Qui ne se souvient du tapage occasionné fin 2016 par François Fillon ? Alors candidat officiel de LR à la magistrature suprême, l’ancien Premier ministre avait proposé de réduire l'assurance-maladie (AMO) à la couverture du « gros risque », ouvrant la porte à une intervention accrue des complémentaires (AMC). Cinq ans plus tard, la majorité présidentielle esquisse un scénario à peu près inverse, suggérant une Grande Sécu, censée élargir le champ d’intervention de l’AMO, au détriment de l’AMC. La pandémie de Covid est passée par là et explique peut-être le déplacement du curseur. À preuve, la contre-attaque de Xavier Bertrand, voyant dans ce projet une « médecine à deux vitesses » qui, selon lui, ruinerait les Français, tout en augurant de déremboursements en cascade.
La critique est facile, mais l'art… À droite, cette précampagne des primaires ne s’est pas illustrée par des propositions bien neuves concernant la santé. On peut même dire qu’à l’exception de Philippe Juvin, seul médecin de ce huis clos électoral, chacun s’est évertué à parler d’autre chose, comme si, à l’aube de cette cinquième vague, l'opposition craignait de s’aventurer sur un terrain aussi mouvant. La primaire de LR aura accordé des places de choix à la sécurité, à l’immigration ou au pouvoir d’achat. Mais de questions sanitaires, il fut peu question. Hormis quand le sujet permettait de revenir… aux chapitres régaliens. Ainsi, la plupart se font fort de tordre le cou à l’aide médicale d’État, une AME accusée d'entretenir un tourisme médical qui ne dit pas son nom. On a aussi tiré sur « les salles de shoot », certains promettant de mettre un terme à ces expérimentations, sitôt franchi le seuil de l’Élysée. Et la crise sanitaire a surtout été abordée sous le prisme de la situation insurrectionnelle en Guadeloupe. Au-delà, beaucoup veulent « débureaucratiser » la santé, en donnant la part belle à la gouvernance médicale dans les hôpitaux ou aux élus de terrain pour contrôler les ARS. Et bien sûr, chacun assure avoir trouvé la solution pour résoudre l’équation des déserts médicaux. Avec des moyens divers : docteurs juniors envoyés en mission dans les zones sous-denses pour Philippe Juvin, zéro paperasse pour Xavier Bertrand, coup d’accélérateur sur les MSP pour Valérie Pécresse…
Tout cela ne fait pas, pour l’heure, une politique de santé. Il est vrai qu’à ce stade, il pourrait être imprudent pour un candidat de griller toutes ses cartouches en proposant, ici et maintenant, un programme complet de législature. La campagne sera longue et il sera toujours temps d’aborder ces thématiques qui passionnent visiblement davantage le Français moyen que l’adhérent de base LR. Attention toutefois à y penser à temps. Car les non-dits ont été parfois à l’origine de fâcheux malentendus. Les médecins libéraux se rappelleront encore longtemps la surprise du Plan Juppé. Et les praticiens hospitaliers n’ont toujours pas digéré le virage de la loi HPST. À la dernière présidentielle, une majorité du corps médical a boudé pour la première fois la droite pour lui préférer Macron. Allez savoir pourquoi…
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