Le Syndicat des médecins libéraux (SML) réunit ses cadres, ce week-end à Nice, après un revers aux dernières élections professionnelles. Pour son président, le Dr Philippe Vermesch, l'heure est à la « remobilisation » des troupes et à la reconquête des jeunes. Face à l'« urgence » démographique, le stomatologue réclame des mesures immédiates pour l'attractivité de la médecine libérale dont la généralisation des stages en ville et la consultation de base à 40 euros. Il annonce aussi un rapprochement avec la FMF.
LE QUOTIDIEN : Quel est l'état d'esprit des troupes, à l'ouverture des Journées du SML ?
Dr PHILIPPE VERMESCH : Les cadres sont déçus. Les mauvais scores aux élections professionnelles [9,5 % chez les généralistes, 12 % chez les spécialistes, NDLR] ont été mal vécus. D'où ces Journées du SML pour remobiliser les troupes autour de plusieurs priorités claires.
La première concerne la vie syndicale. Les élections ont montré que le SML avait perdu des voix chez les médecins généralistes. C'est pourquoi nous devons restructurer les départements et labourer le terrain pour rendre le syndicat plus lisible notamment chez les jeunes. Ce travail en interne vise à regagner la confiance des médecins pour les prochaines élections professionnelles. Nous contestons au passage la décision du gouvernement de ne pas reconnaître la représentativité du SML dans le collège des généralistes. L'État s'est basé sur le seul résultat du vote [moins de 10 %] alors que le syndicat avait satisfait à d'autres critères légaux comme l'indépendance financière, le nombre d'adhérents, l'ancienneté… Notre recours a été déposé en août.
Pendant ces trois jours, j'ai privilégié les échanges directs entre adhérents sur l'avenir du métier. Je n'ai pas voulu inviter le ministre de la Santé. Seul Thomas Fatôme, directeur général de l'Assurance-maladie, notre partenaire conventionnel, sera présent pour répondre aux interrogations des médecins. Il devra s'expliquer sur le dispositif d'indemnisation de la perte d'activité (DIPA), sur l'avenant 9 que le SML n'a pas signé cet été, sur les équipes de soins coordonnées autour des patients (ESCAP) ou encore sur la future convention médicale.
Sur ce dernier point, un groupe de travail devrait se mettre en place en début d'année prochaine. Le SML va s'y préparer pour arriver avec un projet libéral « ficelé ». La prochaine convention médicale doit répondre aux problèmes d'attractivité de la médecine libérale, notamment pour faire face au creux démographique à venir.
Envisagez-vous des rapprochements, voire une fusion, avec d'autres syndicats ?
Nous avons commencé à travailler avec la FMF [Fédération des médecins de France, Ndlr] sur une défense commune. Nos deux syndicats souhaitent collaborer, voire se remplacer, dans les commissions paritaires locales (CPL) et dans les commissions paritaires régionales (CPR). Par ailleurs, nous envisageons d'élaborer des propositions communes pour la future convention médicale. La FMF doit encore valider cette stratégie lors d'une assemblée générale en octobre. Pour le moment, nous n'avons pas de contacts avec l'UFML-Syndicat.
Que pensez-vous du dernier budget de la Sécurité sociale du quinquennat pour la médecine libérale ?
Rien de bon ! Les signaux sont inquiétants. Encore une fois le budget de la Sécu privilégie l'hôpital au détriment de la médecine libérale. Pis, contrairement aux promesses d'Olivier Véran lors de l'Université d'été de la CSMF, le texte poursuit sur la voie des délégations de tâches. Les ophtalmologistes sont vent debout contre la mesure qui autorise l'accès direct aux orthoptistes – sans prescription médicale préalable – pour les bilans visuels simples mais aussi les prescriptions d'aides visuelles pour les corrections faibles.
Pour éviter ces pratiques imposées d'en haut, le SML commence à réfléchir avec trois syndicats d'infirmiers, de pharmaciens et de kinésithérapeutes sur les périmètres des métiers. Cela devrait aboutir à un projet que nous soumettrons aux autres instances comme l'UNPS [Union nationale des professionnels de santé].
Au-delà de l'épidémie, quelle est l'urgence sanitaire pour le SML ?
L'urgence est la démographie médicale. Si le gouvernement veut lutter contre les déserts, il faut prendre des mesures immédiates pour rendre attractive la médecine libérale. L'État doit rendre obligatoire les stages en ville pour toutes les spécialités permettant aux jeunes de mieux connaître l'exercice libéral. Il doit aussi développer des passerelles pour permettre aux infirmiers ou aux sages-femmes de rentrer directement en troisième ou quatrième année de médecine.
Et il faut bien sûr revaloriser la valeur des actes : pour nous, la consultation de base doit être à 40 euros. Quant aux actes techniques, leurs tarifs devraient être réévalués tous les ans en fonction du coût de la vie, en attendant la réforme pilotée par le Haut Conseil de la nomenclature.
Qu'attendez-vous de la prochaine élection présidentielle ?
Nous allons rencontrer les principaux candidats à partir de janvier 2022. Nous souhaitons les interpeller pour savoir comment ils voient le système de santé français, qui est en train de régresser. Et puis, on verra s'il y en a un qui sort du lot avec une réelle vision de la place de la médecine libérale. Aujourd'hui, la médecine de ville soigne 70 % des Français. C'est elle qui sauvera la santé en France, et non pas l'hôpital.
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