Reconnaissance automatique du Covid en maladie professionnelle : les médecins libéraux exaspérés par l'attente

Par
Publié le 23/06/2020
Article réservé aux abonnés

Crédit photo : PHANIE

La reconnaissance « systématique et automatique » du Covid en maladie professionnelle pour tous les soignants contaminés tarde à se mettre en place.

Cette promesse a pourtant été faite le 21 avril par Olivier Véran devant l'Assemblée nationale – puis précisée par le directeur général de la santé (vidéo ci-dessous). Cette reconnaissance automatique doit permettre aux praticiens tombés malades de prétendre à une prise en charge des frais médicaux à 100 % et à une indemnisation en cas d'incapacité temporaire ou permanente (sans avoir à démontrer qu’ils ont été infectés sur leur lieu de travail ou à produire une assurance facultative).

Détresse

Las, aucun décret n'a encore ét publié pour concrétiser cet engagement et la prise en charge en maladie professionnelle des soignants tombés malades. 

Pire, selon l’Union française pour une médecine libre (UFML), la famille d’un praticien décédé du Covid a reçu un courrier de sa caisse primaire indiquant un refus complet de prise en charge, faute d’adhésion du médecin à une assurance volontaire (AVAT) couvrant le risque accident de travail et maladies professionnelles (AT/MP).

De fait, les médecins libéraux conventionnés sont couverts par le régime de Sécurité sociale des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnées (PAMC), qui exclut le risque AT/MP. D'où la souscription requise, de façon facultative, d'une assurance volontaire accident du travail (AVAT). « 90 % de la profession n’est pas au courant et se pense couverte pour le risque accident du travail », souligne le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML Syndicat.

Pour concrétiser la reconnaissance automatique en maladie professionnelle pour les libéraux, deux textes réglementaires sont attendus. Il s'agit d'inscrire le Covid-19 au tableau des maladies professionnelles et de spécifier la reconnaissance automatique pour tous les soignants (même s’ils n’ont pas d’assurance volontaire).

Revoir le contrat conventionnel

Dénonçant un « mépris » pour les libéraux, l'UFML réclame la « publication immédiate » du décret de prise en charge en maladie professionnelle des praticiens malades du Covid. La fin du régime spécial des PAMC est aussi demandée. « Le contrat liant les médecins conventionnés et l’assurance-maladie est devenu un contrat léonin (...) Année après année, on s’aperçoit que les tarifs n’ont pas augmenté et on nous dit qu’on ne cotise pas assez pour être pris en charge du risque maladie professionnelle. C’est devenu un piège », tempête le Dr Marty.

De son côté, la Fédération des médecins de France (FMF) trouve regrettable les atermoiements de l'exécutif. « Tant que les textes ne sont pas publiés, les caisses continueront à demander la preuve de l’adhésion à cette assurance volontaire pour indemniser. C’est dommage pour les médecins et leurs familles car les dossiers sont bloqués », explique le Dr Richard Talbot.

Le DG de la CNAM s'engage 

La question a été posée à Nicolas Revel, directeur de CNAM, lors de la dernière commission paritaire nationale avec les syndicats mi-juin. « Il nous a assuré que le dossier suivait son cours », ajoute le Dr Talbot. En avril, Nicolas Revel avait promis dans un tweet que la prise en charge des soignants serait bien une couverture universelle sans condition d'assurance volontaire ou d'adhésion.

La pression syndicale fera-t-elle accélérer ce dossier ? Interrogé à l’Assemblée le 16 juin, Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État désormais chargé de la protection de la santé des salariés contre l'épidémie de Covid-19, a encore assuré que « des décrets » seraient présentés « dans les jours qui viennent » sur la reconnaissance du Covid-19 en maladie professionnelle. En attendant, les syndicats conseillent aux médecins libéraux concernés et à leurs familles de préparer leurs dossiers. 


Source : lequotidiendumedecin.fr