C'est un peu l'éléphant dans la pièce du rapport que le Haut Conseil pour l'avenir de l'Assurance-maladie (Hcaam) a mis en ligne sur les « quatre scénarios polaires d’évolution de l’articulation entre Sécurité sociale et Assurance maladie complémentaire ». Aucun d'entre eux – ni celui sur la Grande Sécu qui a fait couler beaucoup d'encre depuis les premières fuites sur le rapport, ni les trois autres, ni même l'annexe ajoutée in extremis sur le bouclier sanitaire – n'intègre dans sa réflexion les dépassements d'honoraires. Ceux-ci seront, en revanche, bel et bien au programme de travail de cette instance de réflexion pour l'année à venir, à la demande notamment de la CGT et du Medef.
Pour l'instant, le Hcaam a pris la question de l'égalité d'accès aux soins par un seul bout. « Certes le ministre a manifesté au détour d'une phrase son intérêt pour la Grande Sécu, a glissé Pierre-Jean Lancry, vice-président du Hcaam lors d'une rencontre organisée ce lundi par l'Association des journalistes de l'information sociale. Mais il nous a d'abord demandé de mesurer l'impact pour les assurés de pistes d'amélioration du lien entre l'Assurance-maladie obligatoire (AMO) et les complémentaires (AMC). Aujourd'hui 96 % des assurés ont une complémentaire mais 13 % des plus précaires en sont dépourvus. »
En sont sorties quatre possibilités : améliorer le cadre actuel (le bouclier sanitaire étant traité en annexe), rendre la complémentaire obligatoire pour tous à l'instar des salariés et bientôt des fonctionnaires, créer une Grande Sécu, donc, aux remboursements étendus ou encore confier à l'AMO et aux AMC des paniers de soins différents.
Estimation fragile des dépassements
« Il demeure un problème qui existe toujours et qui n'est pas résolu, c'est celui des dépassements d'honoraires, a admis Pierre-Jean Lancry. C'est un point qui reste à étudier mais qui, de toute façon, n'aurait été réglé par aucun scénario ». Un sujet majeur absent du tableau par construction mais aussi faute d'information : environ 1,4 milliard d'euros de compléments d'honoraires (sur un total proche de 3,2 milliards) seraient remboursés par les AMC. « Ce n'est qu'une estimation dont nous disposons mais qui est trop fragile » indique le vice-président du Hcaam.
Autre problème, certains dépassements étant par définition non régulés, prévoir leur remboursement par l'AMO et les AMC, quelle qu'en soit l'articulation, comporte un risque « risque d'inflation » insiste le Hcaam.
Surcomplémentaire ?
Faudrait-il des « surcomplémentaires » pour rembourser demain tout ou partie des dépassements tarifaires, s'interroge Pierre-Jean Lancry ? Le Hcaam n'y fait que brièvement référence dans son scénario sur la complémentaire généralisée obligatoire. Il y relève, à cet endroit, que dans cette hypothèse des « dispositions devraient être prévues pour éviter les garanties aux effets trop inflationnistes sur les tarifs des soins et pour éviter des phénomènes de sélection des risques ».
Le risque de médecine à deux vitesses a précisément été pointé par plusieurs syndicats de médecins libéraux, notamment la CSMF, dans le scénario de Grande Sécu consistant à l'extension du champ du 100 % AMO. « Ce risque existe déjà entre ceux qui ont des complémentaires proposant une plus ou moins grande couverture », objecte Pierre-Jean Lancry.
D'où l'intérêt pour la profession des prochains travaux du Hcaam sur les dépassements. « Ce sera vraiment un travail détaillé d'analyse des dépassements par spécialité qui nous permettra de voir s'il pourrait être nécessaire d'augmenter les remboursements de l'AMO pour certains », promet Nathalie Fourcade, secrétaire générale du Hcaam. Cette revue tarifaire réalisée, probablement faudra-t-il, à ce moment-là, remettre les quatre scénarios sur l'ouvrage.
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