Soins au domicile pour les patients en ALD

À Bergerac, la CPTS ose la téléconsultation

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Publié le 20/02/2020
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Généralistes et infirmières de la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Bergerac (Dordogne) teste depuis cinq mois la téléconsultation à domicile pour les patients âgés ne pouvant se déplacer. 40 malades ont bénéficié de cette prise en charge inédite.

La communauté est bien structurée grâce aux libéraux de la maison et du pôle de santé

La communauté est bien structurée grâce aux libéraux de la maison et du pôle de santé
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Zone sous-dotée en médecins et à population âgée, le Bergeracois (Dordogne) cumule les handicaps dans l’accès aux soins : difficulté de déplacement des patients âgés en ALD et manque de temps des médecins pour assurer les visites à domicile… Face à cette situation et pour éviter les renoncements aux soins, la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Bergerac a décidé d’expérimenter la téléconsultation au domicile du patient.

« Nous voulions des téléconsultations de qualité et dans un total respect du parcours de soins » – c'est-à-dire dans le cadre de l'avenant 6 à la convention médicale –, souligne Laëtitia Carlier, infirmière et présidente de cette grande CPTS*, isolée mais bien structurée grâce au pôle de santé antérieur. Utilisée de façon ponctuelle et hors situation d’urgence, cette pratique à distance est réservée aux patients extrêmement dépendants, qui présentent une pathologie chronique prise en charge au titre de l’ALD, intégrés au programme avec leur accord par leur médecin traitant.

Avant de se lancer, la CPTS a planché sur l’organisation administrative, juridique (consentements des patients, des familles, des infirmières de ville, etc.) et technique de l’opération. Près d’un an de travail ! « Sans parler de la recherche de financement ! », précise Laëtitia Carlier. Pour mener à bien l'expérience, les porteurs de projet ont reçu 6 000 euros de l’ARS, 6 000 euros de la Région et 5 000 euros de l’association e-santé et territoire pour l'achat du matériel adéquat et la rémunération des infirmières. En cas de succès, l'assurance-maladie pourrait prendre le relais (financement, déploiement) au bout d'un an de test. 

L’expérimentation a démarré le 9 septembre. Le mode opératoire est simple : une infirmière spécialement formée vient au domicile du patient 30 minutes avant le début de la téléconsultation avec son matériel (tablette, ordinateur, webcam). Elle recueille les constantes du patient et les transmet au médecin via la messagerie sécurisée PAACO, en lui demandant de se connecter. La téléconsultation dure 15 à 20 minutes, puis le médecin rédige son ordonnance. La e-transmission au pharmacien n’étant pas encore en place, l’ordonnance est récupérée par l’infirmière qui fait le lien avec l’officine. Ces téléconsultations ont été menées par cinq généralistes et cinq infirmières testeurs de la CPTS. Une quarantaine de patients en ont bénéficié.

Comme le sans contact

« Les retours sont extrêmement positifs, se félicite Laëtitia Carlier. Les patients ont le sentiment d’être mieux écoutés ; l’écran leur donne l’impression d’un contact plus long et permanent avec le regard du médecin. Ils ressentent plus d’attention. L’infirmière, elle, se positionne derrière le patient pour ne pas interférer dans cet échange. Quant aux médecins, tous ceux qui ont fait une téléconsultation ont envie de continuer. » Seules contraintes : être à l’heure et apprendre à se connecter avec un réseau internet souvent capricieux en Bergeracois.

« La téléconsultation est plus posée, confirme le Dr Benoît Blanc, généraliste. Préparée par l’infirmière avec les aidants, elle implique davantage l’entourage du patient et permet une gestion plus collaborative de la pathologie que j’apprécie. Surtout, elle évite les ruptures du parcours de soins, souvent dues à l’indisponibilité du médecin. Elle améliore ainsi la prise en charge des patients lourds, rassurés de pouvoir accéder facilement à leur médecin. Quant aux confrères, si certains encore sont réticents, ils évolueront comme avec le sans contact : au début on se méfie, après on ne peut plus s’en passer. »

* 113 professionnels de santé (26 généralistes, 19 spécialistes, 21 pharmaciens, 29 infirmières, 6 dentistes, 12 kinésithérapeutes) sur 38 communes pour une population de 68 000 habitants

 

De notre correspondant Patrice Jayat

Source : Le Quotidien du médecin