Les patients sont-ils en partie responsables de l’engorgement des urgences, et indirectement de la crise qu’elles traversent actuellement (255 services sont toujours en grève selon le collectif Inter-Urgences) ? Depuis le début de ce mouvement social, l’éducation des patients est, en effet, fréquemment citée parmi les axes d’amélioration qui permettraient de soulager les services hospitaliers.
Début septembre, le Dr Matthieu Calafiore, directeur du département de médecine générale de la faculté de Lille, avait ainsi expliqué au Généraliste qu’il était nécessaire « d’apprendre [aux patients] quels signes doivent faire consulter en urgence et quels sont ceux à surveiller ».
« Aucune responsabilisation du patient »
Titillé jeudi lors des "Contrepoints de la santé" sur la part de responsabilité des médecins généralistes, le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, a également plaidé en faveur d’une meilleure éducation des patients. « Nous sommes prêts à prendre en charge les soins non programmés en ville, avec une régulation libérale via le 116 117. Mais nous demandons une majoration de 15 euros par acte régulé qui nous est refusée ! », s’est-il défendu. « Nous avons le tarif de consultation le plus bas d’Europe, la désertification augmente à vitesse galopante et on nous dit que c’est de la faute des libéraux si les gens s’entassent aux urgences. Mais je regrette, il n'y a aucune régulation, aucune éducation, aucune responsabilisation du patient », a ensuite asséné le président de la FMF.
Présent également, le Dr François Braun, président de Samu-Urgences de France, a quant à lui précisé que les responsabilités étaient partagées. « La volonté d’avoir tout, tout de suite, est une volonté de société ».
Un sondage BVA* présenté lors de ce débat est pourtant venu nuancer légèrement ce constat.
Certains « fantasmes » balayés
Selon celui-ci, deux tiers des Français (66 %) affirment ainsi « penser en priorité à leur généraliste en cas d’urgence non vitale ». 17 % des répondants ont le réflexe de composer le 15 et 11 % pensent à se rendre directement à l’hôpital. Le sondage révèle également qu’à choisir entre une consultation chez leur médecin famille et les urgences, 92 % des sondés favorisent la première solution. Si ces chiffres démontrent que les Français ne raffolent pas tant des urgences, les résultats ne permettent pas d’évaluer la connaissance de la population des différentes alternatives aux urgences proposées par la médecine de ville.
Selon, Odile Peixoto, Directrice BVA Santé, ce sondage balaie en revanche certains « fantasmes » sur le recours aux urgences. Interrogés sur leur dernier passage aux urgences, près de la moitié des sondés (49 %) indiquent s’y être rendus car ils estimaient que leur mal « était grave et ne pouvait être pris en charge qu’à l’hôpital ». 34 % affirment quant à eux qu’ils « n’avaient pas le choix ». La gratuité (2 %), le fait que ce soit plus pratique (2 %) et la certitude de voir un médecin, même s’il y a de l’attente (6 %) sont, contrairement à certaines idées reçues, minoritaires.
« On doit donner le mot d’ordre suivant aux Français : Avant de vous déplacer, appelez ! », a estimé le Dr Braun à la lecture de ces résultats. Et celui-ci de poursuivre : « C’est par la régulation médicale qu’on va construire votre parcours de soins adapté, en fonction des joueurs qu’on a dans l’orchestre. Il y a des maisons médicales, des généralistes qui répondent jusqu’à minuit… » Interrogé sur l’opportunité d’interdire l’accès aux urgences aux personnes n’étant pas passées par une régulation, le Dr Braun a cependant rejeté cette éventualité. « Il y a toujours des victimes d’infarctus qui arrivent sur leurs jambes, sans avoir été régulées », a-t-il conclu.
* Sondage BVA pour les Contrepoints de la santé mené en ligne du 11 au 13 septembre auprès d’un échantillon représentatif de 1001 français âgés de 18 ans et plus.
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