La CSMF accuse la ministre de nier l’opposition médicale

Chassang : « Roselyne Bachelot perd pied ! »

Publié le 08/10/2010
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Crédit photo : S TOUBON

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LE QUOTIDIEN - Dans « Le Figaro », Roselyne Bachelot estime que les médecins libéraux n’ont nullement désavoué sa politique de santé. Vous n’avez-pas la même lecture du scrutin…

DR MICHEL CHASSANG - Je suis stupéfait des propos de la ministre qui témoignent d’un déni de démocratie. C’est insupportable ! La CSMF a remporté ces élections. Elle obtient à elle seule 434 sièges sur les 1 124 sièges que comporte cette élection. Elle a gagné y compris dans le collège généraliste (la CSMF devance MG-France en nombre de sièges mais pas en nombre de voix). Franchement, il est temps que ce gouvernement reconnaisse les résultats et que Roselyne Bachelot admette que ceux qui ont fait campagne contre la politique gouvernementale et la loi HPST ont obtenu 60 % des sièges et presque autant en voix. Nous avions posé une question aux médecins. Stop ou encore ? Les médecins ont répondu stop.

Roselyne Bachelot affirme que les médecins ne se sont pas déterminés sur un critère politique...

Je ne vois pas comment les médecins pourraient ne pas se déterminer sur un critère politique puisque nous avons axé exclusivement la campagne sur ce point. J’accuse la ministre de la Santé d’autisme et, à la limite, de malhonnêteté dans l’interprétation des chiffres. Oui, il y a bien un problème politique entre le gouvernement et les médecins. Oui, le fossé se creuse ce qui exige un changement de cap immédiat.

L’analyse des résultats par collège n’est-elle pas légitime dès lors que le vote avait lieu par collège ?

Je rappelle qu’il y a des assemblées uniques aux URPS. C’est la majorité de l’union qui déterminera la politique de l’URPS dans chaque région. On ne peut pas mettre sur un même pied d’égalité les 434 sièges de la CSMF plus les 235 sièges du SML, soit 669 sièges, avec les 92 sièges du BLOC. Le faire, c’est malhonnête ! La ministre a orchestré la division du corps médical et se livre à une lecture partiale résultats, pour masquer la victoire politique de ses opposants. Nous, nous réclamons une réponse politique.

Avez-vous parlé à Roselyne Bachelot depuis les résultats ?

Certainement pas. Elle m’a téléphoné et je ne l’ai pas prise au téléphone.

Vous exigez un changement de cap immédiat. Par quelles mesures urgentes doit-il se traduire ?

J’ai demandé à la majorité parlementaire UMP de « nettoyer » la Bachelot dès le PLFSS 2011 [projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui sera discuté dans quelques semaines]. Pendant la campagne, nous avons avancé douze mesures (sur l’ONDAM, la suppression de l’obligation du signalement d’absences, la RCP, la fin des stabilisateurs automatiques...). Il n’est pas question pour la CSMF de participer à quoi que ce soit, y compris aux négociations conventionnelles, tant que ces préalables ne sont pas levés.

Autre chose : nous avons appris qu’à la faveur d’un article du PLFSS, le gouvernement pourrait « bricoler » la nomenclature des actes. En clair, il aurait pouvoir de modifier unilatéralement la nomenclature. C’est un casus belli. Sur la retraite enfin, nous demandons aux sénateurs de revenir sur le vote ridicule des députés qui veulent faire trimer les médecins libéraux jusqu’à 67 ans, avec le soutien de la ministre de la Santé. Je mets les médecins à témoin. Roselyne Bachelot perd pied. Et au lieu de reconnaître les résultats du suffrage universel, elle essaie de faire croire que tout cela n’existe pas.

Vous demandez son départ ?

Nous demandons un changement de cap qui passe par un changement de politique. La ministre actuelle est-elle capable de porter ce changement ? C’est à Nicolas Sarkozy de répondre. Mais je lui dis que la voie politique actuelle en matière de santé est très mauvaise et dangereuse. Un signal fort a été donné. Il doit en tirer les conséquences.

La hausse du C à 23 euros est confirmée pour le 1er janvier. Vous n’y croyez toujours pas ?

Je le croirai le jour où elle sera appliquée. D’ici-là, le combat tarifaire doit continuer plus que jamais. Nous demandons à tous les médecins de prendre le C à 23 euros et le C2 à 46 euros. Et nous nous chargeons de les défendre.

Votre partenaire historique, le SML, devient la deuxième force syndicale. Allez-vous constituer avec lui une alliance nationale pour les URPS et la convention ?

En dépit de notre très bon score, nous serons contraints à des alliances, que ce soit dans les régions ou dans une éventuelle négociation conventionnelle. Nous formulerons officiellement une demande d’alliance au SML. Nous tendrons naturellement la main à notre partenaire historique. D’autant que nous venons de construire ensemble 100 propositions pour rénover l’exercice libéral. Dans les régions, il est difficile de vendre la peau de l’ours. Mais nous sommes en mesure, avec un accord de partenariat, de pouvoir présider la quasi-totalité des unions.

Comment voyez-vous la reprise des négociations conventionnelles dans cette configuration ?

Je ne vois pas comment il pourrait y avoir une convention sans la CSMF et le SML. Pour signer, il faut représenter 30 % dans chacun des trois collèges. Pour trouver ça, en dehors de la CSMF et du SML, il faut aller se rhabiller. Il faudra attendre l’enquête de représentativité. Encore une fois, la CSMF ne participera à rien sans la levée des préalables cités. Je veux dire enfin que le clan des « réformateurs » n’est pas celui auquel on pense : il est chez nous. Nous avons un projet positif.

Chez les spécialistes de plateaux techniques, le BLOC réalise un score très élevé (58 %). N’est-ce pas un désaveu cinglant pour les centrales polycatégorielles historiques ?

Il s’agit d’un vote corporatiste et protestataire. Il y a un besoin de reconnaissance qui mérite d’être entendu. Mais le conglomérat du BLOC est-il capable d’apporter des réponses concrètes pour l’ensemble du corps médical ? En tout cas, c’est un nouveau partenaire qui mérite d’être respecté.

La convention unique est-elle toujours adaptée aux attentes catégorielles des différentes spécialités ?

Plus que jamais. Cela dit, nous n’avons jamais été hostiles à un volet spécifique pour tel ou tel type d’activité. Mais ne voulons pas, par exemple, enfermer la médecine générale dans un ghetto. Et il n’est pas question de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Propos recueillis par CYRILLE DUPUIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 8832