de la rentabilité de son entreprise est complexe. Pour ne citer qu’un seul exemple : celui du temps de travail hebdomadaire minimal (24 heures théoriques) dépendant de la fonction du salarié selon la grille de la convention collective des cabinets médicaux, temps minimal qu’il est heureusement possible de réduire légalement si l’on est bien conseillé. Il s’agira aussi et surtout de raisonner sur le long terme : la nouvelle législation limitant le statut de CCB vous l’impose de toute manière.
Deux « avantages » du CCB à éviter
Le législateur a ajouté au statut CCB deux possibilités, présentées comme des avantages, qui selon nos observations, attirent quelques lecteurs :
● le CCB peut cotiser à titre personnel à une retraite complémentaire facultative dans le cadre de la loi « Madelin », ses propres cotisations étant déductibles selon les règles complexes du régime fiscal de la loi Madelin ;
● il peut aussi, toujours à titre personnel, cotiser à l’Assurance volontaire accident du travail (Avat), et sa cotisation est déductible des résultats de son conjoint. Notre avis – Ces deux possibilités sont des leurres : sauf rarissimes exceptions, cotiser délibérément vers un contrat Madelin à la Carmf est toujours perdant. Quant à l’Avat, elle n’apporte aucune protection réelle !
CCB non déclaré et travail dissimulé
Depuis la loi Pacte de septembre 2019, le CCB non déclaré est assimilé d’office à un salarié et l’employeur à un organisateur de travail dissimulé (avec reprise des cotisations dues sur cinq années en arrière, majorations et pénalités, et condamnation pénale de surcroît pouvant aller jusqu’à 45 000 euros d’amende). Une situation de travail dissimulé peut d’autant plus facilement se révéler par une dénonciation d’un tiers, qu’en pratique elle s’affiche le plus souvent au su et au vu de tous les patients depuis plusieurs années… Elle peut aussi se révéler par un accident assez grave frappant le collaborateur au cabinet, sur son « lieu de travail », sa mise en cause directe par un patient lors d’un problème médico-légal potentiel ou déclaré, une mésentente conjugale aboutissant à un divorce très contentieux, etc. sans parler du rôle amplificateur des réseaux sociaux.
Un avis, une question – Vous pouvez contacter plamperti@media-sante.com
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