Une enquête a été ouverte après la mort au CHU de Nantes de trois patients atteints d'un cancer et sous chimiothérapie, pour déterminer si le médicament de remplacement utilisé, faute d'approvisionnement du médicament généralement administré, leur a été fatal. Atteints de lymphome, les trois patients, décédés entre le 10 et le 13 novembre, étaient âgés de 61 à 65 ans. Un quatrième patient ayant suivi le même traitement est toujours hospitalisé. Les traitements avaient débuté fin octobre, avec des complications graves observées une douzaine de jours après.
Arrivée vendredi à Nantes, une équipe de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) enquêtait sur les médicaments administrés. Dans le cadre de leur cure de chimiothérapie intensive, les quatre patients ont reçu un traitement "comprenant le médicament cyclophosphamide en remplacement du médicament melphalan généralement utilisé", a précisé le ministère de la Santé, qui a saisi jeudi l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas) sur les causes de ces complications. Les premières conclusions sont attendues sous sept jours.
La décision des médecins du CHU d'utiliser la cyclophosphamide plutôt que le melphalan, généralement utilisé pour ce type de malades, a été motivée "par les tensions d’approvisionnement européennes sur le melphalan et leur choix de réserver les lots dont ils disposaient au traitement des patients atteints de myélome, indication pour laquelle il n’y a pas d’alternative", indique le ministère de la Santé.
Selon une source syndicale, des alertes ont été lancées depuis juin sur les difficultés d'approvisionnement du melphalan. Un comité technique d'établissement était réuni vendredi au CHU entre direction et organisations syndicales pour évoquer cette enquête. Selon l’ANSM, le phénomène des tensions d’approvisionnement et ruptures de stocks est "assez récurrent, pas nouveau" et "pas spécifique à la cancérologie". Un courrier de septembre de HAC Pharma, fabricant de melphalan, explique que l’approvisionnement depuis février "reste contingenté (…) aux seuls traitements des patients pour lesquels il n’y aurait pas de solution alternative et sans possibilité de les différer".
Le traitement par cyclophosphamide, a souligné le ministère de la Santé, "est validé par la communauté médicale" et a été "utilisé pendant des années pour la prise en charge des lymphomes". "Il est utilisé par d’autres établissements en France, dans le même contexte, sans que de telles complications aient été rapportées", a-t-il noté.
De son côté, le groupe pharmaceutique américain Baxter qui développe le produit sous le nom d'Endoxan® a indiqué avoir fourni des renseignements. "On verra l'issue" des enquêtes de l'Igas et de l'ANSM, a indiqué une porte-parole du laboratoire, précisant que trois produits d'autres laboratoires pharmaceutiques faisaient partie du protocole de chimiothérapie. Elle a aussi rappelé que l'Endoxan, mis sur le marché en France depuis 1994, est utilisé couramment dans les hôpitaux.
Selon le Directeur Général de la Santé, Benoît Vallet, l'Endoxan® est "connu pour donner des complications cardiaques, très rares, mais répertoriées". Ce médicament a donné pour trois patients "un effet cardiaque intense, conduisant aux décès". "La séquence de trois patients qui décèdent en quelques jours (...) nous amène effectivement à penser que nous sommes dans une situation pas habituelle", a-t-il dit sur France Inter.
Marisol Touraine est revenue sur cette affaire au Sénat vendredi, expliquant que, "à ce stade, rien ne permet d'accuser la cyclophosphamide, traitement validé par la communauté médicale et utilisé depuis des années" dans le décès de trois patients traités pour des lymphomes au CHU de Nantes. "Le spectre des causes potentielles est large, il ne faut ni en écarter, ni en privilégier aucune", a poursuivi la ministre de la Santé, en citant comme causes possibles "médicament, protocole, mode d'administration...".
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