Médecine libérale

PLFSS, convention, exercice : la profession à l'offensive pour obtenir une année utile

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Publié le 17/09/2021
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En ordre dispersé, les syndicats de praticiens libéraux réfléchissent déjà à des pistes d'évolution de la profession, avant la reprise de la négociation de la future convention dans un an. Mais sans attendre, ils veulent faire des mois précédents la présidentielle un « temps utile ».

Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Entre sujets immédiats de crispation et préparation des futures échéances, c'est une rentrée plutôt tonique qui a lieu en médecine libérale.

Alors que la négociation de la future convention médicale n'interviendra pas avant le second semestre 2022, les syndicats veulent absolument garder la main sur les semaines et les mois à venir, avec un double agenda en toile de fond : l'examen du budget de la Sécurité sociale 2022 à l'automne et l'élection présidentielle où la santé, Covid oblige, devrait prendre une place inédite.

La gestion de crise sanitaire par le gouvernement a laissé des traces chez les libéraux : de l'absence de moyens de protection en ville (initialement) aux interrogations des patients perdus dans les débats scientifiques, en passant par la campagne de vaccination et la logistique chaotique… « Rien ne nous a été facilité », a martelé le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, lors de son Université d'été à Antibes, le week-end dernier. La rentrée a été alourdie par les invectives et menaces récurrentes contre de nombreux soignants, dans le cadre de la mobilisation vaccinale. Plusieurs médecins – dont le président de l'UFML-S, le Dr Jérôme Marty – sont régulièrement ciblés par des appels à la haine voire des menaces de mort.

Fronde sur le DIPA

Dans ce contexte, les réclamations d'indus au titre du dispositif d'indemnisation pour perte d'activité (DIPA) à cause du Covid ont poussé les syndicats de médecins libéraux à monter au créneau pour demander des explications à la CNAM. La FMF a contesté le mode de calcul de ce « trop-perçu ». L'UFML a même parlé d'« arnaque ». MG France, le SML et la CSMF ont embrayé en réclamant la transparence sur les chiffres alors que 15 000 praticiens sont concernés par ces remboursements à la Sécu.  

Un autre foyer d'incendie pointe sur la question des tarifs des visites à domicile. Alors que l'avenant 9 signé fin juillet par trois syndicats majoritaires (CSMF, MG France et Avenir Spé-Le BLOC) a acté l'extension de la visite longue (VL) à 70 euros aux patients de plus de 80 ans en ALD, ce texte fait l'objet de très vives critiques. À défaut de revalorisation, l'UFML envisage d'« arrêter les visites à 35 euros », alors que SOS médecins a annoncé de son côté une journée d'arrêt total d'activité (certaines associations lançant des actions locales).  

Haro sur les délégations de tâches

À l'approche de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) en conseil des ministres le 24 septembre, les syndicats redoublent de vigilance. Quelles seront les marges de manœuvre financières pour le secteur libéral, qui attend toujours un choc d'attractivité ? « Ce budget comportera-t-il des mesures qui risquent d'impacter l’organisation de la médecine de ville, son indépendance et sa viabilité ? », s'interroge le SML. 

La question des délégations de tâches « sauvages » vers d'autres professions est dans les esprits. « Nous ne sommes pas opposés par principe aux délégations, explique de son côté le Dr Battistoni, président de MG France. Mais cela doit se réfléchir dans un cadre organisé et concerté et non au travers d’amendements poussés par les différentes professions ». Le syndicat de généralistes réclame un « moratoire » sur ces délégations. Il compte aussi peser sur d’autres sujets, notamment l’amélioration des congés maternité et paternité des libéraux ou l’extension de la permanence des soins ambulatoires (PDS-A) au samedi matin. 

Une convention « restructurante »

Mais le véritable horizon syndical reste la future convention médicale, qui sera négociée dans un peu plus d'un an. Se posant en « syndicat responsable et bâtisseur », la CSMF considère que l'avenant 9, étape nécessaire, n'a pas répondu aux attentes légitimes de la médecine libérale. Pour que la médecine de ville ait son « Ségur ambulatoire », la nouvelle convention devra être « restructurante et simplifier l'exercice », anticipe le Dr Jean-Paul Ortiz. En interne, la CSMF planche déjà sur la création d'un statut médical unique, la simplification de la nomenclature et le développement des équipes de soins spécialisés. L'approche de la campagne présidentielle permettra aux syndicats de tester leurs propositions à travers les plateformes santé des candidats. MG France pousse de son côté ses idées dont celle, déjà ancienne, d’une « prise en charge à 100 % des soins primaires » par l’Assurance-maladie obligatoire.

Thomas Fatôme, directeur général de la CNAM, a toutefois prévenu. L'Assurance-maladie va sortir « éreintée » sur le plan financier de la crise sanitaire, avec un déficit « abyssal » : 30 milliards en 2020, autant en 2021 et probablement 22 milliards en 2022. Le temps des vaches maigres ?

Loan Tranthimy et Véronique Hunsinger 

Source : Le Quotidien du médecin