Dans le cadre du Ségur numérique, l’État va prendre en charge la mise à jour des logiciels de gestion de cabinet pour les médecins avec des logiciels référencés. Où en est-on ?
Benjamin Luciani : Pour commencer, je rappelle que l’objectif du Ségur numérique est de généraliser le partage fluide et sécurisé des données de santé entre professionnels de santé et avec les patients, in fine pour mieux prévenir et mieux soigner. Cela passe en particulier par la mise à jour des logiciels des professionnels de santé, avec deux étapes : le référencement des solutions puis le déploiement des mises à jour.
Combien de logiciels sont actuellement référencés ?
B. L. : Nous avons déjà trois solutions référencées pour les logiciels de gestion de cabinet de médecine de ville par l’Agence du numérique en santé (ANS). Et le 15 juin était la date limite pour les éditeurs pour déposer leur dossier complet de preuve de référencement. Cela leur permettra de faire valoir que leur logiciel correspond à toutes les exigences Ségur. Nous en avons reçu une douzaine. Au total, nous aurons donc une quinzaine de solutions pour les médecins qui bénéficieront du référencement dans les prochaines semaines. La liste de toutes ces solutions référencées est disponible au fur et à mesure de la validation de leur dossier sur le site.
Qu’en est-il des éditeurs qui n’ont pas déposé de dossier ?
B. L. : Le marché des logiciels de ville est constitué de beaucoup de solutions mais qui n’ont pas forcément toutes beaucoup d’utilisateurs. Dans les 15 solutions référencées ou en cours de référencement, les solutions les plus utilisées actuellement par les médecins sont toutes au rendez-vous. Se pose la question des éditeurs n’ayant pas déposé de dossier au 15 juin. Pour ceux-là, nous mettrons en place, dans les prochaines semaines ou mois, un dispositif ad hoc pour permettre de faire valoir leur compatibilité avec les exigences Ségur et donc avec les futures obligations de l’avenant 9, toujours dans l’objectif d’avoir une offre logicielle Ségur la plus large possible. Mais ces solutions ne seront pas stricto sensu dans le dispositif tel qu’il est prévu aujourd’hui avec la prise en charge par l’État.
Les professionnels de santé craignent d’avoir, même pour les solutions référencées, un surcoût n’entrant pas dans la prise en charge du Ségur. Comment les rassurez-vous ?
B. L. : L’objectif, et c’est même une obligation réglementaire, est d’obtenir un reste à charge 0 pour les professionnels de santé, avec cependant quelques conditions à respecter. Par exemple, pour un logiciel qui serait obsolète, non mis à jour depuis de nombreuses années, et qui pourrait même présenter des risques sur le plan de la cybersécurité, le financement de l’État ne couvrira peut-être pas tout le besoin de « rattrapage ». Mais c’est loin d’être le cas général. En témoigne le nombre de médecins qui touchent aujourd’hui le volet structure qui impose déjà un certain niveau d’exigence concernant les logiciels.
Par ailleurs, sur les pratiques commerciales, nous sommes extrêmement attentifs à ce qui se passe sur le terrain. Nous avons ainsi eu l’occasion de faire des réunions bilatérales avec des éditeurs pour les amener à adapter leur offre commerciale lorsque celle-ci risquait d’être mal comprise, ou lorsqu’elle ne traduisait pas strictement le cadre réglementaire du Ségur. Mais, encore une fois, dans la grande majorité des cas, les choses se passent bien. La preuve : nous avons déjà plus de 25 000 médecins libéraux qui ont signé leur bon de commande auprès de leur éditeur pour bénéficier de la mise à jour Ségur. En cas de question, les médecins peuvent s’appuyer sur les conseillers informatique service de l’Assurance maladie, et même en cas de doute « signaler » leur devis sur le site de l’ANS.
Les médecins avaient jusqu’au 15 juillet pour signer le bon de commande auprès de leur éditeur. Cette date est finalement repoussée. Quel est le nouveau calendrier ?
B. L. : En effet, pour obtenir le financement par l’État, il fallait signer le bon de commande avant le 15 juillet 2022 et que l’installation soit terminée avant le 15 octobre. Nous avons établi un constat partagé avec l’ensemble de l’écosystème, celui du risque de ne pas atteindre une masse suffisamment critique dans ce calendrier, en particulier à l’hôpital et dans les laboratoires de biologie médicale. Nous avons également souhaité conserver l’esprit initial du programme, avec un alignement des calendriers pour embarquer un maximum de professionnels de santé de façon synchronisée dans ces usages d’alimentation du DMP. Nous venons en conséquence d’annoncer un nouveau calendrier : pour les « couloirs » des médecins de ville, comme pour l’hôpital, l’imagerie et la biologie médicale, l’éditeur a dorénavant jusqu’au 30 novembre 2022 pour déposer le bon de commande signé par le professionnel de santé et jusqu’au 28 avril 2023 pour réaliser l’installation. Ce délai supplémentaire doit permettre aux éditeurs référencés d’installer les mises à jour chez tous leurs clients. En bref, il ne s’agit pas d’aller moins vite mais d’aller plus loin.
L’avenant 9 à la convention médicale encourage l’alimentation du DMP dès 2022 ; un arrêté d’avril 2022 oblige l’alimentation du DMP, l’utilisation d’une messagerie sécurisée de santé… À partir du 1er janvier 2023, comment ce report s’intègre-t-il ?
B. L. : Cette décision d’octroyer un délai supplémentaire concerne plutôt les secteurs pour lesquels le déploiement est plus complexe, les laboratoires de biologie médicale, les hôpitaux ou les centres de santé. Nous sommes plutôt confiants sur le fait que les cabinets médicaux de ville auront déployé les mises à jour Ségur d’ici fin 2022. Sur l’obligation de partage de documents, nous allons continuer de suivre attentivement le déploiement des solutions Ségur dans les prochains mois. Si l’on devait prendre du retard, nous prendrions alors les dispositions nécessaires pour conserver la cohérence des textes réglementaires avec la réalité du déploiement.
Toutes ces dispositions concernent la première vague du Ségur. Qu’en est-il de la deuxième vague ?
B. L. : La première vague est très orientée sur l’alimentation de Mon espace santé. La deuxième vague portera sur la fluidification au maximum de la consultation de l’information pour les professionnels de santé. Les travaux ont déjà commencé à travers de nombreux ateliers de travail. Dans le contexte où nous donnons plus de temps pour la première vague, le calendrier est en train d’être retravaillé pour la deuxième vague.
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